Alors que des milliers de manifestants s'étaient rassemblés à Bruxelles pour fustiger la politique d'austérité prônée par les dirigeants européens, les chefs d'Etat et de gouvernement des 27 amorçaient leur traditionnel Sommet de printemps dans un climat relativement apaisé. La crise financière ne ravit plus l'actualité et les responsables européens ont dès lors tenu à Bruxelles un « vaste débat » sur la situation économique et sociale en fixant les orientations de la politique économique des Etats membres et de l'Union européenne en 2013 . Une priorité particulière a même été accordée au soutien à l'emploi des jeunes et à la promotion de la croissance et de la compétitivité dans l'Union. Les thèmes des prochains Sommets des Chefs d'Etat et de gouvernement des 27 ont donc été fixés. On commencera par l'énergie. Et ce seront ensuite des thématiques comme l'innovation, les services qui seront abordés avec en décembre, celui de la défense. En juin dernier, 120 milliards d'euro avaient été dégagés pour relancer la croissance via des fonds structurels, une recapitalisation de la Banque européenne d'investissement ou les fameux « projet bonds » , ces financements obligataires créés dans le but de soutenir de grands projets d'infrastructures.... Et, pour la chancelière allemande Angela Merkel, il est nécessaire maintenant d'utiliser ces nouveaux moyens car « l'argent est là et il doit aller vers les jeunes qui cherchent des emplois ». Tout semble donc balisé ; Et ce n'est pas au cours de cette réunion que les observateurs auraient imaginé une quelconque mise en cause de la politique européenne telle qu'elle a été menée ces derniers mois .On s'est donc contenté de réaffirmer les sempiternelles positions sur la croissance et la lutte contre le chômage et il faudra probablement attendre les élections allemandes , prévues dans six mois, pour y voir un peu plus clair. On perçoit toutefois quelques nuances discordantes parmi les Européens. Ainsi, Rome et Paris ont-ils pu constater que leurs partenaires étaient disposés à leur laisser plus d'aisance en lâchant d'un cran la ceinture d'austérité qui engendre la colère de la rue dans de nombreuses capitales. La règle de réduction des 3% de déficit public qui taraude les économies des Etats membres depuis trois ans est même devenue moins rigoureuse dans la mesure où le texte final mentionne « la nécessité d'une consolidation budgétaire différenciée et orientée vers la croissance ».Même Angela Merkel a semblé mettre en cause la Commission en demandant « de la flexibilité à des procédures trop rigides et donc trop lentes ». Le dossier syrien vint néanmoins perturber cette dernière rencontre au Sommet des responsables européens. Une première fois en évoquant les relations avec la Russie car les Européens , dans le sillage de leur rencontre avec le médiateur onusien Brahimi, souhaitent que ce partenaire important de l'Union européenne change son attitude par rapport au régime de Bachar El Assad. Une seconde fois en examinant la situation internationale et en abordant la question spécifique du dossier syrien. En effet, depuis des semaines, la France et l'Angleterre ont exprimé ouvertement le vœu de lever l' embargo européen sur les armes en Syrie. Paris et Londres veulent maintenant que les Européens , qui ont déjà reconnu la coalition et décidé de livrer du matériel non létal ainsi qu'une assistance technique aux coalisés, franchissent une nouvelle étape. Et, si aucun consensus n'a pu être dégagé à Bruxelles lors de ce Sommet, on observe que même la chancelière allemande se montre disposée à examiner toutes les conséquences de la livraison d'armes aux opposants de Bachar El Assad. Le président français a pensé que les décisions prises jusqu'alors au niveau européen seraient suffisantes pour amorcer une solution politique mais, au contraire, il a constaté que le nombre de victimes grandissaient chaque jour et que plusieurs pays- la Russie et l'Iran- poursuivaient leurs livraisons d'armes. Dès lors, François Hollande « souhaite cette levée » car « cela fait deux ans que le drame se produit » et que ces derniers mois, aucune solution politique n'a été trouvée malgré l'action du médiateur Brahimi, les propositions européennes et les décisions du Conseil de Sécurité. « Rien n'a pu être obtenu » a regretté le chef de l'Etat français qui a estimé que l'Europe devait « prendre cette décision dans les prochaines semaines ». Personne ne perçoit pour l'instant une issue politique au conflit qui a causé plus de 70 000 morts selon une estimation des Nations Unies et , de toute manière, les responsables européens devront trancher cette question lors d'un Conseil des ministres des Affaires étrangères prévu en Irlande à la fin du mois de mai. « Beaucoup sont convaincus mais pas tous » a remarqué François Hollande qui espère convaincre ses partenaires dans les prochaines semaines dans l'espoir qu'une décision commune sera prise « au plus tard fin mai » par les 27 . Il a aussi souligné qu'au-delà de cette date « la France prendrait ses responsabilités ». Cela veut-il dire que Londres et Paris seraient disposés à agir seuls dans le dossier syrien ? On sait toutefois que des armes, naguère utilisées en Libye, se sont retrouvées dans d'autres pays. Même au Mali et ... en Syrie. Dès lors , la coalition reconnue comme seul « représentant du peuple syrien » devrait sans doute fournir des assurances aux pays qui hésitent encore à lever l'embargo en leur garantissant le contrôle des armes et du matériel acheminés dans cette région du monde. D'aucuns voient en effet d'un mauvais œil que des groupes puissent détourner ces armes après la chute de Bachar EL ASSAD. Dans cette hypothèse, il n'est en effet pas exclu que ce conflit finisse par gagner d'autres pays comme la Turquie, le Liban...ou Israel... A.M