Après l'annonce samedi de la levée réciproque des restrictions à l'octroi de visas, Tripoli s'est empressé de parler de victoire sur Berne et d'affirmer que le différend avec Berne n'est toujours pas réglé. Le règlement du contentieux entre la Libye et l'Union européenne sur les visas ne signifie pas que la crise entre Tripoli et la Suisse soit terminée, ont affirmé hier les autorités libyennes qui exigent toujours un arbitrage international. La crise avec la Suisse est «un autre sujet», a indiqué le chef de la diplomatie libyenne Moussa Koussa, interrogé en marge du sommet arabe à Syrte, en Libye, pour savoir si les levées réciproques samedi des restrictions sur les visas par Tripoli et l'UE ouvraient la voie à un règlement du différend avec Berne. Le ministre a expliqué que son pays exigeait toujours un «arbitrage international» pour régler cette crise née de l'arrestation musclée à Genève en juillet 2008 d'un des fils du Mouamar El Gueddafi, Hannibal, sur plainte de deux domestiques pour mauvais traitements. «Nous accepterons les résultats (de cet arbitrage) quels qu'ils soient, négatifs ou positifs», a-t-il affirmé. M.Moussa a indiqué par ailleurs que les négociations avec Berne «ne se sont pas arrêtées» et qu'il pourrait y avoir «des réunions proches sous les auspices de l'Allemagne et de l'Espagne». En guise de rétorsion à l'interpellation d'Hannibal, les autorités libyennes avaient, entre autres, détenu deux hommes d'affaires helvétiques dont l'un, Max Göldi, purge depuis le 23 février une peine de quatre mois pour «séjour illégal» en Libye. Mais selon Tripoli, ces détentions n'ont «rien à voir» avec l'«affaire Hannibal» Interrogé au sujet d'une possible grâce de M.Göldi sur décision du colonel Mouamar El Gueddafi, le ministre libyen a indiqué qu'il n'y avait «pas de décision politique en justice». «Si le Conseil supérieur des instances judiciaires (Cour suprême) est convaincu, il peut prendre une décision (de grâce), sinon personne ne peut l'obliger à le faire», a-t-il précisé. L'avocat de Max Göldi avait présenté une demande de grâce ainsi qu'un recours auprès de la Cour suprême. Me Salah Zahaf avait alors expliqué que la grâce pourrait être accordée sur décision politique. Le ministère suisse des Affaires étrangères a de son côté rappelé hier que «l'objectif de la Suisse reste la libération et la sortie de Libye de Max Göldi». La Confédération helvétique, membre associé de l'espace Schengen, avait décidé en 2009 de restreindre, pour l'élite libyenne, l'attribution de visas permettant d'accéder aux pays de l'espace Schengen, impliquant ainsi l'UE dans ce contentieux. Tripoli avait répliqué en février en annonçant des restrictions de visas à l'encontre des ressortissants des pays de l'espace Schengen, provoquant la colère de plusieurs capitales européennes et finalement une médiation de Bruxelles. Après l'annonce samedi de la levée réciproque des restrictions à l'octroi de visas, Tripoli s'est empressé de parler de victoire sur Berne. La Suisse, elle, a tenu hier à justifier dans un communiqué les restrictions qu'elle avait prises, disant avoir alors agi «conformément à la Convention d'application des accords de Schengen» (...) «ce que la Commission européenne a par ailleurs clairement confirmé». La présidence espagnole de l'UE a cependant présenté samedi soir des excuses à Tripoli, dans un communiqué où elle a «déploré et regretté les problèmes et les ennuis engendrés par cette mesure». L'UE a souligné, par ailleurs, «son désir de préserver les bonnes relations (avec) la Grande Jamahiriya (libyenne)», espérant conclure bientôt un accord cadre de partenariat, objet depuis 2007 de négociations.