Le Myanmar a entamé une campagne de «nettoyage ethnique» contre la minorité musulmane Rohingyas, a affirmé un représentant de l'ONU au Bangladesh, pays où se sont réfugiés ces dernières semaines des milliers de familles fuyant les exactions de l'armée birmane. «Ces actes s'apparentaient à un nettoyage ethnique», a estimé sur la télévision britanique BBC, John McKissick, directeur du Haut Commissariat des nations pour les réfugiés (HCR) dans la ville bangladaise frontalière de Cox's Bazar (sud). Viols en réunion, tortures, meurtres et massacres: les Rohingyas qui ont franchi la frontière ont fait le récit des violences que leur font subir les soldats birmans dans l'ouest du pays, où vivent des dizaines de milliers de membres de cette minorité musulmane. D'après les Nations unies, 30.000 personnes ont été déplacées par ces violences qui ont fait des dizaines de morts depuis le début de l'opération de l'armée birmane à la suite d'attaques de postes de police début octobre. «Il est très difficile pour le gouvernement bangladais de déclarer ouverte sa frontière, car ceci pourrait encourager le gouvernement birman à perpétuer les atrocités et les pousser dehors, jusqu'à atteindre son objectif final de nettoyage ethnique de la minorité musulmane du Myanmar», a expliqué M.McKissick. Le Myanmar a déjà été accusée de nettoyage ethnique contre ces musulmans mais c'était à l'époque où le pays était dirigé par d'anciens militaires. Mais depuis fin mars 2015, Aung San Suu Kyi a pris les rênes du pays et paradoxalement elle n'a jamais pris position ni ne s'est exprimé sur le sujet depuis le début des violences le mois dernier. Argument avancé: le nouveau gouvernement birman n'a pas de pouvoir sur l'armée, qui reste en charge du ministère de l'Intérieur et des Frontières notamment. Le sort des Rohingyas indifférent les pays d'Asie du Sud-Est. Haïs par une partie de la population, à 95% bouddhiste, ces derniers sont considérés comme des étrangers au Myanmar et sont victimes de multiples discriminations: travail forcé, extorsion, restrictions à la liberté de mouvement, absence d'accès aux soins et à l'éducation. Dans l'Etat Rakhine, des milliers d'entre eux vivent dans des camps depuis les violences lancées en 2012 par les bouddhistes qui avaient fait près de 200 morts. Pour fuir les persécutions et leurs conditions de vie, des milliers de Rohingyas tentent tous les ans de fuir en traversant le golfe du Bengale pour rejoindre la Malaisie notamment. Depuis quelque temps, c'est vers le Bangladesh que des milliers d'entre eux se sont tournés. Human Rights Watch, qui s'appuie sur des images satellites, affirme que plus de 1 000 maisons de Rohingyas ont été incendiées en Etat Rakhine récemment. «Les Rohingyas sont pris en étau», a déclaré Champa Patel, directrice d'Amnesty International en Asie du Sud évoquant leur «besoin désespéré» de nourriture, d'eau et de soins médicaux.