Pour le patron de la Centrale syndicale tant que le Chef du gouvernement ne lui a rien dit, les propos du ministre de l'Energie ne sont que du “vent”. Ça “gaze” du côté de l'Ugta. La déclaration du ministre de l'Energie et des Mines, M. Chakib Khelil, selon laquelle le projet de loi sur les hydrocarbures sera encore une fois présenté prochainement à l'APN, a eu l'effet d'une bombe au siège de la Centrale syndicale. Son patron, Abdelmadjid Sidi Saïd, ne veut visiblement pas croire cette “mauvaise nouvelle”. “Je suis le secrétaire général de l'Ugta, je ne réponds pas à un ministre !” tranche-t-il sec quand Liberté l'a interrogé sur cette sortie médiatique de Chakib Khelil à l'occasion du forum d'El Moudjahid. Sidi Saïd refuse sans ambages la polémique avec “un ministre” mais le ton de son propos en dit long sur la détermination de son organisation à croiser, une fois de plus, le fer avec le ministre de l'Energie. Il assimile, en effet, les déclarations du ministre à des broutilles auxquelles “il ne faut même pas prêter attention”. Mais la nonchalance du SG de la Centrale syndicale cache mal une montée d'adrénaline perceptible dans l'expression de son visage en feu. Déjà très occupé par les réunions de coordination avec son staff pour préparer la bipartite, Sidi Saïd ne semble pas vouloir perdre son temps avec cette histoire de loi sur les hydrocarbures. “En tant que secrétaire général de l'Ugta, c'est comme s'il n'avait rien dit”. Comprendre Chakib Khelil bien entendu. Notre interlocuteur donne cette nette impression qu'il ne partage strictement rien avec le ministre-rival dont il évite soigneusement de citer le nom. Sidi Saïd prend plutôt de la hauteur en faisant remarquer qu'il ne tiendra compte que des propos du Chef du gouvernement. “Mon partenaire c'est le Chef du gouvernement et personne d'autre ; je m'en tiens donc à ses déclarations et laisse les autres dire ce qu'ils veulent… !” Les paroles de Chakib Khelil devant les journalistes au forum d'El Moudjahid ne sont donc que du “vent” aux yeux de l'état- major de la Centrale dont les yeux sont pour l'heure braqués sur le volumineux dossier de la Fonction publique. Et tout ce qui n'émane pas d'Ahmed Ouyahia en sa qualité de chef de l'Exécutif est frappé du sceau de la nullité, laisse-t-on entendre. “Tant que le Chef du gouvernement n'a pas déclaré publiquement et officiellement que ce fameux projet de loi sur les hydrocarbures va être présenté à nouveau, je ne réponds pas à ce genre de déclarations”. Sidi Saïd étale ainsi le contentieux qui oppose son organisation au ministre de l'Energie sur la place publique en suggérant que Chakib Khelil serait une espèce de “brebis galeuse” qui ne respecte pas forcément la discipline gouvernementale. Le SG de l'Ugta, précise bien que Ouyahia ne l'a aucunement informé d'une éventuelle intention de son cabinet de remettre au goût du jour le très controversé projet de libéralisation des hydrocarbures cher à Chakib Khelil et aux Américains. “S'il y avait quelque chose dans ce sens, le Chef du gouvernement m'aurait sans doute informé”, dit, confiant, Sidi Saïd. Il ne ferme pas pour autant la porte. “Il se peut qu'on ait préparé une nouvelle mouture du projet qu'ils doivent soumettre impérativement à l'appréciation de l'Ugta ; et là tout est possible à condition que les intérêts de l'Algérie et ceux des travailleurs soient sauvegardés”, précise Sidi Saïd. Mais, il se trouve que Chakib Khelil a bien déclaré que c'est la première mouture qui sera présentée à l'Assemblée populaire nationale. La précision faite, le patron de la Centrale s'en va en guerre et assène : “Il n'en est pas question, de toute façon, si c'est le même projet, notre position est connue de tous et nous ne céderons jamais…” En prenant congé de nous, Sidi Saïd se prépare, sans doute à préparer une riposte dans une bataille autrement plus violente que celle qu'il s'apprête à livrer sur le terrain de la Fonction publique. À la veille de la bipartite, la tension monte déjà entre un “électron libre” du gouvernement et la puissante Centrale syndicale. Chakib Khelil a envoyé l'étincelle, Sidi Saïd allumé lui renvoie une charge. Entre les deux, ça va sans doute gazer… H. M.