Selon des sources syndicales, le ministre a voulu prendre la température du secteur, en s'affranchissant des hiérarchies. De sources proches de la centrale syndicale nous avons appris que les choses sont en train de bouger du côté du ministère des finances et de la communauté bancaire nationale. En effet, l'argentier du pays vient d'inaugurer une forme nouvelle dans ses relations avec les responsables des banques publiques. Le ministre des finances, M. Benachenhou, qui vient de convoquer certains PDG de banques a exigé, ajoutent nos sources, que ces derniers “soient accompagnés de tout leur staff et ce, même s'il fallait déplacer une vingtaine de directeurs centraux au siège du ministère”. Ces rencontres avec le ministre ont eu lieu à travers des séances marathon qui “commencent la journée pour reprendre après le f'tour de 20 heures à 22 heures 30”. Au cours des débats qui portent généralement sur la politique des réformes bancaires et surtout sur l'absence d'une réelle ouverture à l'investissement des banques dans le financement de l'économie, Benachenhou dit-on : “a voulu avoir l'avis direct et, à chaud, des cadres centraux de ces mêmes banques. Autrement dit, la parole aura été donnée aux techniciens pour tenter d'expliquer la panne et le déficit flagrant enregistré sur le chapitre efficacité.” “Le ministre qui s'adressait directement à ces cadres, cassant ainsi toute forme de passage hiérarchique, semblait rechercher un autre son de cloche et un point de vue analytique différent de celui avancé par ses interlocuteurs classiques”, ajoutent encore des sources syndicales au fait de ces rencontres. Cette manière d'opérer pour le moins étonnante du ministre a soulevé des interrogations, voire des inquiétudes au sein de la profession. “Que peut bien dire un directeur de banque à son ministre et en présence de son PDG. Il perdra non seulement la notion des chiffres et de l'analyse mais également il souffrira de devoir répondre aux lieux et place de son responsable assurément mieux disposé que lui dans ce genre de questions”, affirment les professionnels. Cette sortie du ministre n'a pas manqué pour autant de nourrir toutes sortes de spéculations. Pour quoi tenait il à rencontrer le personnel d'encadrement des banques ? Etait-ce pour jauger de la compétence des ressources, ou y aurait-il d'autres visées non dites et qui voudraient que benachenhou espère découvrir en ce vivier quelques potentiels candidats, dans la perspective de certains changements dans le secteur ? En tout cas, si l'objectif du ministre était réellement de préparer un mouvement au sein des banques en puisant dans ces effectifs “sondés” à la faveur de ces rencontres, la manœuvre sera assurément porteuse de risques sur la crédibilité de la place déjà lourdement secouée par l'incapacité des autorités monétaires à faire face à l'ouverture du système. Aussi, est-il reconnu par les professionnels que l'urgence dans ce secteur réside dans la nécessite d'assainir l'environnement de la banque, notamment au point de vue juridique afin d'asseoir concrètement les efforts de modernisation dans lesquelles certaines se sont engagées. Aujourd'hui, la tendance s'est renversée. C'est pratiquement la banque qui est dans plusieurs cas à la recherche de candidats à l'investissement. Placées entre deux autorités (le ministère des finances et la Banque d'Agérie) aussi inconciliables qu'incompatibles les banques algériennes tentent de négocier avant tout une autonomie difficile à faire valoir quand les prérogatives des uns et des autres ne sont pas clairement définies. Un banquier ne vaut que par sa signature, pourquoi n'en serait il pas de même pour les hauts dirigeants de la banque d'Algérie ou du ministère afin de lever les ambiguïtés. Un PDG de banque est avant tout un manager n'ayant pour argument que des chiffres de bilan loin de tout calcul politique sinon il serait dangereusement à la merci — lui et les fonds qu'il dirige — de n'importe quel décideur. C'est le même bilan qui devrait en principe servir aussi bien pour sa reconduction ou son remplacement. Car en réalité pour des partenaires étrangers, telles les banques et assurances, tout remaniement ou le moindre mouvement à la tête de n'importe quelle institution bancaire constitue une source à suspicion qui ralentit de facto la confiance et incite à une révision des attitudes. Enfin, il est utile de signaler que la ministre déléguée à la réforme financière, Mme Mentouri, a brillé par son absence à ces rencontres initiées par M. benachenhou. Des lectures consistantes sont susceptibles d'être faites. A. W.