Alger suscite plus d'inquiétude quant au non respect des délais de réalisation du quota qui lui a été alloué. Le projet ambitieux de réalisation d'un million de logements d'ici 2009 initié par le président de la République ne semble pas atteindre sa vitesse de croisière. Selon les experts de ce secteur, le défi reste difficile à relever du fait que la réalité du terrain est tout autre. Interrogé sur les ondes de la radio Chaîne III, un promoteur de l'entreprise algérienne Cosider estime que le retard accusé dans la réalisation de ce projet est imputé en premier lieu au problème de la maîtrise d'ouvrage par les entreprises réalisatrices. Souvent les entreprises maîtres d'ouvrages sous-estiment le projet en lui consacrant peu de moyens matériels et humains. Une fois dans le bain, des difficultés d'ordre technique et financier commencent à surgir. Ce responsable ne manque pas également de soulever le problème des perturbations cycliques que connaît le marché algérien des matériaux de construction. Cette entrave qui en fait dépasse les capacités de l'entreprise réalisatrice perturbe énormément la cadence de travail. Ce promoteur évoque la dernière pénurie de sable qui peut compromettre des chantiers entiers. C'est en effet le cas de l'entreprise chinoise Csces laquelle se charge de la réalisation de plusieurs projets, notamment ceux de l'Aadl. Son chef de chantier conteste le manque d'approvisionnement notamment en matière de sable et de gravier. Les Chinois pourtant réputés pour leur rigueur et leur rapidité n'arrivent toujours pas à maintenir le rythme voulu et accusent eux aussi un retard dans les réalisations des projets dont ils ont la charge. Outre ce problème, les entreprises étrangères qui ont été retenues après sélection pour la réalisation de différents ouvrages n'arrivent pas à renforcer leurs équipes du fait des entraves rencontrées lors de la délivrance du visa de travail. «Il faut attendre 6 mois pour avoir ce laisser-passer», s'insurge un Chinois. Le constat est le même pour toutes les entreprises réalisatrices. Un haut responsable de Cosider, M.Ali Bourahal, relève que l'environnement n'est pas propice pour la réalisation d'un million de logements «du moins pour l'heure», dit-il. En fait, initier ce genre de projet jamais réalisé auparavant, demande des réflexions et des études approfondies, lesquelles aideront à préparer le «terrain» aux entreprises chargées de la réalisation. C'est l'avis en tout cas de la présidente de l'ordre des architectes, Mme Bouhired, qui estime que l'Etat travaille dans la précipitation et a tendance de négliger l'étude préliminaire du projet qui traite de la gestion financière et technique du projet. L'architecte ne cache pas son inquiétude quant à l'état d'avancement des chantiers d'Alger qui, selon elle, n'avancent pas. Elle conteste, par ailleurs, le manque d'intérêt des pouvoirs publics envers le dossier qu'avait préparé l'Ordre des architectes concernant le projet d'un million de logements. «Ce projet comporte des solutions pour rattraper le retard accusé dans le réalisation et évite à l'Etat de perdre davantage d'argent», ajoute-t-elle. Concernant la question des pertes financières en cas de retard dans les délais, le président du réseau national des Opgi explique que l'entreprise qui a été sélectionnée est, en cas de non-respect des délais de réalisation, appelée à payer des pénalités et donc il n'y a aucune répercussion sur le coût du projet. Toutefois si le contrat avec l'entreprise est finalement résilié, les pouvoirs publics perdent dans l'affaire et le projet coûtera plus cher. «il faut savoir que le délai de passation des tâches est de 410 jours, ce qui rend le coût du projet plus cher», explique le président. Pour Mohamed Selkine, P-DG des Eplf, les pouvoirs publics doivent impérativement déterminer les missions de chaque intervenant afin de pouvoir situer les responsabilités et ce, dans un cadre réglementaire. «Des lois sur la maîtrise d'ouvrage doivent être élaborées puis appliquées car il y a confusion au niveau de la conceptualisation», insiste ce responsable. Evoquant le problème de la disponibilité des matériaux de construction, l'intervenant esti-me que la demande dépasse l'offre du fait des différents chantiers qui ont été entrepris notamment dans les secteurs de l'habitat, des travaux publics, de l'hydraulique... Ce qui n'est pas de l'avis du directeur des matériaux de construction au sein du ministère de l'Industrie. Ce dernier estime que la production a été augmentée ces dernières années, notamment en ce qui concerne le ciment qui a atteint plus 11 millions de tonnes et les produits rouges qui sont en nette évolution. Le problème selon lui se situe au niveau de la gestion et du management. Il est certain que tous ces intervenants s'accordent à dire que le manque de maturation des études, la mauvaise gestion, la non-maîtrise des ouvrages, sont autant de facteurs qui font de ce projet un projet éphémère. Peut-on encore croire au miracle? il faut attendre 2009 pour pouvoir se prononcer.