Les pays arabes sortent de leur torpeur. Ils se décident enfin à demander à l'Assemblée générale des Nations unies de condamner Israël, qui a rejeté l'avis de la Cour internationale de justice (CIJ) de démanteler son mur devant faire du futur Etat palestinien une succession de bantoustans. Afin d'éviter un veto américain au Conseil de sécurité, automatique lorsqu'il s'agit d'Israël, les pays arabes ont l'intention, dans un premier temps, de convoquer demain l'AG de l'ONU, dont, il faut le souligner, les résolutions ne sont pas contraignantes. L'Assemblée générale de l'ONU peut émettre des recommandations, mais seul le conseil de sécurité a l'autorité pour édicter des résolutions contraignantes. Or, les Etats-Unis, membre permanent du Conseil, opposent systématiquement leur veto à toute résolution qui serait contraignante pour Israël. La CIJ, principal organe juridique de l'ONU, a jugé le 9 juillet que le mur de séparation érigé par Israël en Cisjordanie était illégal, réclamant son démantèlement et le versement de réparations aux palestiniens lésés par sa construction. Sharon a rejeté ce jugement de la CIJ, dont l'avis avait été demandé par l'assemblée général de l'ONU, ordonnant même la poursuite des travaux de construction de son mur. Sharon s'est assuré au préalable du soutien de Washington et du président Bush pour qui, il n'est pas question d'embarrasser le lobby juif américain en prévision des présidentielles de novembre prochain, qu'il compte remporter en dépit de ses déconvenues en Irak. Le président américain, qui a fait de la lutte antiterroriste mondiale un sacerdoce, partage la conviction de Sharon que ce mur est destiné à protéger les Israéliens de kamikazes palestiniens. Mais, selon le représentant des palestiniens à l'ONU, le jugement de la CIJ, appuyé par une recommandation ferme de l'AG de l'organisation mondiale, pourrait malgré tout influer sur la position des Etats-Unis. Le débat sur le mur est terminé, a-t-il estimé lors d'une conférence de presse au siège de l'ONU à New York, et, si Israël ne se conforme pas à ses obligations telles qu'elles ont été déterminées par la justice internationale, Sharon se mettra officiellement et juridiquement hors la loi. Les pays arabes, sachant que Sharon a la protection de Bush, tablent sur l'OCI, l'UE et la Russie pour obtenir quelque chose qui aille plus loin qu'une condamnation de pure forme. Pour ne pas mettre Washington en porte-à-faux en ce moment crucial de normalisation en Irak et à l'approche de la présidentielle américaine, le dossier pourrait ne pas être présenté tout de suite devant le Conseil de sécurité. Les Arabes, selon des indiscrétions lâchées dans les coulisses des Nations unies, ne voudraient surtout pas embarrasser délibérément Bush juste maintenant, d'autant que le président américain a fini par consentir à revoir son fameux plan de démocratisation du Grand Moyen-Orient, en le rendant plus acceptable aux yeux des régimes pour qui il a été confectionné. D. B.