Bien qu'ils exposent dans l'exiguïté de m'khazen (ateliers), l'artisanat local reconquiert d'une timide avancée, sa devanture qu'il n'aurait jamais du perdre, puisqu'il est à l'antique médina d'Alger, ce que le jasmin est à la douéra. Notamment lorsque el-yasmine s'enroule autour du darbouz (rampe) du foqani de la bâtisse traditionnelle. Pour s'en convaincre, quoi de mieux qu'une tahwissa (virée) à Bab Djedid, pour évaluer la progression, certes "frileuse", voire timorée, mais hardie d'une poignée d'artisans qui font du mieux qu'ils peuvent pour séduire l'œil du touriste. L'un d'eux, Mustapha, un dinandier de son état qui étincelait dans l'étincelant savoir-faire du cuivre repoussé. Seulement, Mustapha ne se risque plus dans l'onéreux façonnage du cuivre et préfère plutôt peindre sa Casbah qu'il immortalise dans l'"exposition permanente" qu'il tient dans sa houinta (échoppe) à peine plus grande qu'un mouchoir de poche. Pendant ce temps et à une giclée d'eau de l'aïn (la fontaine) de Sidi-Ramdane, Bahia la potière façonne à l'aide de son tour, des ustensiles, dont des cruches, des mesbah (lampe à huile) qu'elle lustre de chatoyants signes berbères. Autre intérêt sur l'itinéraire de la rue Sidi-Dris-Hamidouche, il y a l'artisan Abderrezak, ce faiseur de chebek (navire) qu'il stylise au souvenir de l'épopée de la course en Méditerranée des corsaires de la "Taïfa" (marine algérienne). Du reste, La Casbah à l'air de revivre à la fréquence mélodieuse de l'écho d'instruments d'esquisse et de façonnage du dinandier auquel s'unie le bruit des coups de marteau qui fusent de l'atelier sis en contrebas de l'ancienne rue de La Casbah, où Farid Smaallah l'artisan dessinateur et décorateur enjolive de son talent sendouq lâaroussa (la malle de la mariée) de tendre grand-mère. Digne élève de l'enlumineur Mustapha Ben Debbagh (1906-2006), Farid égaie La Casbah, des couleurs qu'elle n'a plus dans ses z'niqat. Autrement, il reste si peu d'artisans à Bir-Djebah, si ce n'est l'ébénisterie qui est contiguë à la mosquée du saint Sidi-M'hamed-Cherif. Sinon, qu'il ne reste rien de l'enfilade de m'khazen où se façonnaient les «joyaux» de lâaroussa (la mariée) : "L'artisanat requiert de coûteux frais de gestion, du fait qu'en plus de l'inabordable coût de la matière première, il y a aussi l'impôt annuel et forfaitaire qui a été revu à la hausse, soit de 5 000 à 10 000 DA. Du reste, l'artisan est assujetti de régler ses factures au comptant, eu égard aux mesures dites de taqachouf qui s'en ressent sur le versement de nos cotisations au titre de notre couverture sociale", a déclaré l'ébéniste Mahiout Khaled, ce propriétaire de relais qui est à l'accueil des touristes "Au cœur de la mémoire" à la rue Sidi-Dris-Hamidouche. Au demeurant, l'abrogation en 1979 de la carte d'artisan dite "rasma el-aslia", n'est pas faite pour arranger les choses. D'où l'exigence de tendre la main à ces artisans qui résistent vaille que vaille à la pérennité de leur emploi et à la sauvegarde de La Casbah. Louhal Nourreddine