"Tous les soignants sont mobilisés. Nous n'avons pas changé de procédé de lutte. Nous sommes en état de guerre", a lâché, jeudi, le ministre de la Santé, qui a évoqué le transfert de patients vers d'autres structures pour faire face à la saturation de certains établissements de santé. Tant redoutée, la deuxième vague de la pandémie de Covid-19 déferle désormais sur le pays. Le vocabulaire lié à la crise sanitaire a forcément changé vu la progression inquiétante de la pandémie. Ces mots, forts et alarmants à la fois, ont été prononcés, jeudi, par le ministre de la Santé, Abderrahmane Benbouzid, dans une conférence de presse qu'il a animée au siège de son département. "Il y a péril en la demeure. Nous sommes dans la 2e vague. Elle est violente. Et les prochains jours risquent d'être encore plus graves", a averti le ministre qui a développé, devant un parterre de journalistes, un discours direct et franc. Le ministre a d'emblée soutenu que les autorités sanitaires ne cachent rien et ne travestissent pas la réalité de la crise sanitaire causée par le coronavirus. "Les chiffres des contaminations sont ce que sont les tests PCR réalisés." C'est-à-dire que les décomptes épidémiologiques communiqués chaque jour représentent le nombre de tests PCR réalisés par jour. Le ministre a imputé cette folle recrudescence de l'épidémie à la baisse de vigilance et au non-respect des règles sanitaires de prévention et de protection contre le Sars-CoV-2 qui se propage à une vitesse vertigineuse au sein de la population depuis une quinzaine de jours. C'est dire que ce que nous vivons ces jours-ci pourrait être logique à la suite d'un relâchement total et impuni sur le terrain. Le représentant du gouvernement a souligné que le meilleur et le seul moyen susceptible de stopper l'élan de la deuxième vague reste incontestablement le port du masque. Sur la totalité des personnes contaminées, combien meurent en Algérie ? Le taux de létalité annoncé est-il réel d'autant que la mortalité induite par la Covid est liée à l'âge ? Tout en regrettant tout décès enregistré jusque-là, le ministre a affirmé que le pourcentage correspondant au nombre de morts par rapport au nombre de personnes infectées n'est pas aussi alarmant que celui enregistré dans d'autres pays. L'Algérie déplorait, jusqu'à jeudi dernier, 2 011 décès sur 60 169 personnes testées positives par la PCR. "Le masque est et restera le seul moyen qui garantit une protection totale contre cette maladie", préviendra le conférencier en présence des membres du Comité scientifique et de ses cadres centraux. Pour lui, cette flambée "démentielle" de la pandémie a déjà frappé de plein fouet plusieurs pays avant l'Algérie. "La Covid-19 reste tout de même un ennemi particulier. Il est désarçonnant et incontrôlable", alertera le ministre qui, pour la circonstance, se fait appeler "M. le ministre Covid". C'est dire que Benbouzid est, lui aussi, mobilisé sur le front au même titre que les blouses blanches qui mènent une guerre contre la Covid-19 au péril de leur vie. Si l'on regarde la vitesse d'évolution des contaminations et les taux d'incidence enregistrés ces derniers jours, on pourrait voir que les courbes indicatrices de l'épidémie sont au rouge. Des pics sont en train de pulvériser tous les records jour après jour au point de comptabiliser désormais un écart de 100 cas de plus toutes les 24 heures. Les courbes des contaminations passent la barre de 400 à 600 cas en deux jours seulement. Cette marge de progression fulgurante reste tout de même inédite. Les derniers chiffres du Dr Fourar, à savoir 648 cas de nouvelles contaminations en 24 heures, montrent bien la gravité de la crise sanitaire. Les cris d'alarme poussés par des médecins face aux flux grandissant de malades en sont une preuve supplémentaire. "Je suis le ministre de la Covid" Les autorités sanitaires alertent que l'heure est à la mobilisation générale pour venir à bout de cette infection qui tue. Pour autant, le ministre a pris soin de reprendre l'historique des courbes de la pandémie depuis l'identification du cas zéro. Histoire de rassurer la population angoissée par la folle recrudescence de la maladie, en rappelant que la période d'impréparation qui a marqué les premières semaines de lutte relève désormais du passé. Puisqu'aux mois de mars et d'avril notamment, les outils de protection destinés aux soignants sur le front se faisaient rares et les lits dédiés à la Covid manquaient dans plusieurs établissements hospitaliers. Pour le ministre, la stratégie de riposte et l'organisation de prise en charge ont été renforcées non seulement en moyens, mais aussi grâce à l'expérience acquise sur le front. Il a rappelé que son département a tenu à mettre le paquet en termes de moyens durant une longue période de "trêve" pandémique ponctuée par une décrue très significative. "La longue période de décrue a été mise à profit pour renouveler et renforcer les stocks en moyens de prévention et de lutte, des kits de test PCR. Tous les soignants sont mobilisés. Nous n'avons pas changé de procédé de lutte. Nous sommes en état de guerre", a assuré Benbouzid. Chiffres liés à la prise en charge dans les hôpitaux et à l'évolution épidémiologique présentés par les cadres centraux de son département à l'appui, le conférencier a soutenu que les lits d'hospitalisation mobilisés pour la Covid-19 s'élèvent à 16 187 lits jusqu'au 31 octobre dernier. Et le taux national d'occupation des lits est de l'ordre de 28%, soit 5 072 places seulement occupées, alors que le nombre de places en réanimation est de 411 sur 1 313 dégagées à l'échelle nationale. Au même registre, le ministre a fait savoir qu'en cette période de deuxième vague, le principe de transfert de patients symptomatiques aux formes sévères est en vigueur pour faire face à la saturation de certains établissements de santé. "Nous avons transféré des malades qui nécessitaient des soins intensifs vers les hôpitaux de Tipasa ou des places en réanimation étaient disponibles. Jusqu'à mercredi 4 novembre, pas moins d'une trentaine de places en réanimation étaient libres sur un total de 46 dans la wilaya de Tipasa", lancera Abderrahmane Benbouzid. Par ailleurs, le président du Comité scientifique a souligné la "détermination" politique des pouvoirs publics à aller acquérir le vaccin contre la Covid-19. "Le Premier ministre a réuni récemment les membres du Comité scientifique en présence du ministre des Finances où il a réitéré la volonté du gouvernement d'acquérir le vaccin destiné à immuniser la population entière sans distinction de citoyens. Dès sa commercialisation, l'Algérie acquerra le vaccin pour protéger ses citoyens et ce, quel que soit son prix", a affirmé le conférencier. Dans ce cadre, M. Benbouzid a rappelé que l'Algérie a intégré "le groupe Covax qui compte 170 pays, ainsi que celui de l'Unicef qui s'emploie à acquérir 500 millions de vaccins à prix réduit". Enfin, le ministre a insisté, en cette période de deuxième vague, sur l'importance du respect des obligations sanitaires et de la vigilance des citoyens quant à la gravissime situation épidémiologique.