Choisi par Obama pour occuper le poste de président du National Intelligence Council, qui émet des avis à la Maison-Blanche sur les questions de sécurité, le diplomate Charles W. Freeman a renoncé à ce poste en accusant les lobbies pro-israéliens d'avoir mené une violente campagne contre lui. C'est le New York Times qui a éventé l'affaire. Freeman a mis ses pieds dans le plat, suscitant de nombreuses réactions des lobbys juifs à Washington. L'encre a coulé au point que Dennis Blair, conseiller personnel de Barack Obama et directeur du renseignement, est intervenu énergiquement pour tenter d'expliquer les propos de Freeman sur Israël qui ont été sortis de leur contexte ! Difficile d'avaler de telles couleuvres lorsqu'il s'agit de déclarations émises par des personnages de ce rang. Dans un message publié sur le site du Foreign Policy Magazine, Freeman a blâmé les lobbies pro-israéliens. “La tactique de ces lobbies, a-t-il dit, touche le fond du déshonneur et de l'indécence. Elle procède de l'assassinat de la personnalité, de la citation inexacte et sélective, de la distorsion volontaire de l'enregistrement, de la fabrication de mensonges et d'un total mépris de la vérité.” C'est clair et nette. Et Joshua Block, porte-parole de l'Aipac (American Israël Public Affairs Committee), le principal lobby pro-israélien aux Etats Unis, a beau jurer, personne n'est dupe, s'agissant du poids de son organisation sur le Congrès américain. Des indiscrétions de cette auguste institution ont révélé que des pressions avaient été exercées sur ses membres pour réfuter le choix d'Obama. Freeman est sur la liste noire de l'Aipac. Il y a quelques années, alors qu'il était ambassadeur en Arabie Saoudite, il avait mis en question le soutien inébranlable de Washington à Israël. Ce qui ne pouvait manquer d'irriter l'Aipac. Débarqué de l'administration, Freeman a été pendant quatre ans administrateur de la China National Offshore Oil Corporation et directeur du Middle East Policy Council. Ce qui suffisait pour les lobbys pro-israéliens de mener bataille auprès des congresmen en accusant Freeman de connivence avec les dirigeants de la Chine et de l'Arabie Saoudite. Pour Freeman, il est facile de voir d'où viennent les e-mails diffamatoires qui le concernent : un puissant lobby déterminé à empêcher d'émettre tout autre point de vue que le sien. Et de révéler que le but de ce lobby pro-israélien est de maintenir sous contrôle tout processus politique dans le Moyen-Orient. Le problème est comment Obama, l'homme du changement, a laissé faire au point de voir son choix remis en cause. Le retrait de Freeman est une défaite catastrophique pour le premier président noir des Etats-Unis. Pourtant, un ex-patron de l'Aipac doit comparaître devant un tribunal en avril pour espionnage au profit d'Israël. Israël ne voulait pas voir Freeman à la tête du National Intelligence Council qui supervise le travail des 16 agences américaines de renseignement, et qui avait rendu public en décembre 2007 un brûlot contre la politique de Bush pour l'Iran. Le National Intelligence Council était ferme : Téhéran avait arrêté à l'automne 2003 son programme de développement de l'arme nucléaire. Les avocats d'une frappe sur des sites nucléaires iraniens ont réagi avec colère et désarroi, à commencer par les lobbys juifs. D. Bouatta