Les autorités kosovares menacent de proclamer unilatéralement l'indépendance. Quatre mois de négociations entre Serbes et Kosovars albanais sur le statut final du Kosovo n'ont pas permis d'aboutir à un accord, constatent les médiateurs internationaux dans leur rapport remis vendredi au secrétaire général de l'ONU, Ban Ki-moon. «Après 120 jours de négociations intensives, les parties ont été incapables de parvenir à un accord sur le statut du Kosovo», indique le rapport de la troïka (Etats-Unis/Russie/UE). «C'est regrettable, étant donné qu'un accord négocié est dans le meilleur intérêt des deux parties», poursuit le texte, ajoutant qu'«aucune partie n'a voulu céder sur la question centrale de la souveraineté». Les Kosovars albanais, majoritaires dans la province serbe, veulent l'indépendance mais se heurtent à la Serbie qui, soutenue par son alliée traditionnelle la Russie, refuse de leur accorder plus qu'une large autonomie. Les autorités kosovares albanaises ont indiqué qu'en cas d'échec des négociations à la date limite du 10 décembre, elles proclameraient unilatéralement l'indépendance du Kosovo, mais qu'elles le feraient en concertation avec les Américains et les Européens. «Nos séances (de négociations) ont été longues et souvent difficiles, avec comme toile de fond un héritage de méfiance mutuelle et de rancoeurs historiques après les conflits des années 1990», déclarent les médiateurs, qui saluent au passage le soutien reçu des six pays membres du Groupe de contact sur le Kosovo (Allemagne, Etats-Unis, France, Grande-Bretagne, Italie, Russie). Ils indiquent que ce groupe avait prié instamment les deux parties d'approcher les négociations «avec créativité et audace et dans un esprit de compromis.» «Malgré nos appels répétés à trouver des idées neuves et à un esprit de compromis, chacun des deux côtés a été incapable de convaincre l'autre d'accepter son scénario préféré», affirment-ils. La troïka indique que Pristina a réitéré sa préférence pour une indépendance du Kosovo sous supervision internationale telle que proposée par le médiateur de l'ONU, Martti Ahtisaari, tandis que Belgrade a rejeté cette proposition et campé sur sa proposition d'une large autonomie du Kosovo mais sous souveraineté serbe. La France estime pour sa part que «la déclaration d'indépendance du Kosovo paraît inéluctable», a déclaré vendredi à Vienne le secrétaire d'Etat français chargé des Affaires européennes, Jean-Pierre Jouyet. Le secrétaire d'Etat français a appelé les deux parties -Kosovars albanais et Serbes- à «faire preuve de retenue» et «à éviter l'humiliation de l'autre». Même s'il a admis que «les marges de négociation étaient faibles» après l'échec ultime de la médiation de la Troïka, Jean-Pierre Jouyet a souligné l'importance du rôle de l'UE dans «la stabilisation» des pays et régions de l'ex-Yougoslavie. «Sous notre direction», dit encore le rapport de la troïka, les deux parties ont exploré plusieurs scénarios allant de l'indépendance à l'autonomie, ainsi que d'autres modèles comme des arrangements confédéraux, et même un schéma basé sur «un accord pour un désaccord» dans lequel aucune des parties ne devait renoncer à sa position mais les deux adhéreraient à des arrangements pratiques destinés à faciliter la coopération et la consultation entre elles. Selon le document, d'autres modèles internationaux comme Hong Kong, les îles Aland -une province administrative de Finlande autonome, démilitarisée et suédophone- et la Communauté des Etats indépendant (CEI), ont aussi été étudiés. Le rapport indique encore que l'éventualité d'une partition territoriale avait été évoquée mais seulement de manière superficielle car jugée inacceptable par les deux parties et le Groupe de contact. «Aucun de ces modèles ne s'est révélé être une base adéquate pour un compromis», dit-il. Des discussions formelles sur le Kosovo sont inscrites au programme du Conseil de sécurité pour le 19 décembre. L'ambassadeur de Russie a indiqué vendredi qu'il plaiderait pour la poursuite des négociations. C'est l'opposition de Moscou, qui dispose du droit de veto au Conseil, à l'adoption d'une résolution ouvrant la voie à l'indépendance sous supervision internationale de la province serbe, qui avait ouvert cette période de négociations de 120 jours entre Serbes et Kosovars albanais, laquelle expire demain.