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«Le président Macron poursuivra la réconciliation des mémoires»
Ronald Lescure, porte-parole d'Emmanuel Macron, à L'Expression
Publié dans L'Expression le 17 - 04 - 2022

La place des relations algéro-françaises est essentielle, lors de toutes les élections présidentielles en France. Il n'est pas un candidat à l'Elysée qui passerait dessus. Dans la perspective du second tour du scrutin, prévu le 24 avril prochain, les deux candidats qui s'affrontent ont, quant à eux, ouvertement évoqué le partenariat avec Alger. Marine Le Pen, dont l'histoire familiale ne fait pas de doute sur ses intentions hostiles, a déjà annoncé la couleur en visitant l'association des disparus français de la guerre d'indépendance. Emmanuel Macron, compte quant à lui, une longue série de gestes d'apaisement mémoriel. Il a également affiché, plus que tous ses prédécesseurs une volonté de construire un futur algéro-français serein. La récente visite de son ministre des Affaires étrangères, Jean-Yves Le Drian, à Alger témoigne de cette volonté. Ainsi ces deux approches totalement contradictoires des relations de la France avec l'Algérie vont croiser le fer dans un débat très attendu par les opinions publiques des deux côtés de la Méditerranée. Dans l'entretien qu'il nous a accordé, Ronald Lescure, porte-parole d'Emmanuel Macron, nous révèle les enjeux du face- à- face Macron-Le Pen et annonce les intentions du président sortant...
L'Expression: Emmanuel Macron est arrivé en tête du premier tour de l'élection présidentielle. Pourtant, cette première victoire a comme un goût amer. La présence de la représentante de l'extrême droite au second tour, n'est-il pas un signe d'un malaise profond au sein de la société?
Ronald Lescure: Lors de ce premier tour de l'élection présidentielle, plus de 36 millions d'électeurs ont fait valoir leur droit de vote. Nous y voyons un motif d'espoir pour la vitalité démocratique en France, malgré les crises que notre pays et l'Europe ont traversé entre la pandémie et la guerre en Ukraine. 9,7 millions d'électeurs ont apporté leur soutien à Emmanuel Macron, soit davantage qu'en 2017. C'est une marque de confiance et de reconnaissance du travail accompli au cours des cinq dernières années, en faveur du plein emploi, du pouvoir d'achat, et pour l'indépendance de la France dans une Europe forte. Nombre de nos compatriotes se sont néanmoins tournés vers l'abstention ou le vote extrême. Parce qu'ils sont en colère face aux inégalités qui perdurent, aux désordres écologiques, à l'insécurité du quotidien, à la difficulté de vivre dignement. Emmanuel Macron n'aura qu'un objectif: les convaincre dans les jours à venir que notre projet, fidèle à l'humanisme et à l'esprit des Lumières, répond bien plus solidement que celui de l'extrême droite à leurs peurs et aux défis du temps. Nous portons un projet de progrès, pour tous.
Un pan entier de la société française est abasourdi par la réédition du face- à face- de 2017. Quel enseignement en tirez-vous à La République en marche?
Face au défi posé par l'extrême droite, l'unité de la France est essentielle. Une unité forte de nos différences, de nos singularités, assumant notre histoire à travers tous les continents et embrassant toutes nos diasporas. Le programme de Marine Le Pen - qui veut notamment légaliser les discriminations en inscrivant dans la Constitution la «préférence nationale» et faire des économies au détriment des Français les plus précaires - est opposée en tous points à notre vision de la société française. Emmanuel Macron a eu des mots forts lors de son rassemblement à Paris: la France, est un bloc fait de toutes ses différences. En France, on ne trie pas, on ne choisit pas entre ses citoyens. C'est ce combat pour la fraternité que nous mènerons jusqu'au 24 avril, et au-delà.
Sur quels thèmes Emmanuel Macron axera-t-il sa campagne du deuxième tour?
Emmanuel Macron porte un projet de progrès social, d'ouverture et de solidarité. Le premier des combats, c'est celui contre les inégalités qu'il faut corriger à la racine pour permettre l'égalité des chances. Nous ne nous résoudrons jamais à voir des quartiers entiers de notre République être stigmatisés. C'est le sens de l'engagement par exemple d'Emmanuel Macron pour «Marseille en Grand» qui est une révolution en faveur de la rénovation urbaine, de l'école, du sport et de la culture. Nous allons amplifier cette dynamique en doublant le budget de la rénovation urbaine, en ouvrant 300 cités éducatives, en formant à l'emploi. C'est aussi le sens de la vision apaisée de la laïcité que nous portons, qui doit permettre à chacun de croire ou de ne pas croire et d'exercer librement son culte.
