Fidèle à ses habitudes de rencontres et de partage, le centre d'études diocésain les Glycines a organisé avant-hier un bel hommage à un grand intellectuel algérien au parcours riche mais inconnu d'une grande majorité de citoyens, à savoir Mohand Tazerout (1893, Aghribs-1973 Tanger). Animée par Jacques Fournier qui a lui-même connu ce personnage dont il a épousé la fille, cette rencontre a drainé un panel intéressant de citoyens lambda, de membres de la famille Tazerout ainsi que certaines figures connues du monde politique et culturel, dont Monseigneur Tessier, Saïd Sadi, Abdelaziz Rahabi, Fodhil Boumala, Djilali Sari, Slimane Benaziez, Fouad Soufi... C'est dire l'intérêt et la curiosité d'en savoir un peu plus sur un nom qui a suscité bien des réactions et des susceptibilités par rapport à un parcours certes atypique, mais qui semble pour le moins controversé et assez mystérieux sur certaines zones d'ombre de sa vie. Jacques Fournier est né en Algérie de parents pieds-noirs du Constantinois, il fait des études à Oran, puis à Alger, avant de partir en France avec sa famille à l'âge de 17 ans. Il occupa par la suite plusieurs hautes fonctions au sein du gouvernement français, dans de grandes entreprises publiques, pour ensuite s'investir dans diverses activités de coopération, entre autres en Europe de l'Est et en Palestine. Il est l'auteur de plusieurs ouvrages dont L'Algérie retrouvée 1929-2014 où il consacre tout un chapitre à cette illustre figure que fut Mohand Tazerout. Une rencontre enrichissante qui nous fit découvrir la vie et l'œuvre de cet intellectuel germaniste, encyclopédiste, engagé à la fin de sa vie dans la cause algérienne, et quelques facettes de l'homme de tous les jours que Jacques Fournier a eu l'opportunité de connaître en raison de leurs liens familiaux. Un exposé que le conférencier a jugé bon de décomposer en trois parties distinctes : "L'enfance et la première formation en Algérie" ; "L'engagement dans la guerre 1914-1918" ; "L'intégration durable dans la société française par son mariage avec une institutrice vendéenne et l'exercice de son métier de professeur d'allemand" ; "L'œuvre considérable du germaniste, de l'encyclopédiste, de l'intellectuel qui va s'engager à la fin de sa vie dans le conflit algérien". Un parcours en somme bien riche abordé par l'exposé détaillé donné par M. Fournier qui s'est basé sur ce qu'il connaît de l'homme, puis sur les recherches qu'il a effectuées par la suite et les documents qu'il a eu en sa possession, aidé en cela par un livre publié aux éditions Bouchène écrit pas la défunte Nejma Abdelfettah-Lalmiet qui lui consacre une partie de son travail. Une évocation qui a le mérite de vouloir déterrer le passé d'un intellectuel qui a bouleversé son ère et quelque peu ébranlé son entourage "occidental" par sa vision mature et sa critique "civilisationnelle". Un intellectuel autour duquel on a construit le mythe de globe-trotter multilingue, sur lequel on a échafaudé des spéculations au gré des envies, mais dont il serait plus judicieux, selon l'avis de beaucoup d'invités, de faire une étude objective et scientifique basée sur ses écrits ; toutefois, une question reste posée : où est passée sa traduction du Coran vers le français remise en 1975 par M. et Mme Fournier lors de leur séjour en Algérie...? S. B.