Le Panel international des ressources (PIR), un organe du Programme des Nations unies pour l'environnement (PNUE) a remis au G7, lors de la réunion du 17 mai dernier, à Toyama au Japon, un rapport commandé par l'Organisation de développement et de la coopération économique (OCDE). Intitulé Policy Guidance on Resource Efficiency, ce cinquième rapport depuis 2007 (undp.org), appelle les gouvernements à l'innovation pour réduire encore plus les déchets afin d'épargner l'extraction des ressources naturelles. Le document recense les nouvelles technologies pour améliorer le faible taux de recyclage de certains métaux, les techniques qui permettraient une exploitation durable des bios fuels, les moyens de faire face, au mieux, aux problèmes de pollution et de rareté de l'eau dans certaines régions... Le but est le découplage de l'utilisation des ressources naturelles et des impacts environnementaux avec la croissance économique. Au rythme actuel, caractérisé par une poussée de la demande des pays émergents et en développement et l'accroissement démographique, le volume d'extraction mondiale de ressources naturelles est appelé à doubler d'ici à 2050. Dans le cas où la consommation individuelle égale partout celle des pays développés, ce volume triplera à cette date c'est-à-dire, 140 milliards de tonnes. Actuellement la consommation par habitant dans le G7 reste supérieure d'environ 60% à la moyenne mondiale. Notons que ces pays "ont réussi" à stabiliser l'extraction des ressources naturelles depuis les années 1980. En 2009, plus de 1,2 milliard de tonnes d'acier ont été produites à l'échelle mondiale (30 pour l''aluminium et 24 pour le cuivre). Les taux de recyclage dans les pays développés sont assez élevés, 70% à 90% pour le fer et l'acier, et plus de 50% pour l'aluminium et le cuivre. La stabilisation de la consommation de ressources brandie par pays du G7 est toute relative Mais le rapport souligne, à juste titre, un autre volet qui concerne le commerce mondial. A l'heure de la mondialisation, les pays et les processus de production économiques sont de plus en plus interconnectés par des relations commerciales. "Le commerce des ressources naturelles croît beaucoup plus rapidement que l'extraction intérieure, ce qui implique de plus en plus les pressions environnementales et impacts." En plus des impacts environnementaux directs générés par le transport des marchandises (carburant, infrastructure, gaz à effet de serre...), l'usage final (en tant matières premières ou biens) des ressources extraites n'est souvent pas destiné au seul pays qui y recourt. Le rapport montre que les émissions de CO2 contenues dans les produits échangés internationalement représentent 27% du total des émissions de CO2 liées à l'énergie, la part de l'eau incorporée était d'environ 16% (eau virtuelle) et la part d'extraction de matières premières a été estimée à environ 20% de extraction mondiale. Le rapport note que "les économies avancées ont réduit leur consommation de matières premières et amélioré la gestion de leurs déchets, elles devraient faire davantage pour concevoir et produire des biens qui consomment moins de ressources". Enfin l'affectation des terres à d'autres usages par la production de la nourriture a des conséquences négatives. En particulier la réorientation des terres agricoles pour la production de matières premières pour les biocarburants peut représenter un risque pour la sécurité alimentaire et la biodiversité. La déforestation à de telles fins risque de peser lourdement sur le bilan carbone. Le marché, seul, n'y peut rien Tout en énumérant des mesures précises, le PIR soutient que la durabilité des politiques économique et l'atténuation significative des gaz à effet de serre nécessitent des signaux et incitations pour soutenir l'innovation, il préconise d'intervenir en cas de défaillance du marché, et d'investir dans l'aménagement urbain et l'éducation. Comme priorité pour les gouvernements, il suggère la refonte des systèmes budgétaires et fiscaux et le retrait des subventions aux prix des ressources pour accroître leur productivité. La deuxième mesure consiste en la reformulation (juridique) des schémas d'investissement pour encourager l'économie verte dans les entreprises, les infrastructures, les bâtiments et les transports en commun, ainsi que dans les systèmes d'énergie et d'approvisionnement en eau. L'accent est mis sur les marchés publics qui doivent jouer un rôle important en encourageant le passage à des produits et services dont la confection se fait (s'est faite) avec des niveaux bas de consommation de ressources et d'émissions de gaz à effet de serre. Enfin, "les gouvernements peuvent influencer directement la formation et les compétences qui sous-tendent la transition vers une utilisation durable des ressources par l'investissement dans les systèmes d'éducation et l'amélioration des programmes ainsi que la facilitation du transfert des connaissances". Qu'en est-il chez nous ? Dans une économie de rente adossée quasi-exclusivement aux hydrocarbures il y a peu de place à une rationalisation de l'extraction de ressources. A cette frénésie de consommation des ressources naturelles s'ajoutent les problématiques de l'octroi des marchés publics et l'absence de la promotion d'une réforme fiscale écologique qui sont deux instruments qui permettraient aux décideurs d'influer sur la durabilité des infrastructures, des processus et des produits en général. Chez nous, la fiscalité écologique est réduite à l'introduction de taxes sur les dommages environnementaux. Ces taxes, à la fois dérisoires et faiblement ciblées, sont rarement acheminées vers des activités spécifiques qu'elles sont censées financer ou du moins promouvoir (gestion de déchets, pollution des sols, de l'eau et de l'air...) quand elles sont recouvertes. Quant aux marchés publics, l'absence de transparence et de contrôle ainsi que l'accaparement de la commande publique par le pouvoir exécutif (à différents niveaux) rendent caduc toute tentative d'orientation vers l'encouragement de l'économie verte. R. S.