Ceux qui s'adonnent à la drogue sont constamment sous pression, déprimés, violents et sont envahis par des pensées suicidaires. Quelque 302 000 personnes, âgées de 12 ans et plus, sont consommateurs de substances psychoactives. 180 000 d'entre elles ont entre 20 et 39 ans. C'est ce que révèle une enquête épidémiologique nationale et globale sur la prévalence de la drogue en Algérie, réalisée par le Centre national d'études et d'analyse pour la population et le développement (Cneap), et finalisée en septembre 2010. Le cannabis et les psychotropes demeurent les stupéfiants les plus consommés, talonnés par l'opium avec une prévalence de 0,055%. Les autres drogues comme la cocaïne, l'héroïne, l'ecstasy ont un taux de consommation plus faible. Globalement, cette étude du Cneap a permis de déterminer un taux national de prévalence de la consommation de la drogue de l'ordre de 1,15%, estimé sur la base du recours de la population à une ou plusieurs substances psychoactives durant 12 mois avec un taux de 1,69% pour les hommes et 0,67% pour les femmes. Cette enquête révèle également que 2,15% de la population a expérimenté une ou plusieurs drogues au cours d'une vie. “La tranche d'âge l'ayant expérimentée le plus est respectivement celle des 20-39 avec 2,72%, suivie des 40 ans et plus avec 2,15%, puis des 16-19 ans avec 1,38% et, enfin les 12-15 ans avec 0,38%”, peut-on lire dans le document du Cneap dont nous avons eu une copie et qui sera présenté aujourd'hui durant le séminaire régional pour les wilayas du Centre, organisé par l'Office national de lutte contre la drogue et la toxicomanie, à l'hôtel Riad Sidi-Fredj. On peut déduire, à partir de là, que la tranche d'âge qui consomme le plus les drogues est celle qui est en âge de travailler et qui dispose donc de ressources pour les acheter. Les lieux de consommation sont le quartier, le café, les soirées, la mer… L'école et le lieu de travail le sont de manière moindre. En dépit de la dépopulation du Grand-Sud, par rapport à d'autres régions du pays, c'est paradoxalement lui qui enregistre la plus importante prévalence de consommation de stupéfiants et de substances psychoactives. En seconde place, viennent les régions de l'Ouest puis de l'Est. La région du Centre est la moins touchée par ce phénomène. Le tabac est, sans surprise, la première substance licite consommée avec une prévalence de 17,6% pour la tranche d'âge des 20-39 ans. “Chez les plus jeunes, soit la population de moins de 20 ans, c'est toujours le tabac qui prédomine, mais nous relevons une consommation d'alcool et de drogue notamment chez les 16-19 ans”, expliquent les enquêteurs du Cneap. En revanche, ce sont les somnifères qui arrivent après le tabac, chez les personnes âgées de 40 ans et plus, suivis de l'alcool et des drogues. “Faire comme les amis”, “l'anxiété, la dépression” “la lutte contre le déplaisir”, “la fuite de la réalité” sont les principales raisons invoquées pour justifier une consommation des drogues. Les incidences des stupéfiants sur les consommateurs et la société sont effarantes. Ceux qui s'adonnent à la drogue sont constamment sous pression, déprimés, violents et sont envahis par des pensées suicidaires. “En comparant les populations ayant consommé de la drogue, on trouve que la pensée suicidaire et le désir de fuguer sont les plus fréquemment vécus que la population n'ayant pas consommé, suivis du vécu anxieux et de la fatigabilité”, peut-on lire dans ce document. On note, en outre, un retrait presque total des activités sociales. En effet, 93,15% des personnes ciblées par l'enquête n'ont assisté à aucune activité de loisirs, sportive ou religieuse, et 76,86% d'entres elles n'ont jamais assisté à un concert ou une fête. Cette attitude de désintéressement est illustrée aussi par une non-fréquentation de café et de bar dans 59,91% des cas. Pour ce qui est des conséquences de ce phénomène sur la société, les données révèlent que 10,69% de la tranche d'âge 16-19 ans ont déclaré avoir été mêlés au moins une fois à une bagarre à l'école ou à l'université, 7,13% auraient vendu leurs biens personnels, 3,76% auraient agressé un membre de la famille, 3,02% ont frappé un professeur et 2,65% ont déclaré avoir joué pour de l'argent. Pour les 20-39 ans, les situations recensées sont des problèmes avec des amis (23,34%), des problèmes sérieux avec les parents ou le conjoint (21,57%), les barrages hors ménage (18,22%), des rapports sexuels regrettés (11,03%), et de mauvaises performances au travail (9,97%). À noter que cette enquête a démarré le 10 novembre 2009 et s'est étalée sur une période de deux mois. Les ménages, objet de ce travail, regroupent 48 708 personnes dont 44 387 en zone agglomérée. La présente étude, riche en données récentes, va constituer un support pour l'Office national de lutte contre la drogue et la toxicomanie pour apporter les réajustements qui s'imposent à sa stratégie et adapter ses programmes d'action pour la période 2011-2015.