L'adhésion culturelle révèle une collusion entre l'art et les systèmes économique et politique dont elle fait finalement la promotion. L'art contemporain battra certainement des records d'audience et de vente, cette semaine, à Bâle (Suisse). Près de 2000 artistes seront au rendez-vous avec leurs oeuvres à «Art Basel», pour une 39e édition qui s'efforce de dresser une image, la plus complète possible, du marché international de l'art. Victime de son succès, «Art Basel» a enregistré, cette année, un nombre record de candidatures: plus d'un millier de galeries. Mais, comme chaque année, seules 300 d'entre elles ont finalement été retenues par le Comité international d'experts. Les pays les plus largement représentés sont les Etats-Unis (72 exposants), l'Allemagne (49), la Suisse (35), la Grande-Bretagne (29), la France (22) et l'Italie (20). Mais 27 autres pays parmi lesquels la Chine (4 exposants), l'Argentine (2), l'Inde (1) ou l'Afrique du Sud (1) ont également trouvé place à Bâle. A la veille de l'ouverture officielle, les couloirs feutrés de la foire de Bâle, étaient déjà arpentés par des milliers de collectionneurs, galeristes et professionnels des grands musées internationaux, invités à l'occasion du vernissage et occupés à négocier les premières affaires de la semaine. «On ne peut pas ne pas être présent à Bâle», souligne, entre deux poignées de main, le galeriste parisien Daniel Le long. «Vous avez ici une densité de 1000 collectionneurs au mètre carré, quant à la foire de Paris, on en compte peut-être deux», plaisante-t-il. Déjà riche de quatre grands musées d'art (Kunstmuseum Basel, Museum für Gegenwartskunst, Musée Tinguely et Fondation Beyeler), Bâle s'enrichit, jusqu'au 8 juin, de cet impressionnant musée temporaire où la plupart des courants artistiques de l'art moderne et contemporain sont représentés, des artistes classiques comme Kurt Schwitters, Egon Schiele ou Alberto Giacometti, jusqu'aux plus récentes oeuvres de la scène internationale de l'art. Une galerie madrilène présentait, ainsi, une figure mi-homme mi-bébé, peinant à se dégager d'une couverture tapissée d'os symbolisant le poids de l'holocauste, oeuvre de l'Israélien Nadav Weismann. Un peu plus loin, les responsables de la galerie allemande Scheibler, aidaient une visiteuse à essuyer ses chaussures blanches, souillées après avoir malencontreusement marché dans...une gigantesque masse brune de pâte à tartiner chocolatée, conçue par l'Allemand Thomas Rentmeister. Une animation particulière entourait le stand de la galerie Marlborough, dominé par un triptyque de Francis Bacon («Trois études sur le corps humain»), proposé à 80 millions de dollars, un mois à peine après la vente à New York d'un autre triptyque du même peintre lors d'enchères à Stotheby's pour 83,3 millions de dollars. «Le marché de l'art est un marché particulier, il semble résister mieux que d'autres au contexte économique général», analyse le codirecteur de la foire, Marc Spiegler. «Les prix continuent de monter», confirme Fumiko Nagayoshi, de la galerie Scai (Tokyo), quelques minutes après avoir scellé la vente pour 80 000 euros, d'une tête de cerf recouverte de bulles de verre, oeuvre d'une des étoiles montantes de la scène nippone, Kohei Nawa. Certains collectionneurs, à l'instar de ce couple de Bruxellois, habitué des grands rendez-vous internationaux, se disent «renversés par certains prix. On a le sentiment que les galeries repèrent les jeunes artistes beaucoup plus tôt qu'autrefois, pour faire monter d'autant plus rapidement leur cote». «Je ne sais pas si ça va durer, mais il semble qu'il y a toujours des gens prêts à payer», commente un autre collectionneur, un Allemand tout aussi peu enclin que son confrère belge, à être cité nommément. Et, en même temps, ravi de constater que sa collection a, elle aussi, pris de la valeur. L'adhésion culturelle révèle une collusion entre l'art et les systèmes économique et politique dont elle fait finalement la promotion. La soumission des artistes aux conduites internationales, frappe l'art «d'impuissant» et le soumet aux impératifs de la distraction... tels que les musées et d'autres institutions qui se retrouvent exploités au nom de...Cette aliénation des artistes en quête de reconnaissance internationale engendre logiquement une régulation des styles et un renforcement de (?) Ce n'est sans doute pas un hasard si cette observation vaut en particulier pour ceux qui rejoignent à grands pas le bateau de la mondialisation.