De son vrai nom Mohamed Noura Kaboré, Alif Naaba, alias le Prince de Konkistenga, est devenu, en quelques années, l'idole des mélomanes burkinabés. En 1999, avec la sortie de son album Regard métis, le chanteur a d'abord captivé les regards des mélomanes. D'autres opus suivront ; le dernier, Wakat, est considéré comme l'album de maturité. Rencontré lors du dernier Fespaco — il a chanté à l'ouverture et à la clôture —, Alif Naaba a bien voulu répondre à nos questions. Liberté : On vous surnomme le Prince, le dieu Alif. Pourquoi ? Alif Naaba : Le Prince, le dieu Alif, je l'écris avec un petit “d”, moi, je suis musulman et croyant. C'est le pseudonyme que le public me donne et qu'on ne peut refuser forcément. Je dirai qu'il le donne aussi par rapport à tout ce que je j'apporte, à ma musique, à toutes ces émotions qui lui font croire, qui sûrement lui font dire que je suis un petit dieu avec une petit “d”. Votre dernier album est considéré comme l'ultime ou celui de la maturité. Qu'en-est-il ? C'est un album qui s'appelle Wakat, qui signifie le temps, le moment ou l'envol. Un album sur lequel on a pris quand même du temps pour travailler. Il est fait à partir de toutes mes expériences, mes rencontres depuis les deux précédents albums et puis toutes les scènes que j'ai pu visiter en Afrique et en Europe aussi. Cet album résume en quelque sorte, en fait, tout ce parcours-là. Et c'est vrai, on peut l'appeler l'album de la maturité, mais aussi, c'est un album, pour moi, qui se situe au carrefour de toutes les cultures Votre musique est une musique de fusion… Je fais de la fusion, c'est vrai, mais j'adore qualifier ma musique de carrefour du monde. Mes pieds sont posés, en fait, sur la culture, la musique de ma mère qui est une musique traditionnelle, et mes mains, qui sont les ailes, et mes yeux scrutent ou, du moins, captent tout ce qui vient de l'extérieur, et j'essaye de les apporter à cette musique-là qui est la musique fondamentale, à savoir la musique de chez moi. Votre source d'inspiration ? Mon inspiration première ? Je m'inspire de tout ce qui se passe au quotidien, je m'inspire du vécu de mon peuple. Je chante les valeurs qu'on a perdues, pour qu'elles reviennent : l'humanité, l'amour, le pardon… Ce sont les éléments fondamentaux pour un monde meilleur demain… Et si on ne sait pas pardonner, c'est sûr que notre monde ira inévitablement vers la sauvagerie… Donc, ce sont des choses que je ramène dans toutes mes chansons pour qu'elles soient répétitives, pour que mon monde à moi, celui dont je rêve, qui est un monde d'espoir, plein de vie, puisse exister demain. Donc, je m'inspire surtout de tout ce qui est dans le quotidien, j'écoute beaucoup les infos, j'essaye de toucher mais sans être politique à la fois, et ma musique et mon inspiration viennent aussi de la musique de ma mère, parce que j'ai vécu tout le temps avec ma mère qui était une femme très seule et qui chantait du traditionnel. Votre musique est une sorte de mixe, de la “new wave”… Oui, c'est un métissage de la musique du Burkina, des chants de ma mère et de toutes les influences des jeunes d'aujourd'hui. C'est de la “new wave” car, vu que je sois des deux mondes (tradition et modernité), ma musique reste très ouverte et parle à toutes les générations. Sa place est au premier plan au niveau national… Quelles sont vos aspirations ? La bonne diffusion de ma musique dans toute l'Afrique, ainsi qu'en Europe. Par ailleurs, durant ce moi de mars jusqu'à juillet, j'ai un programme assez chargé. Plusieurs concerts et participations en perspective, que ce soit en Afrique ou en France. A. I.