Cette visite a lieu sous la pression insistante des Etats-Unis qui craignent que le conflit entre Arabes et Kurdes ne ruine les efforts accomplis pour stabiliser l'Irak. Le Premier ministre irakien Nouri al-Maliki a renoué hier le dialogue avec les dirigeants kurdes afin de régler des différends aussi ardus et périlleux que la répartition des richesses pétrolières et les limites de la région autonome du Kurdistan. Pour sa première visite depuis son accession à ce poste en 2006, il est arrivé dans la matinée à l'aéroport de Souleimaniyeh où il a été reçu par le président et le vice-Premier ministre irakiens Jalal Talabani et Barham Saleh, tous les deux d'origine kurde, et Kosrat Rassoul, le vice-président de la région autonome du Kurdistan. Ils se sont ensuite rendus au quartier général de l'Union patriotique du Kurdistan (UPK de Jalal Talabani), situé à 75 km au nord-ouest de Souleimaniyeh, à Doukan. Selon le député kurde Mahmoud Othmane, «il restera deux jours et rencontrera dimanche (hier) à Doukan M.Talabani, le président de la région du Kurdistan Massoud Barzani et d'autres personnalités kurdes». «Cette visite est très positive et favorise le dialogue pour régler les problèmes entre le gouvernement central et le Kurdistan», avait indiqué samedi ce député. Lors des dernières élections présidentielle et législatives, M.Barzani a été largement réélu à son poste et les deux grands partis historiques, le Parti Démocratique du Kurdistan (PDK) et l'UPK, ont obtenu la majorité absolue au Parlement régional. M.Maliki effectue cette visite sous la pression insistante des Etats-Unis qui craignent que le conflit entre Arabes et Kurdes ne ruine les efforts accomplis pour stabiliser l'Irak mais aussi pour des raisons électorales. Avec le système proportionnel, M.Maliki sait que même si sa liste arrive en tête aux élections générales de janvier, il aura besoin d'alliés au Parlement pour être reconduit comme Premier ministre et qu'il doit donc ménager les Kurdes. Les Kurdes ont également besoin d'amis à Baghdad dans la perspective d'un départ des Américains, qui furent leurs principaux protecteurs. Juste après avoir rencontré le secrétaire américain à la Défense Robert Gates, le président Barzani avait annoncé mercredi l'ouverture prochaine de négociations avec Baghdad. Les relations sont très mauvaises entre Nouri al-Maliki, qui se présente comme le défenseur de l'Etat central face aux revendications kurdes sur les provinces septentrionales de Ninive et Kirkouk et M.Barzani, qui a assuré que jamais il ne renoncerait à Kirkouk. Lors d'un récent rassemblement électoral, M.Barzani avait cité une série de questions litigieuses empoisonnant les relations entre les deux parties. Il a évoqué les «territoires disputés» revendiqués par le Kurdistan comme la province de Kirkouk, le statut des combattants kurdes des peshmergas, la loi sur la répartition des revenus pétroliers, l'exercice du pouvoir par M.Maliki jugé trop personnel, et une meilleure répartition des ethnies au sein de l'armée. Alors que l'insurrection a nettement diminué depuis deux ans, les Etats-Unis craignent que ces conflits ethniques ou territoriaux ne dégénèrent en nouvelle guerre civile bien plus sanglante. Lors de sa visite en Irak, M.Gates a ainsi exhorté les dirigeants arabes et kurdes à trouver une issue pacifique à leur conflit. Le général américain Ray Odierno, le commandant des troupes en Irak, a indiqué pour sa part que les tensions entre le gouvernement du Kurdistan et celui de Baghdad étaient «la première source d'instabilité» en Irak. Les trois provinces formant le Kurdistan représentent 40.000 km2 mais les forces kurdes, dans le sillage de l'invasion conduite par les Etats-Unis en 2003, ont étendu leur présence sur 75.000 km2 en prenant le contrôle d'une partie des provinces de Kirkouk, Ninive et Diyala.