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Les prémisses d'une crise de l'énergie
Publié dans L'Expression le 22 - 06 - 2004

«Mon père chevauchait un chameau. Je conduis une voiture. Mon fils vole en jet. Son fils chevauchera un chameau».
Proverbe saoudien actuel
L'énergie comme chacun sait, a bercé l'enfance de l'humanité. Nos ancêtres ont fait une découverte technologique majeure en inventant le feu. Du coup, leur façon de vivre, voire de survivre a fondamentalement changé. C'est ainsi graduellement après avoir vaincu la peur (des animaux) et le froid, l'homme préhistorique a commencé intelligemment à utiliser les convertisseurs biologiques.(1).
Il découvre les vertus du soleil, de l'eau et graduellement, il utilise le rythme des saisons pour planter semer et récolter des graines. Curieusement, les premiers villages organisés ont vu le jour dans l'Irak d'aujourd'hui. Ce patrimoine de l'humanité, et pas seulement des Irakiens, a été livré au vol lors de l'entrée des Américains en avril 2003 pour venir à leur façon, voler le feu, comme l'a si bien décrit J.H.Rosny Aîné dans un roman célèbre la Guerre du feu. Où en sommes-nous actuellement? On nous dit que l'énergie est abondante, qu'elle ne manquera pas et qu'on a tort de s'en faire. On peut s'approvisionner au besoin par la force...
C'est-à-dire qu'indirectement il est inutile de préparer l'avenir, puisque 2020 -2030... c'est loin. Périlleuses certitudes et périlleux sommeil!
La mondialisation de la pauvreté
1,2 milliard d'individus (20%) n'ont pas accès à l'eau potable. 2,4 milliards (40%) ne disposent pas de systèmes d'assainissement adéquats, 200 pays ont pris l'engagement de réduire de moitié d'ici 2025 ces chiffres lors du sommet de Johannesburg en septembre 2002 et au forum de Kyoto(2).
Comment y arriver quand on sait que d'après l'Unesco, 20% de la population la plus riche consomme à elle seule environ 86% des ressources de la planète, tandis que 20% de la population la plus pauvre n'a droit qu'à 1,3%. Le rapport est de plus de 60. Par ailleurs, d'après la Banque mondiale: 1,134 milliard d'individus vivent avec moins d'un dollar/jour (300 millions en Afrique subsaharienne, 260 millions en Asie et 77 millions en Amérique du Sud).
De 1981 à 2001, la part de la population des pays en développement vivant avec moins de 1 dollar par jour est passée de 40% à 21%. La baisse mondiale de la pauvreté est entièrement due au succès asiatique, qui s'explique lui-même, en très grande partie par la Chine. En 2025, 760 millions d'individus vivront avec moins d'un dollar. En 1980, un pauvre de la planète sur dix était africain; aujourd'hui, un sur trois; en 2015, un sur deux. La pauvreté était au XIXe siècle associée à l'Asie, elle devient au XXIe siècle un problème africain.(3).
Le modèle libéral dit du «consensus de Washington» (ouverture commerciale, rigueur budgétaire, privatisations...) est en partie remis en cause au sein de la Banque mondiale, pour laisser la place à plus de prudence idéologique. L'Inde, dont le décollage récent est remarquable, obtient des résultats décevants contre la pauvreté. La part de la population disposant de moins de 1 dollar par jour n'est passée que de 36% il y a dix ans à 28% aujourd'hui (contre une réduction de 35% à 16% en Chine pendant la même période). La raison en est que la richesse nouvelle a été absorbée par les classes aisées de la «shining India» («l'Inde qui brille»).(3).
Comme le pense James Wolfensohn, le directeur général de la Banque mondiale, l'attention du Nord s'est détournée de la pauvreté, et cette négligence s'est encore aggravée depuis les attentats du 11 septembre.
Les montants des crédits publics ont fondu à 58 milliards de dollars en 2002, dont seulement 38 milliards d'argent frais. «Pour les pays les plus pauvres, l'aide représente à peine 3% de leur PIB», somme bien insuffisante pour les dynamiser.
