En l'espace de ces quatre dernières années, pas moins de trente émirs et trésoriers sont tombés sous les balles des forces de l'ordre, et ce, dans des opérations antiterroristes exécutées grâce à des renseignements judicieusement exploités. Mieux, en quatre ans, des centaines de terroristes affiliés à Al Qaïda au Maghreb islamique ont été anéantis grâce à des efforts considérables consentis par les services de sécurité. Ainsi, le dernier trésorier tombé en date n'est autre qu'Abou Ayoub Chekara, éliminé par une unité de l'ANP dans la région de Boumerdès il y a près de quinze jours. Du coup, l'émir national d'Al Qaïda au Maghreb Islamique, en l'occurrence Droukdel, vit des moments des plus pénibles depuis la création de sa nouvelle organisation terroriste qui tente de s'affilier à Al Qaïda mère à tout prix. Avant cette action, la branche maghrébine d'Al Qaïda avait perdu des dizaines d'émirs. A leur tête, Harek Zouheir, alias Sofiane Fassila. Ce dangereux élément d'Aqmi était le cerveau des attentats kamikazes contre le siège du Palais du gouvernement et du commissariat de police de Bab Ezzouar de l'année 2007. Né en 1975 à Sidi Daoud, dans la région de Dellys, Sofiane Fassila, appelé également Abou Heidara, était considéré comme l'un des plus importants conseillers de l'émir national du groupe terroriste de Abdel Malek Droukdel. Il était même le n°2 du mouvement terroriste d'Al Qaïda au Maghreb. Il a rejoint le GIA début 1994, avant de se rallier, en 2006, à l'ex-GSPC, aujourd'hui devenu Aqmi. Il a été désigné par Droukdel comme chef de la zone 2 dite zone centrale de l'espace d'opération du mouvement islamiste armé. Sofiane Fassila devient, très rapidement, l'un des plus proches collaborateurs de Droukdel. Impliqué dans de nombreuses affaires terroristes, Zouheir était réputé être le chef d'un réseau spécialisé dans le trafic d'armes dont une cellule a été démantelée à Berriane en 2006. Harek Zouheir a été anéanti le 6 octobre 2007 en compagnie de deux autres terroristes au cours d'une opération antiterroriste menée par les forces de sécurité dans la région de Boghni, en Kabylie, et qui avait visé un fourgon à bord duquel se trouvaient trois terroristes d'Al Qaïda au Maghreb. Abou El Abbas, Othmane Touati et les autres En plus de la mort de dizaines de têtes pensantes d'Aqmi, Droukdel a été enfoncé par la reddition de dizaines de ses meilleurs éléments. Parmi ces redditions les plus marquantes, il y a celle du «mufti» et juge de l'ex-GSPC affilié à Al Qaïda qui s'est rendu il y a plus de deux ans aux services de sécurité. Sa reddition a été suivie le jour même par une autre repentance, celle d'un autre terroriste, un ancien du GIA évadé de Tazoult (Batna). C'était un coup dur porté à l'ex-GSPC et à son chef «spirituel» Droukdel. Il s'agit de la reddition de Touati Othmane, alias Athman Abou El Abbas, qui occupait le poste de chef de la commission légiste au sein de la hiérarchie du GSPC et membre du conseil des sages. Cette commission était considérée comme la plus importante autorité dans l'organigramme de l'organisation terroriste du fait qu'elle centralise toutes les décisions. Abou Al Abbas était l'un des principaux lieutenants de l'émir Droukdel et en même temps son homme de confiance. Il a rejoint le maquis en 1993 dans les rangs du GIA dans la région centre avant de rejoindre Hassan Hattab avec qui il a participé à la création du GSPC. Il dirigea en compagnie de l'«émir» abattu Saâdaoui Abdel Hamid (Yahia Abou Haïthem) la zone 2 avant d'être rappelé par Droukdel pour prendre en charge les affaires de législation. Il a été désigné en 2007 comme «émir» par intérim de la zone 2 (région du centre) après la neutralisation de Zouhir Harrak, alias Sofiane Fassilla, (abattu à Boghni) avant de désigner Rachid Abdelmoumen, alias Hodeïfa Abou Younès Assimi dans ce poste. Droukdel avait fait appel aux anciens terroristes de l'ex-GIA, connus pour leur parcours et leur radicalisme devant les redditions des partisans de l'ex-émir de l'ex-GSPC, en l'occurrence Hassan Hattab. Abou El Abbas en était un. La reddition de Touati a été suivie aussi par la repentance du nommé Grik Ahcene. Ce dernier, un ancien cadre du GIA, est natif d'Alger. Après avoir organisé son évasion de la prison de Tazoult à Batna, il était actif durant cinq années au sein de Seriat Aïn Hammam, alliée à katibate Ennour, activant à Tizi Ouzou, l'une des plus importantes phalanges de l'organisation terroriste. Selon ce repenti, l'organisation de Droukdel a connu une anarchie jamais vécue auparavant, voire depuis sa création, en raison de la pression des forces de sécurité. La plupart des katibate et des sériate du centre dirigées par cet «émir» ont été également démantelées, à commencer par katibate El Feth qui a disparu avec son chef Omar Bentitraoui. Les katibate El Ansar et El Arkam, amoindries et affaiblies, éprouvent des difficultés à coordonner leurs actions en raison des pressions et des offensives menées par les forces de sécurité. L'absence d'attentats durant ces derniers mois explique cette situation. Il avait fait état aussi de la volonté d'un nombre important d'éléments de la phalange de se rendre suite à la pression des services de sécurité et à la perte de tout soutien populaire ainsi que la rareté des nouvelles recrues. Abou El Abbas avait révélé au lendemain de sa reddition (deux ans auparavant) «des problèmes que rencontrent les groupes armés dans les maquis, notamment les difficultés liées aux conditions de vie des terroristes suite aux opérations de ratissage opérées par l'ANP, mais aussi à l'absence d'une autorité religieuse pour légitimer les attentats kamikazes, les enlèvements et l'activité terroriste». Il semble que les pressions exercées par d'anciens de l'ex-GSPC, des oulémas et certains théologiens ont bouleversé le commandement de cette organisation terroriste surtout sur le plan du recrutement qui a connu un net recul. Les dernières «fetwas» des oulémas et de certains théologiens qui ont contesté le «djihad» en Algérie et condamné les attentats commis par l'ex-GSPC ont déstabilisé Droukdel et ses éléments comme l'avait déjà affirmé d'ailleurs Abou El-Abbas. Devant cette situation, Droukdel avait déjà envoyé un message au célèbre théologien, l'un des éminents idéologues et le plus estimé dans le monde, le mufti d'Al Qaïda, connu sous le nom de «père spirituel» du djihad mondial, à savoir Mohamed Al Makdissi, pour légitimer ses actions et apporter son soutien au GSPC et légitimer les attentats kamikazes. Aujourd'hui, la pression est de plus en plus forte pour Droukdel qui, après l'élimination de ses cadres, vit des moments des plus pénibles depuis plus de cinq ans. D'ailleurs, le dernier succès réalisé par les forces de l'ordre en éliminant Abou Yahia Chekara avait replongé l'organisation terroriste d'Al Qaïda au Maghreb dans le doute, voire une impasse qui ne fait qu'enfoncer davantage ce groupe terroriste vers la fin.