Essebsi souhaite donner des gages à la Tunisie quant à sa volonté de garantir les acquis de la Révolution de 2011 Beji Caïd Essebsi a délibérément choisi d'adresser un signal fort aux Tunisiennes et Tunisiens avec cette annonce. Confirmant la démarche qu'il a choisie durant la campagne pour les législatives, le leader de Nidaa Tounès, Béji Caid Essebsi, arrivé en tête du scrutin au premier tour de l'élection présidentielle devant son rival Moncef Marzouki, vient d'annoncer officiellement qu'il proposera deux candidats pour présider l'Assemblée des représentants du peuple et le gouvernement. «Suite aux événements qui ont marqué le premier tour de la présidentielle, nous avons décidé de rétrécir notre cercle et de proposer deux personnalités pour présider l'Assemblée des représentants du peuple et le gouvernement», a déclaré M.Essebsi dans un entretien accordé à la chaîne de télévision Nessma TV. S'agissant de la composition du gouvernement, il a indiqué que «Afek Tounes et l'Union pour la Tunisie seront associés ainsi que d'autres personnalités qui ont soutenu le projet de Nidaa Tounès». «Des contacts seront entrepris (...) avec le Front populaire», a-t-il annoncé, précisant qu'«Ennahda sera exclue de ces accords», en raison «de son appui à Marzouki» lors du premier tour de la présidentielle. M.Caïd Essebsi a aussi fait part du projet «d'un front de la majorité présidentielle» pour mener «en commun» la campagne électorale pour le second tour de la présidentielle. Ces choix sont importants et illustrent la stratégie arrêtée par Caïd Essebsi dans son programme de (re)conquête du pouvoir. Le chef de file de Nidaa Tounès n'agit pas sur un coup de tête, pas plus qu'il n'obéit à une brusque et violente aversion à l'égard de ses adversaires patentés, même si, au demeurant, il ne cache pas son rejet de leurs méthodes et de leurs objectifs. Arrivé en tête au premier tour de la présidentielle avec 39,46% des voix, devant le président sortant Moncef Marzouki (33, 43%), selon l'Instance supérieure indépendante pour les élections (Isie), il ne semble pas avoir été surpris par la soudaine progression du score de son rival dont le soutien par Ennahda est demeuré latent jusqu'à l'ouverture des bureaux de vote. Si la date du second tour reste tributaire du nombre de recours déposés, Marzouki s'étant amusé à en introduire sept puis à les retirer à la demande d'Ennahda, il est clair que Beji Caïd Essebsi a délibérément choisi d'adresser un signal fort aux Tunisiennes et Tunisiens avec cette annonce selon laquelle il composera son gouvernement et son bureau de l'Assemblée des représentants du peuple avec AfekTounès et l'Union pour la Tunisie, tout en optant pour deux personnalités de premier plan pour les postes majeurs. Cette dernière option est déterminante car Essebsi souhaite donner des gages à la Tunisie quant à sa volonté de garantir les acquis de la Révolution de 2011, préserver les choix démocratiques, impulser l'économie et surtout le tourisme tout en rétablissant la souveraineté du bourguibisme sur une société en proie à des démons de tous poils. En témoigne l'annonce d'un gendarme décapité dans la région du Kef par des terroristes qui sont activement recherchés par les forces de sécurité. Chaque semaine, des attentats sont enregistrés à travers le territoire tunisien où la horde terroriste tente de tisser sa toile meurtrière et la menace n'a rien de théorique. Cela, Beji Caïd Essebsi le sait et le redoute, sachant que son rival utilise désormais cette donne comme une épée de Damoclès, assénant à qui veut l'entendre que le choix, le seul, c'est «Marzouki ou le chaos». C'est la raison pour laquelle le leader de Nidaa Tounès a opté pour le projet «d'un front de la majorité présidentielle» afin de mener «en commun» la campagne électorale pour le second tour de la présidentielle. En élargissant le champ de cette majorité aux appuis qui viendront d'autres formations que la sienne, il conforte, d'une part, son pari de sceller une union pour la sauvegarde de la Tunisie héritée du bourguibisme et d'autre part, il verrouille le champ des possibles au tandem Ghannouchi-Marzouki dont les efforts risquent de s'avérer vains...