Le locataire de l'Elysée dit vouloir suivre les traces du président Jacques Chirac qui avait reconnu la responsabilité de la France dans la déportation des juifs pendant la Seconde Guerre mondiale. Levée de boucliers à droite et à l'extrême droite en France à la suite de nouvelles déclarations d'Emmanuel Macron sur la guerre d'indépendance de l'Algérie. À son retour, il y a deux jours, de Jérusalem où il a pris part à la commémoration de la libération du camp d'Auschwitz, le président français a accordé, dans l'avion présidentiel, une interview au quotidien Le Figaro, où il a exprimé son désir de régler la question mémorielle concernant la présence coloniale française en l'Algérie. Même s'il a reconnu ne pas avoir actuellement de réponse au "conflit de mémoire" entre la France et l'Algérie, Macron souhaite y parvenir en conférant au sujet à "peu près le même statut que la Shoah pour Chirac en 1995". Jacques Chirac avait notamment reconnu la responsabilité de l'Etat français dans la déportation des juifs français pendant la Seconde Guerre mondiale, dans ce qui est communément appelé "La rafle du Vel'd'Hiv". Dans son interview au Figaro, le président français est revenu sur cette déclaration en indiquant qu'il avait "crispé des gens", mais qu'il "les avait ramenés dans une capacité de dialoguer." "Je suis très lucide sur les défis que j'ai devant moi d'un point de vue mémoriel et qui sont politiques. La guerre d'Algérie, sans doute, est le plus dramatique d'entre eux. (…) Je le sais depuis ma campagne", a encore souligné Emmanuel Macron. Selon lui, le sujet reste, toutefois, encore tabou. "On n'en a pas parlé, on a écrasé (…) Il n'y a pas eu un travail politique mémoriel (…) On a jamais fait ce travail, aussi, parce que le problème, c'est que la contrepartie n'est pas là", a-t-il expliqué sans préciser de quelle "contrepartie" il s'agit. Pour Macron, la reconnaissance des crimes coloniaux de la France en Algérie est entravée par un certain nombre d'obstacles. "Il y a une histoire officielle de la relation à l'Algérie. Il y a une histoire d'Etat (…) C'est une histoire très particulière, d'ailleurs, qui a toujours été au cœur d'une histoire militaire héroïque. C'est ensuite un dialogue très particulier avec l'Algérie (…) Et, ensuite, c'est un traumatisme dans l'histoire d'Etat. Je veux dire : la guerre d'Algérie, c'est ce qui fait la Ve république. Et donc c'est, dans la vie institutionnelle, politique, militaire française, quelque chose qui pèse", a affirmé le chef de l'Etat français. Sur Twitter, des élus du parti des Républicains se sont offusqués du rapprochement fait par Macron. "C'est de l'indécence. Après avoir qualifié la colonisation de crime contre l'humanité. Il fait l'amalgame entre la guerre d'Algérie et le pire génocide de l'histoire de l'humanité", a dénoncé le sénateur, Bruno Retailleau. De son côté, la présidente du Rassemblement national, Marine Le Pen, a estimé qu'Emmanuel Macron "est en pleine dérive". "Comparer la guerre d'Algérie à la Shoah est obscène", a-t-elle asséné. Plusieurs sites de la fachosphère se sont également déchaînés. Dans les colonnes du Figaro, Jean Sevillia, essayiste proche des milieux identitaires, a déclaré que la comparaison entre la Shoah et la guerre d'Algérie "est de la folie sur tous les plans." De son côté, l'historien Benjamin Stora, interviewé par le journal Le Parisien, a reconnu l'engagement de Macron pour "la réconciliation des mémoires". "Il est le premier (président français, ndlr) à aborder le sujet globalement en traitant de la question coloniale", comme il l'a fait dans l'affaire Audin. Benjamin Stora a également rappelé les propos tenus par Macron en Algérie, en 2017, peu avant son élection, lorsqu'il avait qualifié la colonisation de crime contre l'humanité.