La meilleure façon de promouvoir la croissance reste l'insertion dans le commerce mondial. La dette des pays du tiers-monde est passée de 50 milliards US au début des années 1970, à plus de 2500 milliards aujourd'hui. Dans cette même période, le service de la dette a été multiplié par 6. C'est un véritable mécanisme de subordination des pays du Sud.(4).
Les réserves actuelles de pétrole sont de l'ordre de1160 milliards de barils soit environ 160 milliards de tonnes (2003). Au rythme actuel de consommation (3,8 milliards de tonnes, Il en resterait pour quarante ans. En 2000, plus de la moitié de l'augmentation de la demande de pétrole a été due à la Chine et aux pays du pourtour du Pacifique. Les réserves de gaz naturel sont de l'ordre de 178.000 milliards de m3 (chiffre de 2002), quantités suffisantes pour assurer la satisfaction des marchés pendant quatre à cinq décennies selon le rythme d'exploitation.
S'agissant du charbon, les réserves seraient de 600 milliards de t.e.p. soit près de deux siècles au rythme de consommation actuelle, ou 50 ans si un retour massif au charbon après 2030 devenait incontournable
Trois ressources principales se partageaient en 2003 88 % de la consommation d'énergie (8 milliards de t.e.p ). Le charbon (26%), le pétrole (40%) et le gaz naturel (22%). On voit que ce bilan laisse peu de place aux énergies renouvelables (6%) et au nucléaire 6%. Près de 60% de la consommation mondiale actuelle de charbon est consacrée à la production d'électricité. La Chine utilise aussi le charbon dans son secteur industriel qui connaît une croissance rapide.
Parler des énergies renouvelables il y a encore une dizaine d'années bien après les coups de semonce salvateurs des «chocs et contre-chocs» de l'énergie, relevait d'une mode qui comme toute mode est atteinte du syndrome d'éphémérité. Pourtant, des pays ont eu le courage, la détermination, voire le bon sens de se tourner résolument vers ces énergies.
De par le monde et à des degrés divers, les pays s'organisent pour être dans le coup concernant le développement de ces énergies douces. Le développement de l'éolien est encourageant dans les pays développés du Nord (Danemark, Allemagne..) et même au Maroc, une centrale de 50 kw a été raccordée au réseau électrique. Dans le cas du solaire, fin 2002, l'Allemagne totalisait 4,8 millions de m², loin de la Grèce (2,8 millions), l'Autriche (2,5 millions de m2). Le solaire thermique encore un luxe mais plus une utopie
Le développement du photovoltaïque est rapide, mais représente encore peu de chose dans le bilan énergétique mondial. En Allemagne, le prix du Kwhe a pu être produit à 60 centimes d'euro. Le 24 mars 2003, BP Solar atteignait le nouveau record d'efficacité de 18,3% d'une cellule photovoltaïque. Les principales multinationales l'ont bien compris, elles investissent dans le domaine du renouvelable. On peut citer BP Solar (54,2 mw), Shell-Siemens: 39 mw), En Europe, l'Allemagne bat tous les records, fin 2002, avec 258 mwc d'installations raccordées aux réseaux et 20 mwc d'installations en sites isolés. En deuxième position arrive les Pays-Bas avec 23,7 mwc d'installations raccordées aux réseaux et 4,6 mwc d'installations en sites isolés.
Les prévisions à l'horizon 2020
Dans moins de vingt ans, le monde aura quelques milliards d'hommes en plus, et un besoin croissant en énergie. Il est pratiquement admis que les ressources fossiles (pétrole et gaz) seront sur le déclin. A quel type de civilisation aurons-nous affaire? Quand on sait que la pétrochimie a envahi tous les domaines de l'activité humaine, de l'habillement à l'habitat à la voiture et même à la nourriture. Quel sera le carburant de demain? Comment allons- nous nous vêtir sans les fibres polyesters, les nylons, ...?
Selon une étude publiée par l'AIE, La consommation d'énergie va augmenter de près de 60% d'ici 2020 La consommation globale prévue est évaluée à 11,6 milliards de tonnes.
