Ankara constitue le plus vieux postulant à une place au sein de l'Europe unie, qui devient de plus en plus incertaine en raison du manque de sincérité de la part de Bruxelles. Discrimination. Le mot a été lâché par Tayyip Recep Erdogan, le chef du gouvernement turc, dans l'entretien paru dimanche dans le journal allemand Bild am Sonntag. Il faut dire que la Turquie est excédée par une attente qui dure depuis 43 ans, au cours desquels Ankara n'a eu droit qu'à des atermoiements de la part des dirigeants de l'Union européenne, depuis la naissance de la défunte Communauté économique européenne. “Nous avons fait tout ce qu'on nous demandait et les Européens hésitent encore. On peut vraiment appeler cela de la discrimination”, a déclaré le Premier ministre turc. “Aucun pays n'a attendu 41 ans à la porte de l'Union européenne”, a-t-il ajouté. Les propos d'Erdogan montrent le sentiment de déception ressenti par ses compatriotes de se voir traités de la sorte par une communauté à laquelle ils appartiennent géopolitiquement depuis des lustres et dont une bonne partie faisait partie de l'empire ottoman, dont la capitale était Istanbul. Ces déclarations surviennent pratiquement à la veille d'un sommet de l'UE, qui s'ouvre dans 48 heures à Bruxelles pour décider de la réponse à donner à la candidature de la Turquie. Ainsi, il a fallu 41 ans pour les dirigeants de l'Europe pour daigner tenir une réunion au sommet et trancher la question de l'entrée d'Ankara dans ce cercle qu'ils ouvrent et ferment à leur gré. Pis, ce rendez-vous ne servira qu'à prendre une décision quant à l'opportunité de fixer une date pour le lancement de négociations avec la Turquie pour voir si elle réuni tous les critères exigés. Devant ce mépris qui ne dit pas son nom, et l'hostilité affichée publiquement par le président de la commission européenne, l'ancien chef de l'Etat français, Valéry Giscard d'Estaing, Erdogan adopte désormais une position ferme. Il n'est plus question pour son pays d'accepter de nouvelles conditions, quitte à mettre une croix sur l'adhésion à l'UE. “Il faut comprendre que bien que l'UE soit importante pour la Turquie, nous ne sommes pas assez naïfs pour dire que nous adhérerons toujours à l'Union européenne en dépit de tout”, a précisé le ministre turc de la Justice, Cemil Ciçek, lors d'une réunion de parlementaires. Il confirme les propos de son chef du gouvernement, allant même jusqu'à mettre en garde Bruxelles contre sa tendance à tourner Istanbul en dérision en ajoutant : “L'UE doit éviter de tourner la chose en comédie en introduisant condition sur condition, comme une poupée russe.” Il ne fait plus aucun doute quant à un règlement rapide de la question. K. A.