Entre deux offensives bien menées contre sa personne, le leader du Msp subit d'effroyables pertes aux élections législatives et locales. Dans un récent entretien (le premier du genre) accordé à un hebdomadaire arabophone, Oussama Abassi, le plus actif des enfants du numéro un de l'ex-FIS, pointe un doigt accusateur vers Mahfoud Nahnah qu'il considère comme «une émanation des pouvoirs occultes algériens», en même temps qu'il dément «toute action menée par celui-ci aux fins d'intercéder en faveur de Abassi Madani auprès des autorités algériennes». Le propos acéré de Oussama (qui, en lui-même, ne représente pas grand-chose) reflète le ressentiment latent des radicaux de l'ex-FIS, qui, comme il se doit, ne ratent pas une seule occasion pour mettre en pièces le vieux «cheikh en alpaga». Cette information serait anodine si elle ne venait pas conforter les propos répétés d'hommes, comme Ahmed Merah, décédé en février 2002, qui ont mis la création même du MSP sur le jeu occulte des clans. De toute évidence, ces accusations ne dérangent pas le leader du MSP outre mesure. En dix ans d'activité légale, il a placé son parti dans l'arène des grands, tout en permettant aux islamistes modérés de bénéficier du cadre politique légal pour exprimer leurs conceptions et leur projet de société. Le dénigrement des radicaux contre un modéré ne peut, en outre, perturber la sérénité politique du cheikh, dont l'entrisme, le noyautage et les alliances ont été autant d'atouts dont il a su bénéficier. En fait, ce qui dérange au plus haut degré le cheikh de Blida, ce sont surtout les scores calamiteux obtenus lors des élections législatives et locales. Entre le 30 mai et le 10 octobre 2002, c'est-à-dire en quatre mois, le MSP a perdu l'aura dont il a bénéficié auprès des autorités algériennes, des partis politiques et de l'étranger, pour devenir un petit parti dont la maison commence à se lézarder de toutes parts. Parti de la petite et moyenne bourgeoisie urbaine, le MSP ne jouit plus du crédit électoral dont il a bénéficié lors de la présidentielle de 1995 et qu'il a consolidé jusqu'en 2001, année où il a commencé à perdre du terrain. Aujourd'hui, c'est le MRN de Djaballah qui se pose comme le champion de l'islamisme auprès des autorités. L'ex-élève de Nahnah dont l'ambition est un secret de Polichinelle, présente un discours théologique cohérent, radical et tranchant. C'est peut-être ce qui a séduit une jeunesse urbaine pauvre, encore avide de protestations et de plus en plus tentée par le radicalisme. Les choses se présentant de la sorte, que peut alors bien faire le leader du MSP? Car il faut aussi s'attendre à ce que ses appuis dans les centres décisionnels le lâchent aussi, car il ne représente plus, désormais, la carte maîtresse à laquelle ils se référaient. En fait, c'est toute la stratégie des rapports ambigus pouvoir-islamistes qui sera remise en jeu, revue et corrigée. Le MSP, de par son côté «très politiquement correct» constituait pour le pouvoir la garantie d'un parti islamiste gérable et la caution pour une «démocratie à la carte». Or, c'est le MRN qui, aujourd'hui, se revêt d'un pareil habillage, d'autant plus que les déclarations à peine voilées de Abdallah Saâd Djaballah, leader du Mouvement pour la réforme nationale, laissent penser qu'il souhaite s'allier au FLN pour constituer d'un côté, une force, sur le plan politique, et d'un autre côté, faire pièce aux velléités de retour aux commandes affichées par le RND. Voilà donc comment se présentent, malheureusement, les choses pour le MSP. Qui peut sauver le cheikh?