Les hydrocarbures seront encore prépondérants. De plus, les énergies renouvelables seront de plus en plus présentes, notamment dans les pays du Sud avec une stabilisation du nucléaire. Les pays du Sud verraient leur consommation atteindre 50% de l'ensemble.
L'amélioration ne sera pas d'ordre qualitative mais quantitative
La production mondiale de pétrole conventionnel déclinera tandis que la demande mondiale ne cesse de croître. Le choc résultant de cette famine pétrolière structurelle est inévitable, tant sont importantes la dépendance de nos économies au pétrole bon marché et l'impossibilité concomitante de les en sevrer rapidement.
Le pic d'Hubbert du Moyen-Orient pétrolier devrait être atteint autour de 2010, selon la reprise plus ou moins tardive de la pleine production irakienne et selon le taux de croissance de la demande chinoise. Cette prophétie, certaine, écrit Yves Cochet, est universellement ignorée, déniée ou sous-estimée. Rares sont ceux qui mesurent exactement l'imminence et l'ampleur de son avènement.(5). Michael Meacher, ancien ministre de l'Environnement du Royaume-Uni (1997-2003), écrivait dans le Financial Times, qu'à défaut d'une prise de conscience générale et de décisions planétaires immédiates de changements radicaux en matière d'énergie, «la civilisation affrontera le plus aigu et sans doute le plus violent bouleversement de l'histoire récente».
La production d'énergie est, et restera pour longtemps encore, basée sur le pétrole. Le recours au pétrole et aux énergies fossiles en général, produit du gaz carbonique, le principal gaz responsable de l'augmentation de l'effet de serre. On prévoit une augmentation des émissions de gaz carbonique de près de 70% d'ici 2010. Le pétrole restera la principale source d'énergie du monde jusqu'en 2020. Ce n'est pas, a priori, comme l'écrivait à l'époque du premier «choc» pétrolier, Pierre Desprairies, ancien président de l'IFP, «un problème de réservoir mais un problème de robinet».
La consommation d'électricité augmentera de deux tiers d'ici à 2020. Elle augmentera le plus dans les pays en développement. Dans les pays industriels, son rythme de croissance sera moindre du fait de l'amélioration du rendement énergétique des appareils.
C'est dans les pays en développement, en particulier en Asie, que l'énergie, notamment nucléaire, se développera le plus. Les pays industriels et les pays de l'ancien bloc soviétique ne devraient guère remplacer leurs anciennes centrales nucléaires. Toutefois, la France et le Japon ont prévu de mettre en activité de nouvelles centrales au cours des dix années à venir. La consommation de pétrole aura surtout lieu dans le secteur des transports dans la plupart des pays industriels. On estime, aussi, que le nombre d'automobiles dans ces pays va doubler au cours des vingt prochaines années et qu'il devrait quintupler en Chine.
Le gaz naturel reste l'élément de la consommation mondiale d'énergie dont l'augmentation sera la plus rapide. La part du gaz naturel dans la consommation totale d'énergie devrait augmenter de 5% pendant la période de 1999 à 2020 et devenir supérieure à celle du charbon. Cette source d'énergie est de plus en plus utilisée pour la production d'électricité du fait qu'elle est peu polluante et relativement peu chère.
L'utilisation de sources d'énergie renouvelables devrait augmenter de 53%, mais la part de ces sources dans la consommation totale d'énergie devrait diminuer pour passer de 9 à 8%. La plupart de la croissance dans ce domaine proviendra de grands projets hydroélectriques dont la construction est prévue dans plusieurs pays en développement, notamment en Inde, en Chine, en Malaisie et dans d'autres pays asiatiques.(6).
A moins, hypothèse peu probable pour l'instant, que des mesures drastiques ne soient décidées pour limiter le recours aux énergies fossiles (respect de Kyoto) la consommation devrait passer de 75 millions de barils par jour en 2000 à 89 millions en 2010 et à 120 millions en 2030, selon les dernières projections de l'Agence internationale pour l'énergie.
