Lotfi Bouchouchi fait le plein Le cinéma algérien a triomphé au bord de la Méditerranée, en décrochant cinq Prix lors de la 31e édition. Quatre Prix ont été judicieusement décrochés par un seul film algérien «Le Puits» (Une première pour un film algérien dans un seul festival). Le film a raflé le Prix du scénario accordé à Yacine Belhadj, pour la qualité de l'histoire et la trame dramatique du film, le Prix de la meilleure interprétation féminine pour Nadia Kaci pour son rôle d'une mère courage et déterminée et deux Prix sont revenus au cinéaste Lotfi Bouchouchi pour la meilleure mise en scène et surtout du meilleur film arabe. Le réalisateur algérien était aux anges et avait toutes les difficultés à ramasser toutes les statuettes qu'il avait entre les bras. Sur scène, le cinéaste algérien qui était convaincu d'avoir au moins un prix était reparti avec autant de distinctions. Très ému par cette consécration, Lotfi Bouchouchi dont c'est la première oeuvre en tant que réalisateur et la première participation à un festival international, a tenu à rappeler que «Le puits» est une production 100% algérienne, avec en prime la participation de techniciens tunisiens donc de surcroît arabes. Et pourtant, dès son arrivée à Alexandrie, le réalisateur était parti sur de mauvaises bases. Sa fiche technique, pour des raisons inconnues, n'était pas dans le catalogue officiel de la manifestation, (donc pour de nombreux festivaliers), il n'existait pas le réalisateur, DCP en main, il avait bataillé avec les programmateurs pour essayer de projeter son film dans la salle jouxtant l'hôtel où était rassemblée toute la presse et les festivaliers. Lotfi Bouchouchi, qui n'a jamais mis les pieds en Egypte, s'est débrouillé avec un chauffeur de taxi devenu son guide dans la belle sirène d'Alexandrie, pour trouver une imprimerie numérique, dans un quartier populaire de la vieille ville, et imprimer une douzaine d'affiches grand format et en plusieurs langues afin de faire du marketing et de l'affichage pour attirer le public alexandrin. Pour le réalisateur, il est important de connaître l'avis du public égyptien sur son film. La projection fut un succès et le public et la presse du festival étaient étonnés de découvrir cette pépite du cinéma algérien. A la sortie de la projection, une grande critique de cinéma égyptien lui a lancé: «Tu vas décrocher le Grand Prix». Très modeste et humble, Lotfi Bouchouchi lui a simplement répondu: «Je me contenterais du prix de la première oeuvre.» Deux jours avant la clôture, le film était pressenti pour un prix dans la compétition du film arabe. Au point où une projection privée a été organisée à quelques cinéastes marocains qui avaient raté la projection et qui ont insisté pour voir le film. La consécration du film était déjà lancée. Mais c'est le jury qui a décidé d'un meilleur sort, puisqu'il lui a accordé quatre Prix dans la section du film arabe. Le film a été solidement défendu par le président du jury le cinéaste égyptien Omar Abdelaziz, mais aussi le cinéaste palestinien Rachid Al Mashrawi et les membres du jury omanais et jordanien. En revanche, le film de Belkacem Hadjadj «Fadhma N'soumer» n'a pas eu la même chance, puisqu'il n'a eu aucun prix alors qu'il avait décroché trois distinctions au dernier Fespaco. Dans les coulisses on indique que c'est la langue qui a été visiblement un handicap pour la compréhension du film par les jurys. (Les sous titrages n'ont pas convaincu le jury). Une situation délicate qui a obligé le président du jury, M.Abdelaziz, à faire des recommandations pour le futur: «Il faut favoriser les arabes d'expression arabe», l'allusion visait aussi l'autre film algérien, «L'histoire de Judas» de Rabah Zaïmèche qui était totalement en français. Dans la catégorie documentaire, l'Algérie s'est aussi illustrée avec le film de Mohamed Zaoui, qui a décroché le Prix du meilleur documentaire arabe pour son oeuvre «Akher Kalam» sur les derniers jours de Tahar Ouatar. Un documentaire réalisé sans moyens, mais qui a pu marquer par sa force émotionnelle le jury et même le public qui est venu assister avec grand intérêt à sa projection. Cinq Prix donc dans un festival dont quatre pour un seul film et en plus en Egypte, terre du cinéma arabe, c'est un grand exploit pour le 7e art algérien. Pour de nombreux observateurs arabes et même égyptiens présents à Alexandrie, le film «Le puits» n'a pas volé sa victoire. Après avoir décroché son quatrième prix, le public égyptien nombreux de la grande salle de la bibliothèque d'Alexandrie, s'interrogeait sur le contenu de ce film algérien qui a osé tout rafler dans le deuxième plus grand festival en Egypte après Le Caire. Pour de nombreux critiques, le film est complet: l'histoire est originale, la trame tragédienne est forte, les comédiens français et algériens sont crédibles, la mise en scène est soignée et la musique est parfaite. Il y a longtemps qu'on n'a pas vu un film aussi complet a déclaré un réalisateur syrien. La Syrie a été l'autre grand pays arabe victorieux dans le festival, puisque le pays du Sham a décroché le Prix de la première oeuvre pour la comédienne Soulef Faouakherji pour son film «Les lettres de cerises», alors que le film «Ala tawkit el Fardous» a remporté le Prix Spécial du jury, et la comédienne syrienne Nouara Youcef celui de la meilleure comédienne. Alors que le court métrage a été dominé par la Tunisie qui a remporté trois Prix: «Et Roméo et Juliette se sont mariés», meilleur court métrage méditerranéen, le court métrage tunisien «Revient à la ligne» a remporté le Prix du court métrage arabe, alors que le film «Chouf» de Imène Delil a remporté le Prix du meilleur court métrage doc narratif arabe. Quant au Prix du meilleur court métrage documentaire, il a été remporté par l'Egyptien Mohaned Diab pour son film magnifique sur le sacrifice de la femme égyptienne «Hayet Tahera». A noter, enfin que le Prix du meilleur film méditerranéen et le Prix de la meilleure comédienne méditerranéenne sont revenus à l'actrice albanaise Flonja Kodeli dans le film qui a retenu l'intérêt du grand jury présidé par Ilham Chahine: «Vierge assermentée» réalisé par Laura Bispuri. Alors que le Prix Youssef Chahine pour la meilleure mise en scène a été remporté par le cinéaste grec Kyros Papavassiliou pour son film «Impressions of a drowned man» coproduit entre Chypre, la Grèce et la Slovénie.