La réaction de la population a été instantanée. Au sixième jour d'une campagne plus que glaciale, la Kabylie, rejetant la consultation électorale, a signifié, hier, son refus, souvent musclé, des meetings et autres rencontres animées par les candidats. Tizi Ghennif et Draâ Ben Khedda ont brutalement signifié une fin de non-recevoir aux candidats qui voulaient tenir des meetings. A Tizi Ghennif, au sud-ouest du chef-lieu de wilaya, les candidats de la liste indépendante Assirem voulaient tenir, hier, un meeting. La réaction de la population a été instantanée. La ville a baissé rideau et les citoyens ont demandé à ceux-ci de «revenir» sur leur décision. Des habitants de la localité affirment: «Tizi Ghennif ne veut pas avoir l'honneur d'être la ville par où commence la campagne.» A Draâ Ben Khedda, à environ une dizaine de kilomètres à l'ouest du chef-lieu de wilaya, les candidats RND ont, avant-hier, tenté de placarder des affiches invitant les citoyens au meeting prévu pour le lendemain. Des jeunes les ont aussitôt lacérées et pris position aux alentours du site choisi, la salle omnisports, en mettant en garde contre tout meeting. C'est dire combien l'atmosphère en Kabylie est tendue à l'approche du scrutin. Les citoyens ont peur de possibles dérapages. Ainsi, hier, des fonctionnaires réquisitionnés pour assurer le fonctionnement des bureaux de vote, ont pris attache avec nos bureaux de Tizi Ouzou pour déclarer: «Nous avons peur et nous sommes réellement angoissés. Ne pas répondre à la réquisition est passible de sanction pénale, y aller c'est aller contre les voeux de la population.» Les personnes réquisitionnées ont, semble-t-il, pris contact avec les responsables administratifs pour essayer de «couper à la corvée». Devant l'impossibilité, pour eux, de trouver «une porte de sortie», ces fonctionnaires ont carrément décidé de ne pas obtempérer aux réquisitions. Plusieurs préférant une éventuelle sanction pénale à une mise en quarantaine signifiant la mort sociale. La Kabylie a donc bel et bien mis le cap sur le boycott et même sur l'empêchement de la tenue du scrutin. Le 30 mai, date fatidique, est attendu avec appréhension. Dans les villages, les choses paraissent moins compliquées. Certes, des injonctions administratives ne manqueront pas. Il se pourrait même que les bureaux de vote puissent fonctionner sans surveillance. Mais en ville, les choses peuvent facilement déraper. Enfin, on a appris que des candidats de la liste indépendante Assirem envisageraient la tenue de meetings aujourd'hui à Azazga et Bouzeguène. La présidence tournante de la Cadc a tenu à «avertir tous les candidats que la population qui a rejeté les élections ne saurait accepter la tenue de ces meetings...». Bref, il est à signaler que la Kabylie semble décidée à ignorer les législatives, alors une campagne en Kabylie pour le scrutin du 30 mai paraît... tirer des plans sur la comète.