Les salaires sont en tête des revendications des agents de la SNVI. Selon les responsables syndicaux interrogés, ces dernières années se sont caractérisées par le nivellement des salaires par le bas. Ils rappellent, par ailleurs, que le problème des salaires est apparu dès les années 1970 et l'abandon du système salarial universel, pour le SGT. L'apparition, au cours des dernières années, du fameux Contrat économique et social et ses bi et tripartites n'a fait que retarder la recherche d'un modus vivendi acceptable pour tous, sous la poussée inflationniste et l'érosion continue du pouvoir d'achat des travailleurs. D'après M. Messaoudi Mokdad, SG de l'Union locale UGTA, “le conflit actuel est apparu dès la fin de la tripartite de décembre 2009. Avant la tripartite, l'ensemble des produits de large consommation avaient augmenté dans une proportion invraisemblable. Avec ces nouveaux prix, les travailleurs s'attendaient à une augmentation salariale conséquente. Or l'augmentation a été différée sine die, avant de devenir tributaire de nouvelles négociations entre les SGP et les fédérations. Les travailleurs sont convaincus que l'augmentation des prix des produits de première nécessité se fait sans le moindre obstacle, du jour au lendemain sous le vague prétexte de la liberté des prix, contrairement au pouvoir d'achat”. Voilà que tout est dit pour résumer la position des milliers de travailleurs de la zone industrielle de Rouiba et des dizaines d'autres milliers de la Fédération mécanique-métallurgie. C'est ce qui a décidé les syndicalistes à réaliser un sit-in ce 25 février devant la Maison du peuple, place du 1er-Mai. Loin de décolérer, le SG de l'Union locale UGTA de Rouiba rappelle qu'à “la fin de la tripartite, les pouvoirs publics avaient annoncé que 70% des travailleurs étaient concernés par l'augmentation des salaires, ce qui est parfaitement faux pour les travailleurs de la SNVI”. Il faut savoir que le SNMG est actuellement calculé en tenant compte de la totalité des primes, ce qui fait qu'en fin de compte, le salaire ne bouge pas. Du coup, les déclarations des pouvoirs publics se mettent à fleurer la démagogie la plus pure. Et il en sera ainsi tant que ce fameux article 87 bis (qui date de 1994) n'est pas abrogé ou amendé. “Toutes les tripartites n'auront aucun sens tant que l'article 87 bis est maintenu”, affirme M. Messaoudi, qui ajoute : “Nous avons dit aux pouvoirs publics : n'augmentez pas les salaires, contentez-vous de supprimer l'IRG et allez chercher l'impôt chez les plus nantis et les importateurs de containers.” M. Belmouloud Mohamed Ameziane est SG du syndicat d'entreprise SNVI et remplit actuellement l'intérim de la Fédération mécanique-métallurgie UGTA, en remplacement de son SG malade. La Fédération mécanique-métallurgie regroupe 5 SGP et 85 entreprises, “toutes déterminées à arracher l'augmentation de salaire souhaitée. C'est pour cela que 1 800 à 2 000 cadres syndicaux, représentant 6 000 travailleurs de la fédération, sont décidés à se rendre au sit-in du 25 février courant”. Selon lui, “l'article 87 bis n'est pas réellement un obstacle, pour peu que la volonté des pouvoirs publics existe. La preuve, en juin 2006, malgré cet article, il y a eu une augmentation des salaires de 15%, sans problème. Mais pour cette fois-ci, nous demandons qu'une augmentation des salaires soit envisagée sur la base de 35% négociable, pour l'ensemble des travailleurs de la fédération. Malheureusement à ce jour, les quatre réunions entre le bureau fédéral et les SGP n'ont rien donné, ce qui a décidé le bureau fédéral à se retirer de ces réunions stériles”. M. Messaoudi énonce : “Nous sommes assis sur une véritable poudrière ; avec 20 000 travailleurs pour la seule zone industrielle de Rouiba, les pouvoirs publics seraient bien avisés de prendre en charge au plus tôt les problèmes des travailleurs, avant qu'il ne soit trop tard et de satisfaire leurs revendications salariales.” Avant de poursuivre : “Même les retraites n'échappent pas à l'IRG, dès qu'elles dépassent 20 000 DA/mois. Ce qui aboutit au paradoxe où les retraités concernés refusent d'être augmentés, ce qui les ferait passer dans la catégorie où ils perdraient des revenus après avoir payé l'IRG !” “La décision d'assainir la SNVI n'est pas encore mise en œuvre” Pour information, le carnet de commandes de la SNVI est plein pour 3 ans, mais des problèmes d'approvisionnement, de financement et d'accompagnement par les banques empêchent la réalisation intégrale des prévisions. La SNVI cumule 62 milliards de DA de dettes que les pouvoirs publics n'ont jamais assainies, contrairement à ce qui a été fait pour d'autres entreprises ou même des banques totalement refinancées. Il est à souligner que la décision d'assainir la SNVI, prise ces deniers mois, n'a pas encore été mise en œuvre. Selon M. Belmouloud, le salaire d'un manœuvre à la SNVI s'élève à 11 000 DA, alors qu'un chef d'unité atteint 24 000 DA/mois. Le salaire moyen, indemnités comprises, s'établit entre 16 000 et 48 000DA/mois. Alors que le système universel de calcul des salaires, en vigueur durant les années 1970, donnait pleine satisfaction, la mise en œuvre du SGT qui y a mis fin a tué aussi l'harmonie des salaires et leur progression rationnelle. “Chez la SNVI, entre une qualification et celle qui lui est immédiatement supérieure, il existe une différence de 1,3%. Du coup, des employés refusent des promotions, puisqu'ils ne bénéficient souvent que d'augmentations de l'ordre de 300 à 500 DA/mois à peine”, affirme M. Belmouloud. Finalement, il semble bien que le syndicalisme soit devenu la bête noire de tous, malgré l'ensemble de lois régissant le monde du travail (loi 90-11 et 90-14). Pour preuve, le témoignage rapporté par le SG de l'Union locale de Rouiba, M. Messaoudi Mokdad : “Nous avons recours aux adhésions secrètes, voire clandestines, afin d'éviter aux adhérents des représailles de la part de leurs employeurs. Dès que nous atteignons les 20% d'adhésions par rapport aux effectifs, nous le signalons à l'employeur. Nous avons dû organiser des AG dans les locaux de l'Union locale UGTA, les jours fériés, car les employeurs ne nous autorisent pas à organiser, comme la loi le permet, les AG dans leurs locaux. Naturellement, après ça, nous subissons tous les problèmes possibles et imaginables.”