Au niveau de certains segments sensibles comme les biens alimentaires et l'immobilier, les prix seront multipliés par 5, voire par 10. Les travailleurs, en recevant leurs bulletins de paie, vont s'apercevoir qu'ils ont gagné quelques sous de plus. C'est la bonne nouvelle. La mauvaise est qu'ils devront débourser plus et pas forcément pour consommer davantage. Le risque est qu'ils paieront les mêmes marchandises, à titre d'exemple, les légumes, et les mêmes services, exemple les prestations de santé, plus cher. Autrement dit, ces augmentations vont fondre comme neige au soleil. Dans quelques semaines, ce seront les vacances scolaires et la saison estivale qui commencera avec son lot de dépenses. Elles seront vite suivies par le Ramadhan, autre occasion de dépenses faramineuses. En somme, rien qui puisse réjouir les consommateurs. Même avec des subventions de 15 milliards de dollars destinées à diverses catégories, le choc de l'inflation sera ressenti par des milliers de familles. «C'est un vrai saut dans l'inconnu», avertit un économiste. «On ne pourra jamais atténuer l'inflation par des mesures administratives à court terme», affirme Ali Harbi, consultant en économie d'entreprise. Le contrôle de l'inflation nécessite une période d'au moins 4 à 5 ans, a-t-il souligné. Il relève que le seul moyen de juguler le risque inflationniste est de développer l'effort de la production locale. Car la somme importante d'argent qui sera injectée va augmenter la demande interne et orienter automatiquement les consommateurs sur les produits de l'importation. Et d'ajouter que tant d'argent liquide sur le marché conjugué aux effets du nouveau billet de 2000 DA va inévitablement exacerber le taux d'inflation et ne manquera pas de provoquer de nombreux problèmes. L'émission de nouveaux billets conduira inévitablement à renforcer le phénomène des prix arrondis, d'autant plus que les consommateurs ne vont pas être très regardants sur les petites monnaies, fait-il remarquer. Un effort d'investissement immobilier privé très faible, le manque de produits d'investissement pouvant motiver l'épargne par le canal bancaire, des sommes énormes d'argent circulant dans le circuit informel, l'émission de nouveaux billets de grosse monnaie, sont autant d'ingrédients qui tireront à la hausse le taux d'inflation. L'indice d'inflation moyen pourra aisément dépasser les 4%. Au niveau de certains segments sensibles comme les biens alimentaires et l'immobilier, l'augmentation sera quintuplée, voire décuplée, estime-t-il. Ce sera la conséquence de l'injection de sommes très importantes sur le marché, comme décidé récemment par le gouvernement. L'Etat dépense déjà des sommes astronomiques dans l'investissement à long terme, et les versements des salaires au titre des régimes indemnitaires et des rappels. Ces récentes revalorisations des salaires et des rappels pourraient aggraver l'inflation dans les mois à venir. Avec un poids de l'informel qui se situe autour de 15 à 18% du PIB, une masse d'argent importante en circulation en dehors du circuit bancaire, le taux d'inflation ne sera qu'explosif, prédit un analyste financier. 60% de la masse monétaire circule dans l'informel. En rappelant qu'il est clair que le meilleur moyen de récupérer l'argent injecté serait d'agir sur les augmentations du taux des crédits. Pour notre source, les prix augmentent trop, rendant très insignifiant ce que pourra éponger l'épargne, explique-t-il. En soulignant que l'épargne ne peut être prise en considération que si les pouvoirs publics anticipent sur le taux d'intérêt. Même s'il signale que le problème n'est pas l'épargne mais le chômage qui ne permet pas l'augmentation du taux d'intérêt. Ceci handicaperait l'investissement. D'ailleurs, il n'y a pas que l'inflation locale (le rapport entre la monnaie et les quantités de biens et services produits) mais aussi l'inflation importée à travers les produits et services provenant de l'étranger. D'après nos sources, les déclarations du ministre des Finances, Karim Djoudi, ne sont point rassurantes. Il s'attend à un taux d'inflation contenu aux environs de 4% pour l'année 2011. «C'est grâce à un effet de stérilisation d'une partie des opportunités d'épargne soutenues par l'Etat, que nous pouvons escompter un taux d'inflation contenu aux environs de 4%», a déclaré M.Djoudi. Selon le ministre, l'augmentation de la demande de consommation résultant du versement des salaires au titre des régimes indemnitaires avec rappel sur 2008, 2009 et 2010, suppose un risque inflationniste.