L'Irak a été divisé en quatre districts militaires en prévision de l'imminente invasion des troupes américano-britanniques. Plus rien, désormais, n'arrêtera la guerre. Le compte à rebours, entamé depuis des semaines, touche pratiquement à sa fin. De persistantes rumeurs vont même jusqu'à dire que les bombardements, dans lesquels des obus et missiles à l'uranium appauvri seront utilisés, devraient commencer dès demain. De nombreux signes avant-coureurs le confirment. Les plus hautes instances dirigeantes irakiennes, sous la direction de Saddam en personne, se sont réunies samedi soir pour un véritable conseil de guerre. Désormais, l'Irak est en état de guerre. Le pays a été officiellement divisé en quatre zones militaires en prévision des attaques américano-britanniques. Le Conseil de commandement de la révolution (CCR) a placé la région centrale, qui englobe Bagdad où seraient massées les troupes d'élite de la Garde républicaine, sous le commandement du fils cadet de Saddam, Qoussaï. La région nord, qui risque de recevoir des attaques à partir de la Turquie, sera placée, elle, sous le commandement du numéro deux du régime, Izzat Ibrahim. La région sud, la plus exposée sans doute, puisque le plus gros des troupes américano-britanniques est massé au Koweït dont les trois quarts du pays ont été transformés en zones militaires interdites aux civils, repose sur les épaules de Ali Hassan Al-Majid, influent membre du CCR et cousin du président irakien. Al-Furat Al-Awsat, située dans le sud de l'Irak, où de violents combats seraient attendus, est dirigée par Mizban Khader Hadi. L'agence officielle irakienne, Ina, précise, dans un communiqué rendu public hier, que «la division du pays en quatre commandements régionaux directement reliés au président Saddam Hussein vise à assurer les moyens de repousser et d'anéantir toute agression si les méchants venaient à la commettre». D'autres prémices qui ne trompent pas sont également observées. Au moment où Saddam a officiellement invité Al-Baradei et Blix à venir à Bagdad, sans doute dans une tentative désespérée de retarder une échéance devenue inéluctable, l'ONU vient de retirer de ce pays cinq hélicoptères de type Bell 212 de fabrication américaine. L'assureur, en effet, a cessé sa couverture depuis hier face à l'imminence des bombardements américano-britanniques qui promettent d'être d'une «sévérité» sans précédent. La plus forte bombe conventionnelle de toute l'histoire de l'humanité, équivalant en puissance à une petite bombe nucléaire, y sera utilisée. Elle a été testée la semaine dernière à cet effet. Ses effets dévastateurs s'étendent sur des dizaines de kilomètres à la ronde. Les frappes aériennes viseraient à couper les troupes de leurs responsables en rendant impossibles les communications et en soufflant toutes les infrastructures de base. Les Irakiens tablent sur le corps à corps et les combats de rue. Le siège de Bagdad risque de durer des mois alors que la ville symbole de Takrit risque d'être le «Stalingrad» des troupes américano-britanniques, comme l'a promis la haute hiérarchie militaire de Saddam. Les Américains, qui savent être en retard dans leur calendrier, ne doivent pas ignorer que le facteur climatique, qui a déjà joué de grands rôles par le passé, risque, cette fois encore, d'être déterminant. Le problème des mines, posé par les troupes d'élite américaines, risque de retarder la progression de cette armée. De nombreux Etats arabes, pour leur part, ont mis en avant le risque d'installation du chaos dans la région en cas de guerre de longue haleine contre l'Irak. Saddam, pour doper ses troupes et le peuple, a fait dire à un ancien ministre saoudien qu'il mourra dans son pays, debout et libre. Sans trop y croire, sans doute, l'Irak poursuit sa collaboration méticuleuse avec les inspecteurs onusiens. Son rapport sur la destruction du bacille du charbon, a ainsi annoncé Bagdad, sera remis demain. Mais ne sera-t-il pas déjà trop tard?