Le président de la chambre correctionnelle près le tribunal de Dar El-Beïda a reporté, hier, le procès de l'activiste dans le mouvement citoyen, Fodil Boumala, au 23 février prochain. Sa décision a été motivée, selon Me Abdelghani Badi, l'un des avocats de la défense, par un besoin de disposer de plus de temps pour visionner et analyser les enregistrements audiovisuels, compilant les déclarations et interventions publiques de l'ancien journaliste à la télévision publique. "Ces enregistrements sont versés dans le dossier comme des preuves à charge", nous précise Me Badi, pas du tout convaincu par les arguments du magistrat. Me Nabila Smaïl informe que des avocats sont venus de plusieurs wilayas pour défendre le prévenu. "C'est un dossier monté de toutes pièces. Nous avons été surpris d'entendre le juge annoncer le report du procès au motif qu'il n'avait pas pu regarder le CD sur la base duquel est fondée l'accusation", déplore-t-elle, estimant, elle aussi, "incongru de différer l'audience de deux semaines à cause d'un CD qui se lit en dix minutes, et dans le cas d'un seul détenu". Elle fait le lien, sans ambiguïté, avec l'approche du premier anniversaire du mouvement citoyen. "Ce n'est pas une coïncidence. C'est comme si Fodil Boumala était l'instigateur et le moteur du hirak." Elle regrette, dans la foulée, que certains juges n'aient pas compris qu'ils sont le vecteur du peuple et l'incarnation de l'indépendance de la justice. "Malheureusement, les magistrats ne sont pas encore conscients de leur pouvoir et de leur influence sur le processus d'édification d'un Etat démocratique. Ils ont fait une semaine de grève, le régime a tremblé, mais ils n'assument pas encore leurs prérogatives constitutionnelles", s'emporte l'avocate inscrite au barreau de Tizi Ouzou. Les proches et les amis de Fodil Boumala ont été, naturellement, désappointés par un report qui le maintiendra encore quinze à vingt et un jours supplémentaires à la Maison d'arrêt d'El-Harrach, puisque le juge en charge du dossier a refusé de lui accorder la liberté provisoire. Pourtant, le militant est en détention préventive depuis le 19 septembre dernier. Des poursuites judiciaires ont été engagées contre lui pour "atteinte à l'intégrité du territoire national" et "atteinte à l'unité nationale". Pour des chefs d'inculpation identiques, l'activiste Samir Belarbi a été relaxé, la semaine dernière, par le président de la chambre correctionnelle du tribunal de Bir-Mourad-Raïs. Encouragés par ce verdict jugé équitable dès lors que le dossier du prévenu ne contenait aucune preuve de sa culpabilité, les avocats se sont préparés à développer un plaidoyer qui démantèlera également les accusations portées contre Boumala. Le scénario de la première audience du procès a, néanmoins, été écrit autrement.