«Je veux être un genre de dahk (rire) intellectuel qui cherche à éveiller les consciences par l'humour.» Montréal, ville cosmopolite, réputée pour ses différents festivals, veut se distinguer depuis plusieurs années par son cachet culturel unique au Canada. Dans sa multitude de clubs de jazz, de cinémas, ou de night clubs, on distingue depuis peu un nouvel arrivant dans les comedy-bars, le Couscous Comedy Show. Le Couscous Comedy Show sévit depuis un an à Montréal, je suis allé rencontrer l'instigateur du nouveau rendez-vous humoristique montréalais, j'ai nommé Farès Mékidèche. Farès est un de ces Algériens qui a de la suite dans les idées, mais des idées qui ne sont pas forcément faites pour se suivre, Jugez plutôt de par vous-mêmes. Farès Mékidèche, de son nom de scène Uncle Fofi uncle pour Tonton et Fofi pour Farès, est un jeune Algérien de 25 ans, natif de la région de Jijel. Alors âgé de 5 ans, sa famille décide de s'installer en France où il y a grandi. Il viendra par la suite à Montréal en 2004 afin de terminer ses études de commerce. Fraîchement diplômé du HEC Montréal en 2008, promu à un bel avenir de golden boy, ce dernier aspire à une autre vie que celle d'un futur Bernard Madoff ou d'un Jérôme Kervie, Il décide donc, dans un premier temps, de mettre en pratique et de jumeler deux de ses aptitudes. Celle de faire du couscous, que sa mère lui a appris à cuisiner et son esprit commercial. Il se lance, contre toute attente, dans la vente et livraison de couscous à domicile. Ce qui n'était qu'une bonne idée de business assez lucratif, va très vite se transformer en tout autre chose... Et c'est là que les idées se suivent. Mais Farès a un «Uncle Fofi» qui sommeille en lui, il me confie que depuis son plus jeune âge, il a toujours aimé faire rire et eu le don de capter l'attention de son auditoire. Il caresse donc plusieurs rêves à la fois. Celui de faire rire, de produire, d'animer et de «transmettre sa vision de la culture algérienne» pour reprendre ses propres termes. A son aventure de vendeur de couscous à domicile, va donc se greffer sa troisième passion, celle du show. Du mélange détonant de plat traditionnel, d'esprit d'entrepreunariat et de show-man, découlera donc en 2009 l'idée du Couscous Comedy Show. Le concept est assez simple, une équipe d'une trentaine de bénévoles s'affaire pour que deux fois par mois, un show avec une pléiade de comiques confirmés ou amateurs, vienne présenter leurs nouveaux sketches devant un public gonflé... à la semoule. Autant le concept du comedy club est vieux comme le monde, autant le fait de le jumeler avec un bon couscous préparé par le maître de cérémonie lui-même, est une innovation totale! Durant la soirée, Farès assure lui-même la présentation et l'animation du show. Il le fait bien et pour cause, il se produit sur les scènes montréalaises depuis 2004 et s'occupe de l'animation de festivals et autres cérémonies. Avoir créé son propre show, était aussi pour lui une façon de se permettre le luxe de s'autoproduire et d'avoir son propre public. Mi-artiste, mi-entrepreneur, mi-cuisinier, il est vrai qu'il est très difficile de situer ce personnage dans un domaine précis. Je l'interroge: «Te considères-tu comme un artiste?» Sa réponse fut: «Oui, j'espère», mais à la question: «As-tu donc un projet de carrière?», il me rétorquera: «Non, je ne pense pas carrière... J'ai juste la conviction profonde que je ne veux pas faire comme tout le monde». Je m'interroge dès lors sur ses profondes ambitions et veux savoir ce qu'il aspire à devenir? Farès me répond: «Je veux devenir un personnage public, comme Ben Bella ou Bouteflika... Pas dans le sens politique, mais juste un personnage que tout le monde connaît et qui donne son avis, un genre de dahk (rire Ndlr) intellectuel qui cherche à éveiller les consciences par l'humour.» Durant mon entretien avec Farès, j'ai pu constater que ses réponses étaient à l'image du personnage, totalement décalé et bourré d'énergie, toujours soucieux de véhiculer une bonne image de son pays à travers son travail forgé par ses origines. Le peuple algérien, un peu plus que les autres peuples du Maghreb, souffre d'une image trop défigurée par des problèmes sécuritaires véhiculée dans le monde depuis des dizaines d'années. Et de ce fait, chaque Algérien qui se voit propulsé au-devant de la scène internationale, qu'elle soit artistique, scientifique ou sportive, est forcément perçu par ses compatriotes, directement ou indirectement, comme le porte-parole de son pays. Chaque Algérien se sent donc habité par cette volonté de ne pas décevoir et de faire honneur à ceux qui l'ont vu grandir. Farès Mékidèche, lui, semble chargé de cette mission, et à travers ses initiatives ou ses projets d'avenir comme celui de produire une version télévisée du Couscous Comedy Show, il participe, lui aussi, à redorer le blason de sa culture. Au vu de tout cela, on ne peut que souhaiter bonne réussite à Farès et je vous invite, si vous êtes dans la région de Montréal, à venir assister deux fois par mois au Couscous Comedy Show pour une bonne louche de bonne humeur, arrosée de sauce, légumes, viande, et pour faire passer le tout, une bonne pression de rire servie par votre hôte Uncle Fofi.