Le mouvement de grève, lancé le 24 février à l'appel des syndicats Cnapest et Unpef, continue son bonhomme de chemin, à travers le territoire national, et ce, jusqu'à l'aboutissement de leur plate-forme de revendications. Les élèves des trois paliers d'enseignement ont trouvé une nouvelle fois les portes closes, hier matin, dans les écoles, collèges et lycées de plusieurs wilayas de l'est du pays. “Les enseignants ont confirmé hier, à Annaba, leur détermination à poursuivre leur mouvement de grève jusqu'à mercredi prochain et même plus tard s'ils n'obtiennent pas satisfaction de leurs revendications”, ont déclaré les représentants des syndicats Cnapest et l'Unpef. Le taux de suivi du mouvement à Annaba se maintient, en ce 5e jour de débrayage, à hauteur de 90%, avec une légère baisse dans le primaire. Les mêmes chiffres sont annoncés dans les wilayas de Souk-Ahras, El-Tarf et de Guelma autant par les responsables syndicaux que par les cellules de communication des Directions de l'éducation des wilayas citées. Au centre, la grève des enseignants et des corps communs, qui entame sa deuxième semaine, est toujours largement suivie. Le taux serait, selon plusieurs syndicalistes, largement au-dessus des chiffres que communique la direction de l'éducation. Fait nouveau au cinquième jour de la grève : à El-Tarf un nombre important d'enseignants affiliés à l'UGTA a rejoint depuis dimanche les rangs du syndicat autonome de l'Unpef. Le taux de participation, dans cette wilaya, était hier de l'ordre de 96,54%. À l'ouest, le mouvement fait tache d'huile, notamment dans les lycées de la wilaya d'Oran. Fait notable, les lycéens et leurs parents ont pris les devants de la scène de la contestation pour ne pas faire les frais d'une année blanche. Les parents d'élèves “mettent en garde contre les tergiversations” dont sont “victimes nos enfants”, note-t-on dans un communiqué. Visiblement au bout du rouleau, les parents ont promis une autre semaine de protestation généralisée. Hier pour la troisième journée consécutive, les lycéens des classes de terminale ont investi les rues. À titre d'illustration, le lycée Lotfi, considéré comme le baromètre de la protestation lycéenne, n'a pas dérogé à la règle. Massés devant l'enceinte de l'établissement, des centaines de lycéens, certains accompagnés de leurs parents, ont communément fait cause commune. Ils entendent ainsi protester contre le “chantage dont sont victimes nos enfants”, affirment des parents d'élèves contrariés. Cependant, la paralysie des 52 lycées est quasi générale où le Cnapest et l'Unpef sont bien implantés. Les enseignants dénoncent le mépris de la tutelle Dans certains lycées, les enseignants affiliés au Snapest ont manifesté leur soutien à leurs collègues grévistes. Le débrayage des enseignants est également perceptible dans les communes de la wilaya de Chlef où “même le service minimum n'est plus assuré”. Les syndicalistes grévistes notent que “le secteur de l'éducation est totalement paralysé car tous les enseignants, les travailleurs et les adjoints d'éducation des trois paliers adhèrent spontanément au mouvement de grève”. Et d'ajouter : “Le taux relatif au débrayage en question a dépassé les 97% alors que la direction de l'éducation n'a avancé qu'un taux avoisinant les 60%.” Dans la wilaya de Aïn Témouchent, lors d'un point de presse, hier, au lycée Cheikh-El-Bachir El-Ibrahimi, les responsables du Cnapest et de l'Unpef ont affiché clairement leur crainte quant au risque d'une année blanche qui se profile à l'horizon en raison, selon eux, “du silence affiché jusque-là par le ministère de tutelle”. Ils annoncent un taux de suivi du mouvement de grève consécutivement de 93,78% (Cnapest) et de 85% (Unpef). Les deux syndicats ont interpellé le président de la République dans ce bras de fer et dont la situation se trouve dans une impasse au détriment bien sûr de l'élève. “Puisque le chef de l'Etat a réussi en apportant son soutien à l'EN, il pourra rééditer l'exploit, mais cette fois-ci pour dénouer une situation dont souffre la famille de l'éducation, mais aussi nos enfants”, déclarera le premier responsable du bureau de wilaya du Cnapest, qui saisit cette occasion pour dénoncer “la publication dans la presse des fiches de paie de ses collègues et dont la confidentialité est garantie par la loi”. Le chargé de communication du Cnapest rejette aussi le fait que la tutelle accuse le secteur “d'improductif” et de non “stratégique” affirmant que “nous ne sommes pas une usine de ciment.” Et de s'interroger sur le refus de l'ouverture du concours annuel pour le recrutement des PES. Dans la wilaya de Mascara, la scène des plus affligeantes est celle des écoliers résidant dans des zones rurales, qui se sont levés très tôt le matin pour rejoindre à pied la ville située à plus de 4 km. Ils s'exposent ainsi à des nombreux risques afin de rejoindre les établissements scolaires pour finalement être renvoyés chez eux par les directeurs d'école où les enseignants ont décidé de poursuivre la grève. Ces gamins, pris en otages, rentrent chez eux dans les mêmes circonstances. En effet, le personnel enseignant des trois paliers refuse de mettre un terme au mouvement entamé il a quelques jours déjà. Et le nombre est allé crescendo pour atteindre un taux de 95%, selon les responsables des syndicats, chiffres contestés par l'administration qui maintient le taux de 25%. Le personnel intendant observe un sit-in Les intendants, qui ont décidé à leur tour de rejoindre le mouvement, ont organisé hier des sit-in devant les directions de l'éducation de Béjaïa, El-Tarf, Mila, Bordj Bou-Arréridj. À Béjaïa, les organisateurs, dont le coordinateur local et un membre du secrétariat national, ont indiqué que le mouvement sera élargi au niveau national à partir de demain mercredi bien que, a-t-on assuré, des rassemblements aient été initiés un peu partout à travers le pays. On a indiqué, en outre, que par cette action, ils tiennent à dénoncer “l'attitude négative et laxiste du ministère”, mais aussi de la FNTE, censée défendre les intérêts moraux et matériels des personnels, des intendants et des corps communs ; les grands oubliés des augmentations, relayés par les médias et la presse écrite. Le syndicat du personnel des intendants, qui ne désespère pas de s'affranchir de la FNTE avec laquelle le divorce semble consommé, selon l'aveu du membre du bureau national, mais pas de rompre les amarres avec la centrale syndicale “sauf si Sidi-Saïd décide de nous sacrifier. À ce moment-là, on avisera”. Les adjoints d'éducation ont décidé à leur tour d'occuper la rue. Ils réclament “la reclassification et le droit à la promotion”. Ils condamnent, en outre, “la manœuvre du ministère, qui a été jusqu'à placarder, au mépris de l'obligation de réserve et du secret professionnel, nos salaires de la honte sur tous les quotidiens du pays”. Près de deux cents économes et auxiliaires des services économiques de l'éducation ont observé un sit-in, hier, devant la direction de l'éducation de Mila pour revendiquer ce qu'ils appellent leurs droits aux primes pédagogiques et de documentation. À Bordj Bou-Arréridj, une centaine de fonctionnaires de ces mêmes services ont observé, le même jour, un sit-in devant le siège de la direction de wilaya. Outre le sit-in, les fonctionnaires des services économiques, qui viennent de déposer un préavis de grève de huit jours, sont décidés à geler toute activité dès jeudi prochain pour entrer dans un débrayage.