Selon les premiers éléments d'information, plusieurs « pontes locaux » devraient en pâtir. Selon des sources judiciaires très au fait du dossier du foncier agricole au niveau de la wilaya de Skikda, il est confirmé l'ouverture de plusieurs instructions concernant ces affaires. De mêmes sources, nous apprenons que «les magistrats instructeurs ont chargé la gendarmerie de mener des enquêtes au niveau d'une trentaine de communes parmi les 38 que compte la wilaya». Les enquêtes en question, qui auraient mis en cause plusieurs élus locaux toujours en poste, seraient également remontées dans le temps pour s'intéresser à la gestion des maires précédents, mais aussi des anciens DEC (délégations exécutives communales), mises en place au début des années 90 à la suite de la dissolution des APC (Assemblées populaires communales) aux mains du FIS-dissous. Les magistrats et les éléments de la Gendarmerie nationale, nous apprennent nos sources, «sont scensés ignorer toutes les formes de pressions concernant un dossier aussi sensible et impliquant de gros pontes locaux». La raison en est que «c'est le ministre de la Justice lui-même et garde des Sceaux, Tayeb Belaïz, qui en a donné instruction». Mieux, c'est le président Bouteflika en personne qui, à maintes reprises, est revenu personnellement sur cet épineux dossier, promettant que toute la lumière sera faite et que tous ceux qui ont abusé du foncier agricole, au même titre que leurs complices, seront démasqués et dûment châtiés. Skikda, ville à vocation touristique et agricole par excellence, comme le confirment les données chiffrées en notre possession, n'a pas échappé à la soif du gain facile de nombreux spéculateurs, jouissant de complicités diverses jusqu'au plus haut sommet de la pyramide décisionnelle locale. Ainsi donc, selon les premières estimations établies par les enquêteurs, plus d'un millier d'hectares de terres arables, qui formaient jadis des EAC et EAI (exploitations agricoles collectives et individuelles), ont été détournés au profit de projets industriels ou urbanistiques, dont beaucoup ont déformé l'architecture générale de la wilaya, aggravant au passage les problèmes de glissements de terrain auxquels est sujette la wilaya. Son premier responsable, Tahar M'lizi, lors d'une récente conférence de presse, avait eu à souligner que «ces glissements de terrain, qui menacent même des sites classés, sont surtout le fait de constructions anarchiques». Or, rien de cela n'aurait été possible sans de nombreuses complicités établies à différents niveaux décisionnels. De nombreux exploitants agricoles, loin d'être en reste, seraient eux aussi impliqués dans ces affaires frauduleuses où les enquêtes, apprend-on, «s'avèrent très difficiles à mener à cause des nombreux prête-noms qui y sont utilisés et des reventes des terrains, soit construits, soit nus, à des tierces personnes». Techniquement parlant, les enquêtes en sont à la leur première phase. Il s'agit, nous dit-on, du recensement de l'ensemble des «indus bénéficiaires» à l'aide des fichiers des services agricoles, des domaines et de l'administration municipale. La seconde phase, elle, consistera à procéder aux vérifications d'usage auprès des services de l'enregistrement des domaines dans le but de localiser la source des fraudes, et de situer les responsabilités de chacun avant que les suspects ne soient convoqués par la justice. Nous y reviendrons donc...