A 48 heures de la clôture de l'opération de réception des dossiers des morts et blessés des événements du printemps noir, leurs parents continuent à affluer vers les sièges de wilaya. Les commissions installées à cet effet travaillent d'arrache-pied pour étudier les dossiers de toutes les victimes. Alors qu'à Tizi Ouzou, cette opération est presque achevée, à Béjaïa, elle se caractérise par un engouement sans précédent. Les indemnisations, qui constituent l'une des mesures prises par les pouvoirs publics, à l'issue de la rencontre du 24 mars dernier, entre les représentants de la présidence et les partisans du dialogue, ont été effectives, dès le 7 avril, date de la signature du décret portant «indemnisation des victimes du parachèvement de l'identité nationale». Elle a d'abord connu un retard considérable à l'origine duquel on retrouve, essentiellement, son rejet, par les ârchs et dans son sillage celle des parents. Mais quelque temps après, des divergences éclatent au grand jour entre les parents des victimes et le mouvement des ârchs. La perception, en catimini de la somme de 110 millions de centimes, par le biais des Habous par certaines familles a provoqué la colère des autres qui ont affiché ouvertement leur courroux et leur mécontentement. A Béjaïa comme à Tizi Ouzou, les réunions qui eurent lieu à ce sujet ont été chaotiques et ont toutefois débouché sur le rejet du décret présidentiel, mais déjà le scepticisme se lisait sur les visages des parents gagnés par une méfiance. La tournure prise par les événements dès le mois de mai et particulièrement après le scrutin des locales a mis fin au monopole des ârchs sur les familles. Le divorce était alors consommé entre les deux parties sans pour autant que celui-ci soit connu du grand public. L'engouement qu'avait connu cette opération ces deux dernières semaines témoigne de l'effritement de la confiance qui existait entre les parents de victimes et les animateurs du mouvement. Le fonctionnement «anachronique» et «relevant plus de la symbolique» des commissions juridiques et de solidarité de l'interwilayas a amené certains parents à perdre espoir quant aux aides promises. Du coup, on commençait à assister à un rapprochement avec l'administration. Les commissions de wilaya installées à cet effet, recevaient de plus en plus de dossiers, relevant à ce propos, les défaillances bureaucratiques qui ont induit un retard dans les traitements des dossiers et la vulgarisation du décret. C'est ainsi qu'à Tizi Ouzou, sur les 43 victimes, 33 à 39 dossiers déposés ont reçu l'accord de la commission. A Béjaïa, «la commission de wilaya continue à étudier les dossiers qui affluent en force ces derniers jours», nous confirmait hier une source autorisée qui se refusait à donner des chiffres avant la clôture de l'étude de tous les dossiers. Pendant ce temps, les familles retardataires n'ont qu'un seul souhait «voir le délai d'expiration prolongé de quelques jours». Ce que les pouvoirs publics n'écartent pas, nous confiait, hier, une source sûre. Plus de 121 victimes, si on ajoute celles du scrutin des locales, et les milliers de blessés recensés durant les événements qui ont secoué la Kabylie et où le mouvement citoyen continue à exiger «la satisfaction des revendications contenues dans la plate-forme d'El-Kseur».