L'imzad est un instrument monocorde typiquement targui qui a été longtemps utilisé par des chanteuses pour exprimer leurs sentiments, l'amour et la beauté de la nature. Ces dernières années, cette pratique a été délaissée. Cet anthropologue s'est battu durant six ans pour collecter et encourager les mouvements associatifs afin de perpétuer l'imzad. Liberté : Vous avez collaboré à une nouvelle naissance de l'imzad, quel genre de techniques ont-elles été utilisées pour la pérennité de ce patrimoine ? Dida Badi : Nous avons commencé la collecte du patrimoine immatériel de la musique Imzad en créant des ateliers d'apprentissage à Ghilizane en 2002. Le travail de recherche a démarré entre 2001-2007 avec la collaboration du ministère de la Culture. Nos premières démarches furent le recensement des femmes qui jouaient à l'imzad à cette époque-là. La recherche s'est faite dans les campements des régions du Sud. Nous en avons rencontré quelques-unes, qui n'avaient plus touché l'instrument depuis une vingtaine d'années. D'ailleurs, plusieurs grandes figures de cette discipline ont quitté ce monde, alors nous leur avons rendu hommage comme Aïcha à Béni Haouess. Par la suite, trois ateliers d'apprentissages ont été créés à Djanet. Pour la sélection de jeunes filles jouant à l'imzad dans ces derniers, un concours a été organisé avec le ministère de la Culture en partenariat avec l'Union européenne. Cela nous a permis de sélectionner douze filles pour les encadrer et les former dans le but de la perpétuité de l'imzad. Entre autres, nous avons réalisé un documentaire au Centre national de la recherche scientifique, de l'anthropologie et d'histoire. Dans le même registre de la collecte du patrimoine immatériel, nous avons enregistré des contes et des musiques anciennes. Un livre Les régions de l'Ahaggar et du Tassili n'Ajjer a été publié en 2007, et a reçu le meilleur prix du livre sur le patrimoine au Sila 2007. Comment préserver, donc, l'imzad ? Nous avons récolté en tout 42 airs mais pour le moment nous avons restitué 41. Aussi, avons-nous recueilli de la poésie et plusieurs mélodies. Quant aux formations, la doyenne de l'imzad jouait devant les filles pour qu'elles puissent restituer les airs. Par contre, les ateliers n'existent plus, mais nous avons atteint notre objectif pour la récolte des airs. L'opération des ateliers n'étaient pas une opération continue mais seulement pour démontrer l'importance et la nécessité de l'imzad. D'ailleurs, c'est à partir de ce moment-là que les associations ont été créées à Djanet et Tamanrasset et que les gens ont commencé à entendre parler de l'imzad. Ce fut le point de départ qui a suscité l'intérêt national et international. Maintenant, il faudrait que les musicologues s'intéressent à l'imzad. Quel est l'objectif de vos recherches ? L'objectif de mes recherches est de sensibiliser les mouvements associatifs et les animateurs socioculturels sur la nécessité de reconnaître les recueils du patrimoine immatériel. Cela a donné ses fruits, car aujourd'hui le Sud regorge d'associations et de formations pour l'imzad. C'est même devenu international et les jeunes s'y intéressent énormément.