Cela représente une demande additionnelle de 45 millions de barils par jour d'ici à 2030. Autrement dit, explique Nicolas Sarkis, directeur de la revue Pétrole et gaz arabes, «il faudrait mettre en place de nouvelles capacités de production qui équivalent, d'ici à 2010, au double de la capacité actuelle de production de l'Arabie saoudite et, d'ici à 2020, à 130% du total des capacités actuelles de tous les pays de l'Opep». Le financement de l'ordre de 1300 milliards de dollars doit être mis en place dès à présent.
La situation européenne est critique encore: les importations de pétrole couvrent déjà 73% de ses besoins et la proportion devrait atteindre 92% en 2030. L'Inde occupe le sixième rang dans le monde sur le plan de la consommation d'énergie. Selon les prévisions, la demande indienne de pétrole devrait augmenter de 6,3% par année et passer à 179 millions de tonnes en 2006-2007. Pour répondre à cette demande, il faudra investir 100 milliards de dollars au cours des 10 à 12 prochaines années.
En 2003, la croissance de la demande pétrolière chinoise a atteint presque 10%. Ses énormes besoins en pétrole en font un acteur de plus en plus concerné par les question pétrolières mondiales dont dépendront stratégiquement son développement, son autonomie et sa marge de manoeuvre internationale.
Après être devenue en moins de deux décennies l'usine du monde, la Chine était également en passe de devenir la plus grande ferme de la planète?
Produits textiles, jouets, chaussures, puis lecteurs CD, DVD, téléphones portables, écrans de télévision, composants électroniques... on s´était habitué à ce que la Chine inonde les marchés de tous types de biens issus de l´industrie.(7). Ainsi le libéralisme sauvage semble être apprivoisé au pays de l´Empire du Milieu. Ce pays a su allier une sagesse antique et actuelle avec une mondialisation sans perturber les équilibres sociologiques que les Chinois ont mis des millénaires à mettre en oeuvre.
En 2050 la répartition énergétique est toute autre Les hydrocarbures pétrole et gaz naturel continueront de compter pour 43%, le charbon comptera pour 21%. Il y aura un retour du nucléaire peut-être même le démarrage de la fusion nucléaire. Enfin les énergies renouvelables représenteront 20% du bilan énergétique dont 5% pour l´hydraulique et 5% pour la biomasse.
Les Etats-Unis sont vulnérables sur le plan énergétique. Avec 4,6% de la population mondiale, ce pays consomme plus de 25% de la consommation d´énergie totale. les Etats-Unis contribuent ainsi, à 25% de la pollution de la planète; le protocole de Kyoto est dénoncé. Les réserves (30,4 milliards de barils) s´épuisent rapidement. Au rythme actuel, les gisements américains seront à sec à la fin de la décennie. En 1972, les importations de brut représentaient 30% de sa consommation. La proportion atteint aujourd´hui 55%. Selon les projections de l´AIE, elle atteindra 70 % en 2020.
Dans un rapport du Csis en octobre 2000, on lit: «L´économie des Etats-Unis et du monde est de plus en plus dépendante des importations de gaz et de pétrole du Golfe. (...) La production de pétrole aux Etats-Unis évolue selon une courbe descendante et il est improbable que les Etats-Unis puissent réduire leur dépendance croissante en importations énergétiques.» Il en découle que «les Etats-Unis sont obligés d´assurer que le pétrole puisse être vendu normalement sur le marché, que les producteurs de pétrole puissent investir afin d´augmenter la production et que les exportations puissent continuer sans entraves. (...) Les Etats-Unis doivent poursuivre leur rôle stabilisateur dans la région et leur rôle dirigeant dans la répression de toute forme d´agression.»(8)
La tentation d´empire des Etats-Unis
Les responsables américains refusent ainsi toute démarche pour réduire ce que l´hebdomadaire anglais The Economist appelait «oil addiction», la dépendance envers le gaspillage pétrolier. Le Plan Bush pour l´énergie est donc centré sur l´augmentation de l´offre et non sur la limitation de la demande.
