Il sera représenté par son ministre des Affaires étrangères. “C'est un sommet des Etats et non des chefs d'Etat”, a répliqué Abdelaziz Belkhadem en guise de réaction. Faux suspense pour vrai sommet. Prévisible en raison du lourd contentieux avec l'Algérie, la défection du roi du Maroc, Mohamed VI, au VIIe Sommet des chefs d'Etat de l'Union du Maghreb arabe (UMA), qui doit ouvrir demain ses travaux à Alger, est désormais officielle. La confirmation de cette absence est venue du ministre des Affaires étrangères, Mohamed Benaïssa, arrivé, hier, pour la réunion préliminaire des chefs de la diplomatie des cinq Etats de l'organisation. “Le roi m'a désigné pour le représenter à ce sommet”, a-t-il indiqué à sa descente d'avion. Peu prolixe, l'émissaire du palais royal n'a pas évoqué les raisons qui ont poussé le souverain alaouite à décliner l'invitation de son homologue algérien. Cette invite, qui lui a été transmise dans les règles par le ministre des Affaires étrangères, Abdelaziz Belkhadem, la semaine dernière à Marrakech, en marge du sommet Sud-Sud, n'a pas infléchi sa position. De même, l'impression de dégel qui s'est dégagée de ces dernières entrevues avec le président algérien, notamment lors de la rencontre euroméditerranéenne (5+5) à Tunis était trompeuse. “Nous allons poursuivre les consultations bilatérales entamées avec M. Belkhadem à Marrakech et à Tunis”, s'est contenté d'affirmer le ministre Benaïssa hier. En fait de consultations, il s'agit surtout du “chantage” que le Maroc continue à exercer sur l'Algérie en hypothéquant la construction maghrébine jusqu'au renoncement par notre pays au soutien de la cause sahraouie. “Les conditions sont à présent propices pour ouvrir une nouvelle page dans la voie de la structuration et de l'enracinement des règles de l'UMA”, a affirmé l'envoyé du roi. Dans le jargon diplomatique, ce genre de déclarations s'apparente surtout à un vœu pieux. En effet, tout le monde sait que l'UMA est non seulement en panne depuis presqu'une décennie, mais que la principale cause de cette léthargie est la persistance de Rabat à lier le destin de l'UMA à celui du Sahara occidental. Un contentieux difficile à dépasser Le roi Mohamed VI est passé à l'acte en juin 2002 en refusant une première fois déjà de se déplacer à Alger. Embarrassée, l'Algérie n'avait d'autre choix sinon reporter la rencontre en prétextant une demande d'ajournement du chef de l'Etat libyen Mouammar al-Kadhafi. Pour autant, elle a refusé de faire la moindre concession sur le Sahara occidental et rejeté, tout dernièrement, le plan de l'ONU pour l'octroi d'une autonomie à ce territoire dans le cadre d'une annexion définitive au Maroc. Par ailleurs, les autorités algériennes ne comptent pas céder au désir des Marocains de rouvrir les frontières entre les deux pays. D'autant plus qu'une telle démarche profiterait exclusivement aux voisins. C'est dire l'importance des obstacles qui font perdurer la mésentente et freinent l'intégration maghrébine. Dans ce contexte, la tenue du Sommet d'Alger n'est qu'une formalité, une de plus dans un processus de construction toujours embryonnaire. Il est alors à se demander pourquoi notre pays a veillé scrupuleusement à ce qu'il soit tenu. La réponse est venue de Belkhadem pour qui le dérolument d'une telle rencontre permet à l'Algérie de se décharger de la présidence de l'UMA, un fardeau dont elle veut absolument se débarrasser. “C'est un sommet des Etats et non des chefs d'Etat”, a-t-il répliqué en guise de réaction à l'absence du roi du Maroc. De Paris, où il était en visite vendredi dernier, le chef de l'Etat a tenu pratiquement le même discours en faisant remarquer que la réunion “se tiendra avec ceux qui viendront”. Pour Alger donc, l'absence du roi Mohamed VI n'est en aucun point handicapante. Il reste néanmoins qu'elle marque la désagrégation d'une organisation régionale que ses membres perçoivent comme un boulet, une sorte de cadeau empoisonné qu'ils se rejettent mutuellement. Alors qu'outre Méditerranée et outre Atlantique, autant les Etats-Unis que l'UE voient en l'UMA l'espace le plus approprié pour le partenariat. S. L.