Le deuxième des combats d'Emmanuel Macron, c'est celui pour le plein emploi et le pouvoir d'achat. Parce que le chômage de masse est la première des injustices qui touche d'abord nos compatriotes les plus modestes et ceux issus de l'immigration. En cinq ans, 1 million d'emplois ont été créés, et le taux de chômage a baissé de manière historique. Pour la première fois en 40 ans, nous pouvons aller vers le plein emploi, par l'investissement et la formation des demandeurs d'emploi. En parallèle, nous allons revaloriser les métiers insuffisamment considérés, notamment dans la santé et le médico-social. Nous allons enfin continuer à soutenir les revenus des plus modestes comme nous l'avons fait en supprimant la taxe d'habitation, en baissant l'impôt sur le revenu et en revalorisant la prime d'activité. Le troisième des combats, c'est celui pour la jeunesse et l'éducation. Il a été mené sans relâche depuis 5 ans, pour limiter à 12 le nombre d'élèves par classe dans les quartiers populaires, pour investir massivement sur la formation professionnelle, et pour garder l'école ouverte pendant la pandémie. Mais l'ascenseur social reste encore trop souvent bloqué. S'il est réélu, Emmanuel Macron s'engagera à mieux rémunérer nos enseignants, à renforcer l'enseignement des savoirs fondamentaux et à généraliser le sport à l'école. Si les Français nous font confiance, nous lancerons rapidement deux chantiers prioritaires: celui de l'école et celui de la santé.
Les relations franco-algériennes, le dossier mémoriel et l'Histoire partagée, sont des sujets évoqués par les différents candidats. Ce dossier ne devrait pas être affranchi de toute pesanteur politique afin qu'elle redevienne une passerelle entre les deux pays et non un prétexte pour des crises entre les deux gouvernements?
Ce qu'a entrepris le président Macron depuis 5 ans est tout l'inverse d'une instrumentalisation politique de la mémoire. C'est une démarche sincère de réconciliation des mémoires. Contrairement à Marine Le Pen, attiser les plaies du passé n'est pas un fonds de commerce électoraliste pour le président. Emmanuel Macron s'est toujours montré à la hauteur de son rôle d'homme d'Etat; aucun président n'a autant fait sur la voie de l'apaisement des mémoires, mais aussi pour accompagner toujours davantage le passage de la mémoire à l'Histoire, c'est-à-dire pour permettre aux historiens d'approfondir un travail de vérité permettant à notre génération et aux futures de regarder ensemble notre histoire commune. Le président a ainsi, facilité l'accès aux archives sur la guerre d'Algérie. En juillet 2020, il a confié à l'historien Benjamin Stora la rédaction d'un rapport sur les questions mémorielles sur la colonisation et la guerre d'Algérie. Remis en janvier 2021, le rapport énonce des préconisations pour avancer sur un chemin de reconnaissance de toutes les mémoires. Avant même la remise du rapport, le président a effectué des gestes mémoriels importants, je pense à la remise à l'Algérie des restes mortuaires de combattants algériens, en juillet 2020. Il a poursuivi ensuite avec des gestes qui répondaient à des décennies d'attente et de lutte pour leur reconnaissance.
Dans le cas où il sera réélu pour un second mandat, le président Macron prendra-t-il encore d'autres initiatives dans le dossier de la mémoire entre l'Algérie et la France?
Comme il a eu l'occasion de le dire à l'occasion de la commémoration des 60 ans de la signature des accords d'Evian, le président Macron est déterminé à poursuivre le travail de réconciliation des mémoires. Ce travail concerne toute la société française, et notamment notre jeunesse, qui voit cohabiter en son sein différentes visions, parfois opposées, du passé algérien de la France et de nos relations. Il est aussi important de souligner que la relation entre la France et l'Algérie ne se réduit pas à la question mémorielle. La relation franco-algérienne, les liens avec le grand peuple d'Algérie s'écrit au présent et au futur et ne doit pas seulement s'ancrer dans le passé. Si les Français font à nouveau confiance au président Macron pour un second mandat, celui-ci aura à coeur de lancer des initiatives dans tous les domaines de notre relation bilatérale, je pense notamment à l'économie et à la formation, mais aussi à la sécurité régionale. C'est, je crois, ce que nos peuples attendent de nous: que nous parvenions à dépasser les querelles du passé pour construire un avenir plus prospère.
Comment voyez-vous la suite des relations politiques entre la France et l'Algérie? L'entente qui existe entre le président Macron et son homologue Tebboune peut-elle constituer un catalyseur pour dépasser plusieurs blocages qui plombent les relations?
La relation personnelle entre les deux chefs d'Etat est essentielle et s'est renforcée au fil du temps. Les contacts réguliers et de confiance du président de la République avec le président Tebboune permettent d'avancer et d'aborder franchement toutes les questions dans le respect de la souveraineté des deux pays. Le dialogue est le socle d'une relation équilibrée, respectueuse. Nous avons de nombreux intérêts communs qui sont plus forts que nos différends ponctuels, notamment autour de la jeunesse, de l'économie et des questions régionales. La relation entre la France et l'Algérie se décline à tous les niveaux, celui des Etats, mais aussi celui de nombreuses collectivités françaises et algériennes ou d'associations. Il faut aussi rappeler le rôle des individus de part et d'autre de la Méditerranée unis par des projets et des intérêts communs et parfois des liens familiaux. Les entreprises et les structures économiques ont aussi un rôle important à jouer. C'est une relation dense, riche, intime et une relation d'avenir pour nos deux pays!


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