Le terrain, objet de litige, était la propriété de l'Office national du logement familial (Onlf). L'Association des jardins est inquiète : elle ne cesse, depuis 1991, de dénoncer «le détournement, par un particulier, d'un espace vert de 10000 m2, sis au Paradou (Hydra)». «Tout un domaine privé de l'Etat, constitué d'une grande barrière verte protégeant le versant ouest du site Paradou a été détourné par un particulier», lit-on dans un document signé par ladite association. Cette affaire continue de soulever des vagues, en l'absence, dit-on, d'explications «convaincantes». Le terrain, objet de litige, était la propriété de l'Office national du logement familial (Onlf). Cet organisme public, placé sous la tutelle du ministère de l'Habitat, avait été bénéficiaire, en 1981, d'un acte certifiant son plein droit sur l'assiette en question, dont la grande barrière verte, considérée comme une propriété de l'Etat. Il faut dire, en guise de précision, que ce terrain est d'une superficie estimée à 48.000 m2. En faisant référence aux détails fournis par le président de ladite association, Boualem Hedroug en l'occurrence, un second acte a été délivré par la suite au profit de l'Onlf, donnant ainsi le feu vert à la construction de 61 bâtisses sur un terrain de 38.000 m2 (permis de lotir et permis de construire N° A.12.80/2 bis du 22/09/81 délivré par le wali d'Alger à l'Onlf). L'Office national du logement familial a, par la suite, vendu, conformément à un acte délivré le 28/03/84, les 61 pavillons avec leur terrain d'assiette à la Coopérative d'habitat d'Alger (CHA). L'espace vert, estimé à 10.000 m2, demeure, par ailleurs, un bien foncier du domaine privé de l'Etat, protégé par un acte notarial de l'Onlf qui date du 05/03/84. Jusqu'ici, l'Association des jardins et la sous-direction de la conservation foncière et du cadastre reconnaissent que toutes les procédures ont été «conformes à la loi». «Toutes les démarches de vente et d'achat entreprises par l'Onlf et la CHA sont légales», avoue le sous-directeur des domaines. Cependant, la barrière verte (10 000 m2) a été cédée par la suite, soit en 1991, à la Coopérative d'habitat d'Alger «en modifiant ainsi la propriété de l'Onlf et ce, par un acte notarial publié le 30/04/1991». Cette affaire va faire tache d'huile du moment que les 7 autres parcelles (61+1) ont été vendues «illégalement». «La réglementation de la conservation foncière exige que l'acte de vente contienne obligatoirement un permis de construction et un certificat de conformité. Or, dans le cas des 7 nouvelles parcelles» qui constituent, en quelque sorte, la barrière verte réclamée par l'association, «l'acte de vente ne contient pas les deux documents exigés», reconnait la sous-direction de la conservation foncière. Accusations Les spéculations vont bon train sur cet acte de vente «illicite» qui est, semble-t-il, à l'origine de la polémique. L'Association des jardins ira plus loin dans ses révélations en disant que «dans l'acte notarial du 30/04/1991, il est écrit que l'augmentation des parcelles de ce lotissement a été approuvée par le wali d'Alger». Chose qui, de l'avis de cette association, «constitue une atteinte à la propriété d'autrui, un détournement d'un bien foncier du domaine privé d'Etat et une atteinte à l'autorité du wali d'Alger». Aux yeux des responsables de la sous-direction de la conservation foncière et du cadastre, la question est loin d'être une affaire de détournement, telle qu'elle a été évoquée par ladite association. La tendance est donc à la minimisation de la gravité de l'affaire. «C'est plutôt une simple erreur commise par l'un des conservateurs fonciers», a-t-on précisé en guise de rectification. L' Association des jardins décochera d'autres flèches à l'adresse du président de la CHA en le qualifiant de «l'auteur du détournement». Plus grave, selon le président de cette association, «l'action portant sur la modification de la propriété de l'Onlf a été menée par le président de la coopérative CHA dans la plus grande discrétion agissant ainsi en violation de la loi et du mandat qui lui a été confié par les coopérateurs». Les 7 parcelles en question ont été vendues, d'après notre interlocuteur, entre 1999 et 2001 à des coopérateurs «fictifs» en s'appuyant toujours sur l'acte notarial «illicite» du 30 avril 1991, portant pour les besoins de rappel, sur l'augmentation de la propriété de l'Onlf. Le porte-voix de ladite association ne s'arrête pas à ce stade. Il s'indigne dans sa lancée sur la publication, par la conservation des hypothèques de Bir Mourad Raïs, des actes de vente des 7 parcelles: «C'est une publication illégale. De plus, ce service est chargé de l'application et du respect de l'arrêté du wali d'Alger n° A. 12.80/2 bis protégeant le lotissement Onlf de toute modification, et dont il est destinataire». Tout en reconnaissant l'illégitimité des actes de vente des 7 nouvelles parcelles, la sous-direction de la conservation et du cadastre assure qu'une procédure judiciaire est en cours afin d'annuler les 7 «permis deconstruction illégale». Car, affirme-t-on, les espaces verts revendiqués par l'Association des jardins demeurent, «indiscutablement», une propriété de l'Onlf. Réactions officielles En tentant de corriger un pas de danse raté, le sous-directeur des domaines confirme qu'une procédure judiciaire est en cours en vue d'annuler les 7 derniers actes de construction délivrés. D'ailleurs, dans une correspondance officielle adressée par la direction générale du domaine national au directeur de la conservation foncière de la wilaya d'Alger, et qui date du mois de mai dernier, il est mentionné que «l'Onlf a bénéficié, conformément à un acte datant du 05/03/1984 d'une superficie de 48.000 m² (registre 107 n°7). Le même organisme a vendu à la Coopérative d'habitat d'Alger, suivant l'acte de 28/03/1984 (registre 113 n°1) 61 parcelles d'une superficie estimée à 38.000 m2». Le terrain restant, soit une superficie à hauteur de 10.000 m2, «demeure une propriété de l'Onlf», précise la même missive. L'augmentation de la propriété de la CHA à 68 (61+7) parcelles est considérée donc «illégale et une atteinte à la propriété d'autrui», a-t-on mentionné également dans la correspondance signée par le directeur général du domaine national. Le document en question met en cause le notaire qui a établi l'acte permettant à la CHA d'augmenter sa propriété par 7 nouvelles parcelles. Cet acte est jugé «illégal du fait qu'il a été établi en l'absence de l'Onlf, véritable propriétaire des 7 parcelles (un domaine de 10.000 m2) et sans que l'origine de la propriété soit aussi mentionnée». Suivant les résultats de l'enquête, la direction des domaines a ordonné le dépôt d'une plainte pour annuler l'acte en question ainsi que pour la poursuite des personnes présumées. «pour atteinte à la propriété d'autrui et à l'autorité des instances de l'Etat». Le ministère de l'Agriculture a, de son côté, entrepris une démarche en plaçant sur les lieux des panneaux indiquant: «Forêt annexe Paradou, propriété de l'Etat, inaliénable, imprescriptible et insaisissable». Nonobstant, les travaux du chantier «illicite», à l'arrêt depuis trois ans «à la suite de la découverte des documents frauduleux», ont repris subitement «sans que les autorités concernées prennent acte», s'interroge l'Association des jardins par la voix de son président, M.Boualem Hadroug. Ce dernier n'a pas manqué d'attirer enfin l'attention du nouveau wali d'Alger sur ce qu'il qualifie de «non-respect de la loi et détournement de tout un domaine privé de l'Etat».