Plusieurs personnalités de renom qui ont consacré une bonne partie de leur vie active à la politique se retirent progressivement pour rejoindre le monde des acteurs non gouvernementaux, à l'exemple de Bill Clinton, Madeleine Albright, Jimmy Carter, Henri Kssinger, Jean-Pierre Raffarin, Tony Blair, David Cameron, pour ne citer que quelques-uns d'entre eux. Ils quittent le champ politique, sous couvert de la transition générationnelle, pour créer une organisation non gouvernementale destinée à la résolution des conflits dans le monde. Il n'y a rien de surprenant à tout ceci. En effet, de nouveaux acteurs entrent sur la scène des relations internationales; ils sont principalement non étatiques. Ils influent, orientent et font la décision à l'échelle mondiale. Quelle que soit leur dénomination, NGO (Non Government Organization), NGI (Non Government Individual), Think Tank, entreprises, ce sont tout simplement de puissants réseaux d'influence de la société civile bien structurés et interconnectés. Ils tracent les contours de la cartographie du monde globalisé avec ses certitudes et incertitudes. La fin de la Guerre froide matérialisée par la chute du mur de Berlin a laissé place à une tectonique des plaques dont les répercussions n'ont pas encore atteint leur paroxysme. Un Moyen-Orient, voire un monde arabo-musulman en pleine ébullition, des puissances émergentes en Asie, le retranchement de l'Eurasie et les divisions transatlantiques figurent parmi les problèmes récemment apparus. C'est vraisemblablement la magnitude et la vitesse du changement induit par un monde en mutation qui constitueront les traits dominants de l'après-l'an 2021. Le paysage mondial post-2021 se structurera incontestablement avec ses certitudes relatives et ses incertitudes sous l'influence pressante des acteurs non étatiques. Selon divers rapports, sous forme de production intellectuellle, de ces mêmes acteurs, les éléments de certitudes et d'incertitudes se résument comme suit: Les certitudes relatives -Globalisation irréversible, pour un monde probablement moins occidentalisé.. -Un pouvoir grandissant des acteurs non étatiques dénommés «élite mondiale».. -Un nombre croissant dd'entreprises de taille mondiale facilite la propagation des nouvelles technologies. -La montée de certains pays asiatiques et ll'avènement de nouveaux poids moyens de l'économie. -Des populations vieillissantes au sein de puissances établies.. -LL'Islamisme (Islam politique) demeure une force. -Capacités accrues des armes de destruction massives (Cbrn) de certains acteurs.. -Un arc dd'instabilité qui englobe le Moyen-Orient, l'Asie et l'Afrique. -Des questions environnementales et éthiques mises encore plus en avant.. -Faible probabilité de voir un conflit entre puissances majeures dégénérer en guerre globale.. -Les Etats-Unis d'Amérique continueront à utiliser les trois formes de pouvoir (Hard Power, Soft Power et Smart Power) pour tenter de rester l'acteur le plus puissant sur les plans économique, technologique et militaire. Les incertitudes majeures -La globalisation aura-t-elle la capacité de tirer les économies en retard de développement?? -La volonté et la faculté d'adaptation des Etats et des institutions internationales aux acteurs non étatiques. -Les pays asiatiques arriveront-ils à imposer de nouvelles règles du jeu? -L'écart entre nantis et laissés-pour compte risque-t-il de se creuser un peu plus? -La portée du défi de la connectivité pour les gouvernements.. -La montée de la Chine et de l'Inde se fera-t-elle en douceur? -L'Union européenne (UE) deviendra-t-elle une supra-puissance? -La gestion et la maîtrise des crises financières récurrentes.. -La gestion et la maîtrise des crises sanitaires cycliques.. -L'instabilité politique dans les pays producteurs de matières premières; la perturbation des approvisionnements. -L'impact des obédiences religieuses sur l'unité des Etats et leur conflictualité potentielle; la montée grandissante de l'idéologie «Extrémisme violent». -Les puissances nucléaires seront-elles moins ou plus nombreuses? -La faculté des terroristes de tout bord à acquérir des armes de destruction massive (Cbrn).. -Les événements accélérateurs conduisant au renversement de certains régimes.. -La faculté de gérer les conflits dits de faible intensité et la compétition face aux ressources naturelles.. -La capacité des nouvelles technologies à résoudre des dilemmes éthiques.. L'influence est par essence politique. Toutefois, la globalisation des échanges a créé une interaction croissante entre politique et économie. Les stratégies d'influence se développeront en parallèle. Au regard de divers observateurs, l'Etat-nation continuera d'être la cellule dominante de l'ordre mondial. Cependant, la globalisation, la diffusion des technologies de l'information et le jeu d'influence des nouveaux acteurs non étatiques soumettront les gouvernements à de rudes épreuves, voire de nouvelles tensions denses. Une connectivite en développement exponentiel s'accompagnera d'une prolifération de communautés virtuelles d'intérêts, de nature à compliquer l'aptitude des Etats à gouverner. Internet, en particulier, continuera à orienter la création de mouvements encore plus globalisés qui pourraient émerger comme une force puissante sur la nouvelle scène internationale. Réseaux interconnectés Comme le propre d'une stratégie planétaire c'est de reposer sur un arsenal diversifié de moyens; aux grands réseaux d'influence (B'naï Brith, Réseaux Rhodes, Council on Foreign