Au moins 71 policiers et rebelles ont été tués hier dans l'ouest du Myanmar après des attaques de rohingyas contre plusieurs postes frontières, des violences sans précédent depuis des mois, selon les autorités de Naypyidaw. «Militaires et policiers se battent ensemble contre les terroristes bengali», a déclaré le chef de l'armée, le général Min Aung Hlaing, sur sa page Facebook Les Rohingyas sont considérés comme des immigrés du Bangladesh voisin et appelés à ce titre «bengalis», le terme «rohingya» étant tabou au Myanmar, pays à majorité bouddhiste marqué par l'influence de moines radicaux qui dénoncent les musulmans comme une menace. Il s'agit de l'épisode de violences le plus meurtrier depuis plusieurs mois dans cette région, l'Etat Rakhine, marqué par de fortes tensions entre musulmans et bouddhistes. Y vivent des dizaines de milliers de Rohingyas, minorité musulmane victime de fortes discriminations au Myanmar, sans accès aux hôpitaux, aux écoles, au marché du travail. Plus de 20 postes de police ont été attaqués par quelque 150 rebelles rohingyas tôt hier, a annoncé, avant l'armée, le gouvernement civil d'Aung San Suu Kyi. Le chef de l'armée birmane a souligné le fait que «les combats se Poursuivaient» hier dans cette région frontalière du Bangladesh, notamment autour des postes de police des villages de Kyar Gaung Taung et Nat Chaung. Des armes ont été dérobées par les attaquants dans plusieurs postes de police, a-t-il précisé. Le mode opératoire ressemble à celui de la précédente série d'attaques meurtrières contre des postes frontières, en octobre 2016. Ces affrontements avaient été suivis par la fuite au Bangladesh voisin de milliers de Rohingyas, qui avaient livré des récits des atrocités commises par l'armée après ces attaques: viols en réunion, tortures, meurtres et massacres. Plusieurs des postes de police attaqués hier, à la frontière avec le Bangladesh, restaient encerclés hier dans la journée, selon des sources policières sur place. «La situation est compliquée... Les militaires arrivent» en renfort, a témoigné hier matin un responsable policier de Buthidaung, non loin de la zone la plus touchée. Le gouvernement birman a relevé hier «la coïncidence de ces attaques avec la publication du rapport final de la commission» dirigée par l'ancien secrétaire général de l'ONU Kofi Annan sur la situation dans l'Etat Rakhine. La commission avait appelé jeudi le Myanmar à donner plus de droits à sa minorité musulmane des Rohingyas, notamment de mouvement, faute de quoi elle risquait de «se radicaliser». La situation est particulièrement difficile pour les 120.000 musulmans vivant dans des camps de déplacés en Etat Rakhine, d'où ils ne peuvent sortir qu'au compte-gouttes, sur laisser-passer. Les dernières importantes attaques meurtrières contre des postes de police remontent à l'automne 2016. Elles avaient été suivies par un durcissement des actions de l'armée dans la région, avec incendies de villages et fuite massive de Rohingyas vers le Bangladesh voisin. La nébuleuse des groupes rohingyas impliqués dans les violences n'est pas très claire. Se détache un groupe, l'Arakan Rohingya Salvation Army (Arsa), qui assure mener l'insurrection depuis les montagnes de la zone de May Yu, dans le nord de l'Etat Rakhine.