La date du lancement officiel du projet varie selon l'interlocuteur que nous sollicitons. Les Tunisiens sont fiers de ce projet et ils y croient profondément. Les officiels algériens aussi, et les citoyens à un degré moindre. La nouvelle ville de Boughzoul, qui couvre une superficie de 4650 ha, sera prête à accueillir ces 350.000 habitants en 2025. «Les Chinois ont construit une ville en 3 ans, je pense que le délai fixé par le gouvernement algérien est raisonnable, pour peu que les enveloppes financières suivent», affirme M.Mazi, représentant du ministère de l'Environnement et de l'Aménagement du territoire. Les Algériens auront besoin de 20 ans supplémentaires pour concrétiser un tel projet. Et sur ce plan, rien n'est gagné d'avance, loin s'en faut. La seule certitude est venue de la délégation d'experts tunisiens venus visiter le site. Interpellés par le ministre M.Chérif Rahmani, ces derniers ont rassuré l'assistance «que le projet a toutes les garanties pour se concrétiser». «En Tunisie, plusieurs problèmes sont venus entraver la construction de ces sites, comme la pollution et le foncier», affirme un expert tunisien. Deux problèmes majeurs que la ville de Boughzoul ne connaît pas. Et pourtant la mission, même si elle n'est pas impossible, est loin d'être facile. Un accord de partenariat sera signé incessamment avec la Tunisie, pour, affirme le ministre «bénéficier de l'expérience de ce pays dans le domaine des villes-lacs». Mais que vont nous apporter les Tunisiens? «On va importer leurs problèmes dans ce domaine», ironise un confrère. Annoncée en grande pompe dans les années 70, puis déterrée en 2003, la ville qui se situe à 35 km du chef-lieu de la wilaya de Medéa, aura pour principales vocations le tertiaire supérieur, les technologies avancées, la recherche scientifique ainsi que les autres fonctions de soutien y afférentes. Mais pour le moment, les choses semblent être au stade de départ. Le site est habité par une poignée de gens, installés dans ce coin depuis plusieurs années. Leur village sera déplacé pour les besoins du projet. L'étude a été faite par un bureau d'études portugais. Rahmani a insisté sur l'effort à faire afin de ne pas déraciner la population, et pour qu'elle garde les mêmes activités. Théoriquement parlant, le plan d'aménagement de la ville est prêt. C'est du moins, ce que nous avons appris par la voix d'un responsable du ministère de tutelle. A notre grande surprise, nous avons eu droit à une autre version quelques minutes plus tard. S'adressant au ministre, un autre responsable explique que «les plans d'aménagement sont encore au stade de l'étude». Il reconnaît que, sur ce plan, un grand défi est pris par les Algériens. Nous n'avons pas été mieux renseignés sur la date de lancement officiel du projet qui varie selon l'interlocuteur que nous sollicitons. M.Ben Daoud, chef de projet, nous assure que cela va se faire au début de l'année prochaine. M.Mazi, quant à lui se montre très réticent. «Il faut attendre que le projet passe en conseil de gouvernement», assure-t-il. La première priorité arrêtée par les autorités est d'assurer une source durable d'alimentation en eau pour les futurs habitants. Et sur ce point, il faut dire que la ville est gâtée par la nature, parce qu'elle sera construite autour d'un superbe lac. Le responsable de l'Agence nationale des ressources hydriques nous a fait part de plusieurs projets d'appoint, les plus importants ont trait aux énormes quantités d'eau qui seront transférées du barrage de Koudiet Acerdoun vers Boughzoul, la construction de deux réservoirs, et l'augmentation de la capacité du barrage de la ville qui n'a pas connu d'opération de dépollution depuis sa construction en 1937. En attendant que les humains mettent les pieds dans cette ville, une vingtaine d'espèces végétales sont plantées à titre d'expérimentation. L'on cite : pin-pignon, salutas, numulcaria, etc. Le même intérêt est donné aux énergies renouvelables. «Les villes nouvelles doivent être leaders dans l'utilisation des nouvelles technologies», atteste M.Rahmani. Pour les amateurs de golf, trois terrains sont prévus dans le schéma de la ville. Des logements, un pôle universitaire, une zone industrielle sont également au programme. Combien coûtera cette ville? Impossible d'avancer un chiffre. Une enveloppe de 29 milliards de dinars a été dégagée par le gouvernement dans le cadre du programme de développement des Hauts-Plateaux. Les experts croisent les doigts pour que le prix du baril reste au même niveau, dans le cas contraire, ce projet risque fort d'être encore une fois remis en cause.