Devant la demande des pays industrialisés et des pays émergents, les pays exportateurs augmentent leurs exportations. Même si la demande pétrolière ne croît que de 2%, le commerce international du pétrole, lui, se développe plus rapidement. Cette tendance aura des conséquences : tensions sur le fret, encombrement et sécurité des voies internationales, risques de pollution, dépendance accrue... Dès aujourd´hui il faut préparer l´avenir, comment aller vers le développement durable pas seulement des pays nantis mais aussi des PVD. L´une des causes probables d´une demande accrue d´énergie réside dans la consommation de la Chine et de l´Inde qui voudront à juste titre se développer. L´agence chinoise de l´environnement a montré que si les Chinois copient le modèle américain (une automobile pour deux habitants), le besoin en essence sera insoutenable pour le pays... et pour la planète. Naturellement la consommation d´énergie doit être moralisée. Les scénarios des experts (A.I.E., D.0. E, Banque mondiale) partent du fait que les consommations par tête d´habitant ne devraient pas changer fondamentalement. Comme l´écrit le consultant J.M.Jancovici de Manicore: «...Mais si chaque habitant de la planète aspire au mode de vie d´un Américain, qui consomme à lui seul 8 tonnes contre 3 à 4 tonnes pour l´Européen et 0,3 pour un habitant du Bengladesh., alors nous courrons véritablement vers une catastrophe.»(9)
En clair, il n´y aura pas de catastrophe, si l´Africain reste à 0,3 tonne et l´Indien 0,7 tonne. Comment amener la consommation d´énergie par habitant et par an de l´Africain à une tonne?: un niveau qui lui permette de vivre dans la dignité. Au nom de quoi, en définitive, la consommation d´énergie des Chinois, Africains ou Indiens serait -t-elle restreinte?
Par ailleurs, le prix du pétrole atteint de nouveaux records par crainte d´une pénurie. Le baril de brut a dépassé les 41 dollars. L´Arabie a annoncé une augmentation de sa production. Mais le principal moteur de hausse des cours reste l´insuffisance des stocks d´essence aux Etats-Unis à l´orée de l´été. De nombreux fonds d´investissements tablent sur une forte hausse de l´économie mondiale, et s´attendent à ce que les prix du brut atteignent les 50 dollars cet été. Pour certains c´est, un «quatrième choc pétrolier». Il faut bien savoir qu´en dollars constants, même à 40 dollars le baril, le prix de l´or noir n´atteint pas la moitié, en valeur constante, de ce qu´il représentait il y a vingt ans.(10)
D´un point de vue mondial, un pétrole cher fonctionnel contribuerait à soutenir les économies de pays producteurs. L´Occident pourrait espérer en tirer profit par accroissement de ses débouchés, d´abord, mais, surtout, parce que cette manne pourrait réduire la misère dans les pays producteurs et refroidir des sociétés surchauffées. Le pétrole cher est-il écrit dans le journal le Monde, n´est probablement pas favorable aux prêches islamistes.
Le prix du pétrole est déterminé par les fondamentaux que sont l´offre et la demande de ce produit sur les divers marchés. Il faut, toutefois, note Sadek Boussena, ajouter deux choses. En premier lieu, la demande et surtout l´offre de pétrole, sont largement influencées par de nombreux facteurs aléatoires. En deuxième lieu, dans un marché où la concurrence est imparfaite, le comportement et la stratégie des acteurs leaders influencent les développements du marché.(11).
Dans le cas du pétrole, l´offre est largement déterminée par le comportement d´un nombre très restreint de grands acteurs. L´interpénétration des intérêts économiques, du politique, de la diplomatie et du militaire est déterminant dans les anticipations de prix. Dans les prochaines années, la production des pays du Golfe, doit augmenter rapidement et être sécurisée pour éviter des chocs. D´aucuns estiment que les conditions actuelles ne le permettent pas.
Pour eux, seule la participation en grand des compagnies internationales, avec leurs capacités techniques et financières, permettrait d´atteindre cet objectif. C´est, pour les pays industrialisés la seule façon de s´assurer des sources d´approvisionnement perennes. Le scénario cauchemar de l´Irak risque de se reproduire pour l´Arabie saoudite, voire l´Iran qui fait partie, de l´«axe du mal».
