Rachid Bouchareb avec Forest Whitaker sur les lieux du tournage L'Arc a organisé, hier matin, au sein de son siège, à Dar Abdeltif, une conférence de presse relative à la production du dernier-né de Rachid Bouchareb. Ont animé cette rencontre, outre Rachid Bouchareb, Mustapha Orif en sa qualité de directeur général de l'Aarc, mais aussi de coproducteur. Notons d'emblée que ce film est une adaptation d'après l'oeuvre de José Giovanni Deux hommes dans la ville et des dialogues de Daniel Boulanger. Que raconte le film? Voici le synopsis: «Après 18 ans de réclusion au Nouveau Mexique, Garnett n'a qu'une idée en tête, se réinsérer et reprendre une vie normale. Son parole-officer, Emily Smith, va le soutenir dans son combat. Mais Garnett est vite rattrapé par son passé. Le Sheriff Bill Agati veut lui faire payer très cher la mort de son adjoint, 20 années plus tôt.» Quatrième oeuvre tournée aux Etats-Unis, ce polar aura pour principaux acteurs d'Hollywood, l'excellent et charismatique Forest Whitaker, mais aussi Harvey Keitel, Brenda Blethyn, Ellen Burstyn. Produit notamment par l'Aarc, Jean Brehat et Jerome Seydoux, le scénario de Enemy way est coécrit par l'écrivain Yasmina Khadra qui a apporté ses connaissances en matière de spiritualité, car ayant baigné tôt dans un univers soufi à Kenadsa. Ce dernier à confié à l'auteur d'Indigènes, qu'il est en pleine écriture d'un autre scénario dont le tournage sera entamé l'année prochaine. Car il faut savoir que Enemy way est un film policier qui raconte avant tout «l'histoire d'un Afro-Américain qui décide, en prison, de se convertir à l'Islam. Pour ce faire, il sera aidé par un imam algérien.. C'est un film qui porte sur le déracinement et l'émigration. Je voulais dénoncer les dangers de l'islamophobie aux USA, en ramenant ce sujet là-bas et susciter le débat de ce côté-ci. J'ai voulu aussi partager avec les Américains ma culture, mon histoire, en apportant ma vision des choses. Car il y a un monopole de l'Occident sur les images. L'avant-première du film aura lieu à Alger au début de l'année prochaine. Je tiens à ce que l'Algérie soit partenaire, car cela me donne de la force pour continuer mes aventures cinématographiques (...). Non, Enemy way n'a rien à voir avec le film Un Prophète de Jacques Audiard, car cela ne se passe pas entièrement en prison, mais plutôt, avec La Poursuite impitoyable d'Arthur Penn, c'est dans cet esprit-là..» a expliqué Rachid Bouchareb qui éclot ainsi sa trilogie autour de la même thématique après avoir signé Just like a woman et Litlle Sénégal, très beau film au demeurant avec feu Sotigui Kouati. Revenant à ses débuts, le réalisateur a tenu d'abord à rendre hommage au directeur photo, Youcef Sahraoui, avec lequel il a beaucoup travaillé rappelant l'importance de venir tourner en Algérie et d'être soutenu par l'Algérie que ce soit dans le financement de ses films ou autre tout en regrettant l'absence d'infrastructures, de studios idoines et de formation de techniciens et d'artisans dans le domaine du cinéma. «L'apport économique algérien me permet d'être libre, pour ne pas avoir de censure du côté américain, de raconter ce que je veux comme je veux mon film.» Et de souligner: «On est comme des ministres des Affaires étrangères. Un cinéaste doit s'accaparer de tous les sujets, même faire un film sur la Syrie pourquoi pas...» et d'indiquer: «Relever des défis avec des Algériens sur la scène internationale et que mes films soient représentés par l'Algérie, voilà qui trouve un sens à mon travail...» Evoquant la polémique autour de Hors-la-loi qui a eu un impact mondial a-t-il estimé, il dira: «Cela a permis au film d'être nominé aux Oscars et a constitué une très bonne pub pour le faire connaître dans le monde.» Prenant la parole, M.Orif insistera pour sa part, sur le rôle de l'Aarc en tant que coproducteur cinématographique «qui aide à plus de distribution et en faisant montrer les films algériens dans le pavillon algérien (Festival de Cannes notamment) dans le monde entier et leur donner donc plus de visibilité (...) On travaille avec tout le monde y compris avec Merzak Allouache. Il n'y a aucun problème entre lui et le ministère de la Culture...», a-t-il ajouté et Rachid Bouchareb de faire remarquer enfin, un peu dépité: «L'Algérie a de grands cinéastes qui sont dans l'ombre, mais pour les en extraire il faut qu'il y ait des endroits pour projeter leurs films et au public d'y participer. C'est important, y compris économiquement...».