En focalisant sur cette révision, Belkhadem met à nu les divergences au sein du sérail. Devant des milliers de personnes entre cadres et élus du FLN regroupés jeudi à la coupole, Abdelaziz Belkhadem relance - avec insistance - l'idée de réviser la Constitution algérienne. «Après le référendum du 29 septembre et les élections partielles de novembre, nous devons nous consacrer à la révision de la Constitution pour définir la nature de notre système politique et les prérogatives de chaque institution du pays» a annoncé le secrétaire général du vieux parti. Le FLN considère la révision de la Constitution comme une priorité, au même titre que les autres questions d'actualité, en l'occurrence le projet de charte pour la paix et la réconciliation nationale ainsi que les élections partielles en Kabylie. Pour le RND, la révision de la Constitution renvoie directement au rapport entre les trois pouvoirs (législatif, exécutif et juridique). Le patron du RND, Ahmed Ouyahia, estime à ce propos que cette question relève des prérogatives du président de la République et de l'autorité du peuple algérien qui s'exprime par référendum sur cet amendement. Que cachent alors ces déclarations divergentes entre deux hauts responsables politiques du pays à propos de la Constitution? Homme politique attentif et prudent, Abdelaziz Belkhadem n'est pas de nature à entretenir une polémique stérile. Comme tout autre texte juridique, la loi fondamentale du pays n'est pas figée. Elle est vouée au changement en phase avec les évolution sociopolitiques. Une mutation tout à fait normale surtout si cette Constitution est complètement en décalage avec la réalité. Seulement, lorsque la volonté de révision est récurrente depuis une année et particulièrement au lendemain de la présidentielle d'avril 2004, cela présume un soubassement de nature politique. Les observateurs avancent que si M.Belkhadem, représentant personnel du président, insiste sur une révision constitutionnelle, c'est qu'il le fait au nom du président Bouteflika. Bien avant que le secrétaire général du FLN ne s'intéresse au dossier de la révision constitutionnelle, la commission chargée de la réforme des structures et des missions de l'Etat, avait déjà proposé une refonte suite aux critiques directes du président Bouteflika affirmant que la Constitution ne l'arrangeait pas. En focalisant sur la révision du texte fondamental du pays, M.Belkhadem met à nu les divergences sérieuses qui existent entre le FLN et le parti d'Ouyahia, le RND. Mais dans cette entreprise, Abdelaziz Belkhadem, secrétaire général d'un parti dont le président d'honneur n'est autre que le président de la République, se trouve devant un dilemme. Coincé entre le dévouement au président et ses choix politiques, d'une part et la réappropriation d'un droit qu'il revendique par sa majorité, d'autre part, sa tâche s'annonce difficile. Le FLN ne cache pas sa prétention à reprendre la présidence du gouvernement occupée par le secrétaire général du RND, Ahmed Ouyahia. «Chaque chose en son temps» a rassuré M.Belkhadem en réplique au millier d'élus qui scandaient «gouvernement! gouvernement!» lors du meeting de jeudi à la coupole. «L'écueil» est que la «récupération» du poste de chef de gouvernement par le vieux parti, risque de déstabiliser une entité conçue par le président de la République: l'Alliance présidentielle qui regroupe la majorité du gouvernement et des instances élues. C'est en quelque sorte créer un malaise environnemental au chef de l'Etat. Bien entendu, l'approche des élections partielles et des législatives de 2007, la problématique se complique davantage. Le RND qualifie indirectement l'approche du secrétaire général du FLN de «politicienne» pour déstabiliser et changer le gouvernement. Et le FLN rappelle que le gouvernement - et le poste de chef du gouvernement - a été toujours occupé par le parti majoritaire. Belkhadem souligne au passage, lors de son meeting à la coupole, que l'histoire du FLN «ne date pas que de quelques mois, elle se confond avec celle de l'Algérie». Le bras de fer entre le représentant personnel du président de la République et le chef du gouvernement est ouverte. La guerre politique entre le FLN et le RND est dé-sormais portée sur la place publique. Il faut s'attendre à de sérieux contrecoups dans les mois à venir, à moins que ces divergences ne soient destinées à la consommation interne au parti. Ce qui n'est pas du tout évident.