Relations, Conférence de Biderberg, World Economic Forum, Trilatérale, Aipac, etc), on doit ajouter celui des think tanks (London School of économics, institut italien des affaires étrangères, Ucla for Middle East Development, Aspen Institute, Irex, Institut atlantique, Pilgrim's Society, European rond table of industrialists, PCP, etc), Fmwg, Wmdfz, Acwg, etc.) des entreprises industrielles et commerciales de renommées mondiales, des banques, des cabinets de conseils et d'audit qui pénètrent les entreprises lors de leurs interventions, des organisations à but éthique (Transparency international, Trace, etc.), des organisations humanitaires et de défense des droits de l'homme (Human Right Watch, MSF, etc). Tous ces groupes sont organisés en clubs fermés et opèrent en réseaux interconnectés même si leurs activités sont d'apparence cloisonnées. Les organisations caritatives et les sectes religieuses, quant à elles, agissent en «cheval de Troie». Le propre d'une opération d'influence est de déployer à moyen et long terme des réseaux humains d'appui discret afin de mieux se faire accepter que les autres concurrents (entreprises ou Etats). Les membres de ces réseaux qui, au titre de relais utiles, oeuvrent au profit d'acteurs extérieurs. Une opération d'influence peut être ouverte, secrète ou combinée. Les NGOs et/ou NGIs, leviers d'influence, sont à l'origine de la diplomatie parallèle qui parfois complète ou se substitue à la diplomatie institutionnelle traditionnelle. De plus en plus les gouvernants politiques utilisent ce type de diplomatie impliquant les acteurs de la société civile et des leaders d'opinion (Key Opinion Person -KOP-), pour mener leurs actions de politique étrangère et d'influence. Dans ce cadre, on distingue par exemple, depuis quelques années, l'émergence de la diplomatie économique (Trade Diplomacy) et de la diplomatie scientifique (Science Diplomacy) qui se sont renforcées avec l'apparition du Covid-19 par la diplomatie sanitaire (Sanitary Diplomacy). L'ordre international est en transition subissant de profonds changements. A aucun moment depuis la formation du système de l'alliance occidentale, en 1949, la nature et la forme des systèmes de l'alliance à l'échelle internationale n'ont connu de mutations comparables à celle de la dernière décennie. En conséquence, le monde de l'après-2021 différera de façon notable du monde de 2001 (année symbole). Toutes les enquêtes et études faites ici et là par les acteurs non étatiques permettent d'affirmer que le rôle des Etats- Unis d'Amérique, d'une part, et de la Chine, d'autre part, représenterait des variables importantes dans la forme que revêtira le monde futur. En effet, ils influenceront les acteurs étatiques et non étatiques dans le choix du chemin que ceux-ci décideront de suivre. De plus, les instances internationales, les grands groupes industriels et commerciaux internationaux, les NGOs et NGIs et d'autres seront susceptibles de promouvoir les tendances. Montée d'un islamisme radical À partir de l'an 2021, incontestablement, sous l'influence de ces acteurs non étatiques, la cartographie du monde sera différente. Les groupes géographiques traditionnels perdront progressivement de leurs poids dans les relations internationales. Depuis la chute du mur de Berlin, tout comme la division Est/Ouest, la ligne de partage traditionnelle Nord-Sud ne sera plus un concept très représentatif pour le futur monde. Le concept Eurasie destiné à supplanter l'ancienne Union soviétique et l'unité de l'Ouest ont également perdu de leur pertinence. Ce sera surtout dû à la mondialisation et à la montée en puissance attendue de la Chine et à un moindre degré de l'Inde. D'autres divisions au-delà du champ économique risquent de modeler la vision du monde. Pour beaucoup de sociétés, les scissions entre groupes religieux, ethniques et tribaux au sein même de ces groupes, pourraient tracer des frontières aussi marquantes que les frontières nationales. Toutefois, le concept actuel qui risque de conserver sa pertinence est l'arc d'instabilité ancré en Asie du Sud-Est où l'on assiste à la montée d'un islamisme radical et du terrorisme, ralentie présentement par la pandémie du Covid-19, et qui se prolonge vers l'Asie centrale. Cet arc inclut plusieurs pays d'Afrique et du Moyen-Orient. La globalisation aura remplacé, principalement, l'ancienne ligne de partage qui traversait l'Occident industrialisé, l'Est communiste, les pays non alignés, en voie de développement, ou le tiers-monde. Sous l'influence des acteurs non étatiques, nous assisteront à de nouveaux alignements regroupant ces pays, ou même des parties de pays qui sont en train d'intégrer la communauté mondiale. En revanche, d'autres nations, pour des raisons économiques, politiques ou sociales ne réussiront certainement pas cette intégration. *Docteur Arslan Chikhaoui est, actuellement, Président exécutif du Centre de consultance et d'etudes ‘NSV'. Il est membre, du Conseil consultatif d'experts du Forum économique mondial (WEF-Davos), du Conseil consultatif du Forum défense et sécurité (DSF-Londres), et du Forum civil des Nations unies (UNSCR 1540). Il est Alumni du Centre NESA pour les études stratégiques (NDU-Washington DC). Il est, également, partie prenante dans divers groupes de travail ‘Track II': Nouveau partenariat pour le développement de l'Afrique (Nepad), Sécurité dans la région méditerranéenne, Afrique du Nord et Sahel, Non-Prolifération des armes de destruction massive dans la région Mena, Rss en Afrique du Nord.