Des milliers de Turcs pour scander le nom d'Erdogan Le Premier ministre Binali Yildirim a averti le Parti de la justice et du développement qui domine la scène politique turque qu'aucun slogan ne serait toléré à cette manifestation d'unité. «Une seule nation, une seule patrie, un seul Etat, c'est l'esprit qui doit prévaloir» a-t-il dit. Des millions de Turcs étaient mobilisés hier après-midi à Istanbul pour un rassemblement géant, apothéose de trois semaines de mobilisation populaire en faveur de la démocratie, à l'appel du président Recep Tayyip Erdogan en riposte au coup d'Etat manqué. Cette manifestation de masse doit marquer la fin des mobilisations quotidiennes ayant suivi le coup d'Etat mené par une faction de l'armée et qui a fait vaciller le pouvoir quelques heures, dans la nuit du 15 au 16 juillet. Le président Erdogan avait appelé ses sympathisants à descendre dans les rues pour faire barrage aux putschistes, s'appuyant énormément sur le peuple, choqué de ce coup de force qui avait pris la Turquie par surprise. Il les a appelés de nouveau à venir en masse dimanche à un «rassemblement pour la démocratie et les martyrs» unitaire. Les dirigeants de deux formations d'opposition, très courtisés depuis le putsch raté, doivent prononcer un discours, après des récitations du Coran. Puis ce sera au tour du président Erdogan de clore la manifestation à laquelle assisteront les familles des 239 «martyrs» du putsch raté - qui a fait 273 morts en comptant les insurgés. Le Premier ministre Binali Yildirim a averti le parti au pouvoir AKP (Parti de la justice et du développement), qui domine la scène politique turque, qu'aucun slogan ne serait toléré à cette manifestation d'unité politique. «Une seule nation, une seule patrie, un seul Etat, c'est l'esprit qui doit prévaloir» a averti M.Yildirim, mettant en garde contre toute provocation à ce grand rassemblement. Les journaux turcs consacraient dans un bel ensemble leur une dimanche à cette manifestation, le Hurriyet évoquant «une journée historique à Yenikapi». Le rassemblement doit officiellement commencer à 17h00 (14h00 GMT) dans le district de Yénikapi, sur les bords de la mer de Marmara, où des centaines de milliers de Turcs sont attendus, et même jusqu'à 3,5 millions, affirmait le Hurriyet. Les mesures de sécurité sont draconiennes dans une ville régulièrement ensanglantée par des attentats islamistes ou prokurdes: 15.000 policiers assurent la sécurité à Yénikapi, l'un des sites de prédilection des manifestations de masse organisées par le pouvoir. Le rassemblement d'Istanbul, fief politique du président Recep Tayyip Erdogan, sera retransmis par écran géant dans toutes les provinces turques. Ankara a désigné le prédicateur exilé Fethullah Gülen comme le cerveau du putsch raté et réclame à cor et à cri son extradition aux Etats-Unis. Le coup d'Etat manqué a été suivi par une purge implacable des pro-Gülen dans l'armée, la justice, l'éducation ou la presse notamment, avec plus de 60.000 limogeages, détentions ou gardes à vue qui, selon le président Erdogan, ne sont «que le sommet de l'iceberg». Depuis le putsch raté, le chef de l'Etat a réussi à mobiliser tous les soirs, notamment sur les places Taksim à Istanbul ou Kazilay à Ankara, des dizaines de milliers de Turcs, scandant son nom et brandissant le drapeau rouge national. C'est ce seul drapeau qui est autorisé dimanche et non ceux des formations politiques qui se sont jointes à l'appel de l'AKP. «Le rassemblement de Yénikapi renforcera notre unité», s'est réjoui le président Erdogan samedi à la télévision, «je suis content de la présence des dirigeants politiques» d'opposition. La principale formation d'opposition, le CHP social démocrate (Parti républicain du peuple), et le MHP de droite (Parti de l'action nationaliste) ont été conviés à la fête géante, mais pas le parti prokurde du HDP.Kemal Kilicdaroglu, le chef du CHP, qui avait hésité à se joindre au rassemblement d'Istanbul, a cédé à la pression d'une «avalanche» de coups de téléphone, dont celui du Premier ministre, selon le Hurriyet. Les échos de l'hymne turc, des discours politiques et des chansons à Istanbul pourraient parvenir jusqu'aux oreilles... du vieux prédicateur Gülen. «Un écran géant sera installé dans un autre endroit. Vous savez où?» a demandé le président Erdogan à des sympathisants vendredi à Istanbul. «En Pennsylvanie. Le message sera transmis là-bas», a-t-il dit. C'est dans cet Etat du nord-est des Etats-Unis que vit Fethullah Gülen.