Parcourant le pays par monts et vaux, Krim a été l'une des chevilles ouvrières de l'épopée libératrice. Le lion des djebels revient cette semaine! Krim Belkacem, mieux connu en Kabylie sous le nom de Belkacem EI Hadj Lhocine et comme le plus ancien maquisard et aussi le premier des chefs de la Wilaya III historique, revient cette semaine. Aït Yahia Moussa, sa localité natale, s'apprête à célébrer l'homme qui, seul, a apposé sa signature sur les accords d'Evian au nom de l'Algérie face à Joxe, Buron et De Broglie pour la partie française. Dans les chaumières, l'on se raconte encore ce trait d'esprit de Krim face à Louis Joxe qui le poussait à signer le document, le chef de l'Etat français, le général de Gaulle, étant pressé de voir se régler ce que l'on appelait alors, côté français, le problème algérien, Krim tergiversait devant des formulations tarabiscotées et répugnait à signer un texte comprenant des formulations qu'il jugeait du moins, lourdes de sens. Devant cette hésitation, Joxe devait lui dire à peu près ceci: «Vous pouvez me croire, ces termes sont bien français, je vous le dis en ma qualité de professeur!» Krim qui s'attendait à une quelconque entourloupe de la part de la délégation française eut alors cette réplique que l'on se raconte toujours dans les chaumières: «Ce que je ne comprends pas, n'est pas français!» Cette saillie révèle, on ne peut mieux, l'esprit de l'homme, maquisard, nationaliste et prudent jusqu'au bout des ongles! Krim n'était pas, à proprement parler, intellectuel même si ceux qui l'avaient approché ont souligné cette faculté de synthèse et cette intelligence fine qui lui ont permis de se tirer d'affaires à maintes reprises devant l'adversité. Krim a eu le privilège de diriger la région, et plus tard au sein du CCE, la révolution à un moment charnière de notre histoire. En tant que chef de la Wilaya III historique, il avait, et c'est l'avis de plusieurs anciens maquisards, donné bien du fil à retordre aux troupes du général Olié et ensuite à celles du général Faure. Aidé de feu le colonel Ouamrane et aussi des politiques tel le grand Abane Ramdane, Krim avait, non seulement organisé la résistance en Wilaya III, mais aidé aussi à la naissance et à la structuration d'autres régions militaires. Parcourant le pays par monts et vaux, Krim a été l'une des chevilles ouvrières de l'épopée libératrice et c'est avec Abane que le lion des djebels, secondé alors par le vaillant Amirouche, que fut préparé le congrès de la Soummam. Auparavant, il devait se consacrer à la structuration de la Zone autonome d'Alger à la tête de laquelle on retrouve bien des héros dont feu Abane Ramdane qui succéda à d'autres révolutionnaires, notamment Ben M'hidi Larbi qui fut, au même titre que Krim et sur un autre plan, le ressort de la révolution en marche. Il est nécessaire de rendre ici un hommage appuyé à tous ces héros, les uns anonymes et les autres mieux connus, pour leur engagement dans le sens de l'honneur! Krim Belkacem qui devait, pour les besoins de la lutte, rejoindre l'extérieur, se retrouva, en compagnie d'autres militants, à la tète du CCE, d'abord puis du CIG, par la suite. Au Gpra, Krim assuma bien des responsabilités, dans le désordre: l'intérieur, la guerre, les affaires extérieures et aussi la vice-présidence du gouvernement. En 1962, et après une guerre de plus de sept ans ayant épuisé le peuple, l'Algérie accéda à la souveraineté nationale. Mais cela ne se fera pas sans une ultime dîme de sang. Les Algériens faisaient face aux exactions des ultras, lesquels regroupés sous l'égide de l'OAS, menaient une guerre sans merci au peuple. Krim, entré en Algérie au printemps 1962, essaya et parvint à faire ramener la paix dans une Algérie exsangue, en prenant la responsabilité de laisser l'Exécutif provisoire sous la houlette de Farès et plus spécialement de Chaouki Mustapha, mener des “négociations avec les représentants de la communauté pied-noire: tel Susini. La paix revenue, il fallait faire face à la fronde de l'état-major et là, les choses bifurquèrent de telle manière que les Algériens allaient en payer le prix fort durant l'été 1962. En compagnie de feu Boudiaf, Krim devait créer un comité pour la défense de la révolution qui est plus connu sous le nom de groupe de Tizi Ouzou. Le groupe de Tizi Ouzou faisait alors face au groupe dit de Tlemcen. La situation tourna de telle façon que Krim, comme d'autres prirent les chemins de l'exil! En 1970, le révolutionnaire a été retrouvé assassiné, apparemment par ses frères de combat, dans un hôtel de Francfort. Aït Yahia Moussa se souvient du héros et le fête, en ce 19 mars, consacrée désormais, fête de la victoire.