L'avocat par qui le scandale est arrivé «Ce qu'il a déclaré est bizarre et dangereux et nous le démentons», a affirmé le frère du martyr Chokri Belaïd. En mal de notoriété, un avocat tunisien s'est trompé de cible. En voulant accrocher quelques petits trophées sur sa robe noire, il s'est retrouvé avec une bombe dans son escarcelle. Me Faouzi Ben Mrad, puisque c'est de lui qu'il s'agit, n'a pas trouvé mieux que de prétendre que ce sont des Algériens qui sont derrière l'assassinat de l'opposant tunisien Chokri Belaïd. «Des Algériens sont derrière le meurtre de Chokri Belaïd.» C'est ce qu'a affirmé, lors d'une conférence de presse tenue vendredi 22 février 2013, Faouzi Ben Mrad qui est de plus, le porte-parole du comité de défense du martyr Chokri Belaïd. L'avocat a précisé qu'un Tunisien a assuré l'entrée de ces Algériens en Tunisie, un jour avant l'assassinat de Belaïd. Sans prendre la moindre précaution pour les besoins de l'enquête, qui pourtant se poursuit toujours, l'avocat ajoute que «cette même personne a utilisé la même manière pour garantir la sortie de ces Algériens, un jour après l'assassinat et à travers le gouvernorat de Kasserine». Et pour terminer sa fausse plaidoirie, il a affirmé avoir «reçu ces informations de la part d'un citoyen tunisien, sans citer son nom ou sa qualité». Cerise sur le gâteau, cet avocat ajoute qu' «il n'a pas confiance en la justice» puisqu'il est sous écoute. Sitôt lâchés, ces propos ont déclenché une foudre qui s'est abattue sur cet «avocaillon» qui n'a rien appris du grand maître, Habib Bourguiba. La famille du défunt Chokri Belaïd, le syndicat des magistrats tunisiens et le ministère algérien des Affaires étrangères ont tous réagi à ces propos «irresponsables». Comme première mesure, il a été «sanctionné» par la famille de la victime: celle-ci lui a retiré sa confiance. Le frère du martyr Chokri, Abdelmajid Belaïd, a annoncé, dans une déclaration à Radio Express FM, que sa famille a décidé de retirer la procuration à l'avocat Faouzi Ben Mrad dans l'affaire de l'assassinat de son frère. Il a également, rejeté en bloc, les déclarations faites par Me Ben Mrad selon lesquelles des Algériens seraient derrière l'assassinat du martyr Chokri Belaïd. Abdelmajid Belaïd a ajouté que «ce qu'il a déclaré est bizarre et dangereux et nous le démentons», précisant que «Chokri avait prévenu qu'Ennahdha et Qatar allaient impliquer des Algériens dans ce genre d'affaires et Me Ben Mrad était au courant de ses dires». De son côté, le puissant syndicat de magistrats tunisien (SMT) a réagi avec énergie contre ce dérapage. Suite à ses déclarations dans lesquelles il a émis des doutes sur la capacité de la justice tunisienne à faire toute la lumière sur l'assassinat de Chokri Belaïd, le STM a condamné, dans un communiqué, les propos de l'avocat ayant mis en doute l'indépendance et l'intégrité de la magistrature. Le Syndicat estime que «les propos de Faouzi Ben Mrad sont de nature à semer la discorde et que ses déclarations s'apparentent à de la surenchère et à une attitude douteuse et irresponsable». Le même communiqué ajoute que ces propos «constituent également une violation du secret de l'enquête ainsi qu'une atteinte au prestige de la magistrature, et apporte son soutien à tous les magistrats exposés à ce type de pratiques». De son côté, le ministère algérien des Affaires étrangères a réagi par la voix de son porte-parole Amar Bellani. «Je me dois de réagir aux propos extravagants attribués à l'ex porte-parole du comite de défense du martyr Chokri Belaïd, sur une prétendue implication de l'Algérie dans l'odieux assassinat de cette figure politique emblématique de la Tunisie que nous étions parmi les premiers à condamner énergiquement» a déclaré hier le porte-parole du ministère des AE. M. Bellani a souligné que même si cet avocat a rectifié lui-même ses propos et que ces derniers ont été récusés par la propre famille du défunt, «l'Algérie fasse l'objet d'une quelconque opération de mystification ou de diversion à travers ce genre d'élucubrations irresponsables et nous restons résolument aux côtes du peuple tunisien frère que nous assurons de toute notre solidarité dans ses efforts pour faire triompher ses idéaux et ses aspirations.»