Au lieu de faire face à la malnutrition et au travail forcé des enfants, la société algérienne se détourne. Des chiffres et des lettres. Des mots et des maux. 27.421 enfants nés hors mariage sont enregistrés depuis 1999. 14.222 sont recueillis dans le cadre de la kafala en Algérie et 1632 à l'étranger. Tandis que 2946 enfants abandonnés sont repris par leurs mères biologiques. Effarant. C'est l'échelle des valeurs qui en prend un sacré coup. L'enfant souffre toujours en silence. Au lieu de faire face à la malnutrition et au travail forcé des enfants, la société algérienne se détourne. Leur prise en charge révèle des lacunes. L'aveu du ministre de la Solidarité nationale, Djamel Ould Abbès, fait lors d'un Séminaire international ayant pour thème les difficultés de l'enfance, animé, hier, au Centre national de formation des personnels spécialisés, (Cnfps) laisse croire que la société algérienne est insensible à ses propres maux. Au moment où l'on a cru qu'un pas de géant a été effectué, les propos de Ould Abbès tombent comme un cheveu sur la soupe. Le chemin de la repentance est encore aussi long que sinueux. L'enfant, né hors mariage, constitue un poids supplémentaire pour le département de M.Ould Abbès. D'ailleurs, ce séminaire, placé sous le haut patronage du président de la République et auquel participent des experts français, suisses, tunisiens et marocains se veut celui d'une évaluation et réflexion aux fins de songer à mettre fin au calvaire que vit cette frange «agonisante.» Le directeur de Handicap international, a axé son intervention sur les enfants abandonnés par leurs familles et présentant des handicaps. «Cette frange nécessite une prise en charge adéquate», a-t-il reconnu. Car, semble-t-il, en l'absence d'un travail rigoureux, les enveloppes financières dégagées, ne serviront à rien. Le représentant de l'Unicef en Algérie, Raymond Janssens a résumé ce point en déclarant: «Il est temps d'opter pour un système constitutionnel qui protège cet enfant abandonné.» Durant ce séminaire, des chiffres importants ont été avancés par le ministre de la Solidarité. A se fier à ses propos, 27.421 enfants sont nés hors mariage, d'un père inconnu et ce, depuis 1999. Cependant, quelque 14.222 (2116 en 2006) enfants ont été recueillis en kafala en Algérie et 1632 à l'étranger. La kafala est un puissant moyen d'encourager l'accueil des enfants privés de famille surtout depuis l'introduction du complément au décret relatif au changement de nom (n°92-24 du 13 janvier 1992), autorisant la concordance de nom entre le kafil et l'enfant. «Les résultats sont immédiats» poursuit le ministre. Et d'ajouter que 2946 enfants abandonnés ont été repris par leurs mères biologiques. Quel nom de famille sera attribué à cet enfant «illégitime»? Interrogé dans ce contexte, l'orateur a précisé qu'un projet de loi unifié et qui sera prochainement soumis au gouvernement, le premier dans le monde arabe, permettra la reconnaissance de la paternité des enfants nés hors mariage, en recourant aux méthodes modernes dans ce domaine, notamment la reconnaissance par l'analyse de l'ADN. «L'enfant prend le même nom de famille que son père biologique» enchaîne le conférencier. Epouser la femme qui a donné naissance à l'enfant n'est pas une obligation, estime le ministre, «le père doit reconnaître son enfant» poursuit-il. Le débat sur l'enfance est loin de connaître son dénouement en Algérie.