Si l'égypte oeuvre à annuler la rencontre d'Alger, Bouteflika continue à en faire une priorité pour son second mandat. Rien ne va plus, désormais, entre l'Algérie et l'Egypte, cela même si rien d'officiel n'a encore filtré sur le bras de fer diplomatique qui oppose de plus en plus fort ces deux pays. Toujours est-il qu'Abdelaziz Belkhadem, le chef de la diplomatie algérienne, vient d'admettre dans les colonnes de la revue londonienne Asharq Al-Awsat, que «des pays arabes oeuvrent à empêcher la tenue du sommet arabe d'Alger à la date qui en a été fixée, à savoir les 21 et 22 mars prochain». Ce qui pousse les Egyptiens à déployer les grands moyens, diplomatiques, médiatiques et autres, c'est que l'Algérie, dans sa démarche, a mis en chantier un vaste chantier visant à réformer cette ligue sclérosée, devenue, pour reprendre les termes de diplomates s'exprimant sous le sceau de l'anonymat, «une sorte d'appendice du ministère égyptien des Affaires étrangères». Notre pays, qui a parfaitement pris conscience de l'affaiblissement de la Ligue arabe, à cause de l'absence de démocratie et de concertation véritable en son sein, au point que les instances internationales et les chancelleries occidentales ne prennent que rarement en ligne de compte ses avis, a souhaité que le fonctionnement de cette institution s'ouvre un peu plus tandis que sa direction devienne enfin tournante entre ses différents Etats membres. Sans doute n'en fallait-il pas plus à une Egypte soucieuse de son hégémonie sur la Ligue pour la faire grincer des dents et oeuvrer coûte que coûte à empêcher la tenue du sommet d'Alger, lequel a toutes les chances d'aboutir sur les réformes souhaitées par la plupart des Etats composant cette ligue. Des sources gouvernementales algériennes vont même jusqu'à dire que «Bouteflika a décidé de faire de la réussite de ce sommet une des priorités de son second mandat, au même titre que son plan portant réconciliation nationale et amnistie générale, mais aussi réformes financières et économiques». Une sorte de bras de fer feutré oppose ainsi les présidents algérien et égyptien au moment où ce dernier s'apprête à défendre son cinquième mandat, au mois d'octobre prochain, face à un adversaire pour le moins inattendu. Il ne s'agit rien moins, si l'on en croit un site Internet entré récemment en campagne, que de l'actuel secrétaire général de la Ligue arabe, Amr Moussa. Une pareille manoeuvre souffre plusieurs lectures puisqu'elle peut aussi bien vouloir dire que M.Moussa tente de se ménager un nouveau poste une fois qu'il sera évincé de celui qu'il occupe présentement, ou qu'il pourrait s'agir d'une simple diversion de la part de la diplomatie égyptienne puisque chacun sait que cet homme a toujours été très proche de Hosni Moubarak. Belkhadem, qui n'en démord pas, annonce clairement qu'il compte commencer à envoyer des émissaires, dès les prochains jours, vers l'ensemble des royaumes et républiques dans le but d'en inviter les présidents et les souverains. La diplomatie algérienne, qui a déjà prouvé à quel point elle pouvait se montrer efficace, a toutes les chances de faire mouche cette fois encore. Tous les ingrédients sont en effet réunis pour que les réformes proposées par Alger soient menées à bon port. Il y va tout simplement du devenir même de la Ligue arabe. Ne pas comprendre cela, ou refuser les thèses d'Alger, reviendrait simplement à se faire hara-kiri dans un monde impitoyable en train de se refaire, avec ou sans nous.