L´enjeu énergétique segmente l´espace politique international. A l´époque, des «chocs», l´idée d´une intervention militaire contre les Etats de l´Opep n´était pas écartée. Cependant, les pays industrialisés, ont opté en définitive, pour une solution plus radicale: créer une institution capable d´évincer l´Opep. Ce fut l´Agence internationale de l´énergie. Conçue par H.Kissinger comme un contrepoids à l´Opep, l´AIE a mis en place une arme diabolique: l´Energy Sharing Program est en fait une émanipulation des forces du marché ainsi, les prix du pétrole sont combattus par un déstockage massif et concerté.
Le pétrole a été le seul domaine où l´Occident s´est vu confronté au début à des pays du Sud.
L´Opep est la seule institution du Sud qui est tolérée par une mondialisation- laminoir du fait que dans la réalité, 70 % de ses membres ont une dépendance vis-à-vis des Etats-Unis... Depuis septembre 2001 et suite à la tétanisation des pays du Golfe, l´Opep n´est plus considérée comme un «cartel» agressif. Malgré l´OMC, on accepte l´existence d´une «exception» Opep qui n´a plus rien à voir avec les idéaux des années soixante. Ainsi, le plus grand et plus influent producteur: l´Arabie saoudite, a des liens politiques, militaires, économiques particuliers avec les Etats-Unis, ce qui la place dans une situation particulièrement inconfortable depuis septembre 2001. Elle ne peut pas mécontenter son protecteur américain, les attaques qu´elle subit la fragilisent. Il en est de même du Venezuela «dans le collimateur américain». C´est dire si à des degrés divers, les ténors du pétrole sont déstabilisés et ne concourent pas, ce faisant, à une sérénité du marché pétrolier.
Conclusion
Les experts des pays industrialisés s´accordent à dire que jusqu´à 2020, au rythme de consommation actuel. nous pouvons consommer sans problème sauf facteurs irrationnels de type géopolitique civilisationnel ou autre, l´énergie, pendant encore 25 années. A partir de cette date, les premiers problèmes d´approvisionnement en pétrole commenceront à poindre.
C´est la fameuse crise géologique dont parle Yves Cochet, ancien ministre de l´Environnement en France.
Les tensions et les conflits persistent et se développent uniquement dans le tiers-monde. Le problème du développement est la priorité des priorités à laquelle nous tous devons y faire face et sans plus attendre, si nous voulons éviter l´éventualité tragique que ce problème ne se transforme un jour en une source de conflagration incontrôlée. Une nouvelle crise de l´énergie pourrait être datée si des mesures drastiques n´étaient pas prises par les grands acteurs de l´énergie, les pays industrialisés, les pays de l´Opep, les multinationales.
Il est donc logique et rationnel de prévoir dès maintenant les scénarios énergétiques à différents horizons en conjuguant plusieurs pistes de travail dans un contexte géopolitique qui a besoin avant tout d´apaisement. S´agissant de l´Algérie, il est grand temps d´aller vers la création de richesse en se dotant d´une stratégie énergétique cohérente qui mise avant tout sur la formation et la recherche.
Force est de constater que dans ce domaine, beaucoup de choses restent à faire.
1. C.E. Chitour : Vers une nouvelle crise de l´énergie. 8e Journée de l´énergie. Ecole Polytechnique.Hôtel Hilton 19 mai 2004.
2. Troisième Forum Mondial de l´eau Kyoto. 2003.
3. Eric Le Boucher le Monde du 16.05.04
4. Chems Eddine Chitour : La mondialisation : espérance ou chaos. Editions Anep 2002.
5. Yves Cochet : Yves Cochet : Vers la pétroapocalypse. Le Monde 1er avril 2004
6. Energie Plus n°265 du 1er mai 2001.
7. Benjamin Masse-Stamberger La Chine ferme du monde. L´Express du 07/06/2004.
8. US Policy Ten Years After the Gulf War, octobre 2000.
9. Jean Marc Jancovici : Revue Total 2003.
10. Article paru dans Le Monde du 03.06.04.
11. Sadek Boussena La nouvelle géopolitique pétrolière et les perspectives du marché Energy Specials 2 février 2004.


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