Le ton est monté d'un cran entre Alger et Bamako. Excédée par les violations répétées de son espace aérien et les accusations «mensongères et hostiles» émanant des autorités maliennes, l'Algérie a pris une décision sans appel. Le ministère de la Défense nationale a annoncé, hier, la fermeture immédiate de son ciel aux vols maliens. «Face aux violations répétées par l'Etat du Mali de notre espace aérien, le gouvernement algérien a décidé la fermeture de ce dernier à la navigation aérienne en provenance ou à destination de l'Etat du Mali, et ce, à partir d'aujourd'hui 07 avril 2025» indique le communiqué du MDN. Cette mesure ferme intervient dans un contexte de tension croissante au Sahel, où l'Algérie dénonce les dérives d'une junte malienne qualifiée de «clique inconstitutionnelle» et de «putschiste». Deux antécédents Dans un communiqué sévère, diffusé plus tôt dans la journée, le ministère des Affaires étrangères a exprimé sa «grande consternation» face aux propos tenus par les autorités de transition maliennes et la Confédération des Etats du Sahel (CES), qu'il accuse de propager de «grossiers mensonges». Alger rejette en bloc les accusations du gouvernement malien, qui tente, selon elle, de masquer ses propres échecs en matière de gouvernance et de sécurité. «L'Algérie refuse d'être prise pour bouc émissaire par une junte dont les échecs sont patents sur tous les plans - politique, économique et sécuritaire», indique le communiqué, ajoutant que cette dérive vise à détourner l'attention du peuple malien, «qui en paie le prix fort». «Par son communiqué, le gouvernement de la transition au Mali porte de graves accusations contre l'Algérie. En dépit de leur gravité, toutes ces allégations mensongères ne dissimulent que très imparfaitement la recherche d'exutoires et de dérivatifs à l'échec manifeste de ce qui demeure un projet putschiste, qui a enfermé le Mali dans une spirale de l'insécurité, de l'instabilité, de la désolation et du dénuement», précise le texte. La diplomatie algérienne rejette également, avec fermeté les allégations selon lesquelles l'Algérie entretiendrait des liens avec des groupes terroristes. «La collusion que le gouvernement malien établit avec une extrême légèreté entre l'Algérie et le terrorisme manque tellement de sérieux qu'il serait superflu d'y répondre», martèle-t-elle, rappelant l'engagement constant et reconnu de l'Algérie dans la lutte contre le terrorisme. À ce titre, Alger critique avec sévérité le recours du Mali à des mercenaires étrangers. «La première menace et la plus déterminante sans doute qui pèse sur le Mali aujourd'hui réside dans l'incapacité des putschistes à assumer la lutte anti-terroriste réelle et effective, au point d'en confier la gestion au mercenariat dont l'Afrique a tellement pâti dans son histoire récente», soutient la même source. Un ton ferme qui marque une rupture nette dans des relations déjà fragilisées. La goutte d'eau? Une série de violations de l'espace aérien algérien par des drones maliens, la dernière en date remontant au 1er avril. Un appareil ayant «pénétré l'espace aérien national à minuit huit minutes sur une distance de 1,6 km». Le drone en question a, «dans un premier temps, violé l'espace aérien national, il s'est ensuite éloigné, avant d'y retourner en prenant une trajectoire offensive», rapporte les AE. Les preuves au niveau du MDN C'est cette «entrée du drone malien dans l'espace aérien algérien, son éloignement, puis son retour offensif sur zone, qui ont entraîné sa qualification de manoeuvres d'hostilité caractérisée». Suite à cette qualification, le «Commandement des Forces de Défense Aérienne de l'Algérie a ordonné sa destruction», précise la même source. Et ce n'était pas un cas isolé: «Deux autres intrusions similaires avaient déjà eu lieu les 27 août et 29 décembre 2024», est-il révélé dans ce communiqué. Les preuves sont là. «Toutes les données se rapportant à cet incident sont disponibles dans la banque de données du Ministère algérien de la Défense nationale», soutient le communiqué. Dans un contexte régional déjà tendu, l'Algérie regrette profondément l'alignement du Niger et du Burkina Faso sur les mensonges éhontés de la junte malienne. «En réaction, l'Algérie a décidé, elle aussi, de rappeler pour consultations ses ambassadeurs au Mali et au Niger, et de différer la prise de fonction de son nouvel ambassadeur au Burkina Faso. Un rejet et une condamnation d'une extrême fermeté qui traduisent une rupture sérieuse des relations bilatérales. Après avoir ouvert grand les bras à ce pays frère et ami, et mis en place une dynamique de dialogue et d'aide pour assurer la stabilité de la région, elle voit encore une fois cette «junte de putschistes» proférer des mensonges et des agressions contre notre pays.