Cette sortie a pris de court la classe politique qui commençait à insister de nouveau sur l'idée du retour à une période de transition. Dans son allocution surprise de dimanche dernier, le chef de l'Etat, Abdelmadjid Tebboune, a notamment rappelé sa volonté de poursuivre la "feuille de route" politique qu'il a tracée depuis sa campagne électorale pour la présidentielle de décembre 2019. Il a indiqué avoir demandé à la présidence de la République de presser la commission chargée de rédiger la loi électorale et la loi sur les partis politiques de "rendre ses conclusions" dans un "bref délai" de "10 à 15 jours". Cette annonce du chef de l'Etat visait, selon toute vraisemblance, à évacuer du débat les supputations qui commençaient à s'exprimer sur la scène politique concernant les différents scenarii possibles au cas où l'état de santé d'Abdelmadjid Tebboune viendrait à se dégrader. Mais pas seulement, puisque le pouvoir affiche, à travers les propos de Tebboune, son attachement à sa "feuille de route" qui consiste à organiser, après le référendum portant sur la révision de la Constitution, des élections législatives et locales anticipées pour "doter l'Algérie de nouvelles institutions légitimes", comme l'affirmait Abdelmadjid Tebboune lors de sa dernière sortie médiatique quelques semaines avant son admission à l'hôpital. Cette sortie a pris de court la classe politique qui commençait à insister de nouveau sur l'idée du retour à une période de transition. Sauf que cet attachement, qualifié par le président du RCD, Mohcine Belabbas, d'"entêtement suicidaire", risque de poser problème. "Selon la logique du chef de l'Etat, les élections législatives et locales auront lieu sur la base de la Constitution qui vient d'être proposée au référendum. Or, les Algériens ont massivement rejeté ce texte. Cela aura donc une incidence négative sur les élections qui en découleront. Ce scrutin manquera donc de légitimité", analyse Sofiane Sakhri, politologue et militant politique. "Il y a une rupture du pacte social entre le pouvoir et la société", insiste l'universitaire qui constate, ainsi, que les propositions qui sont actuellement sur le terrain "vont donc disparaître" de fait. Hasard du calendrier ou calcul politique, les résultats définitifs du dernier scrutin référendaire ont été publiés dans le Journal officiel au lendemain du message présidentiel à la nation. Mais la nouvelle version de la loi fondamentale ne sera applicable qu'une fois paraphée par le chef de l'Etat. En attendant, et histoire sans doute de gagner encore du temps, la présidence de la République a déjà élaboré les deux lois organiques "urgentes" — la loi sur les partis et le code électoral — nécessaires pour la préparation des élections législatives et locales qui auront lieu probablement au printemps prochain. Initialement, Abdelmadjid Tebboune souhaitait que ce double scrutin ait lieu avant la fin de l'année en cours. Mais ses soucis de santé ont complétement chamboulé son agenda. Les deux textes seront certainement les derniers qu'adoptera l'actuelle Assemblée avant sa dissolution. Une perspective qui prendra certainement encore quelques semaines et qui dépendra surtout de la date de la signature officielle de la nouvelle version de la Constitution, dont l'adoption a été marquée par un très faible taux de participation. Une donne qui ne semble pas constituer un obstacle pour Abdelmadjid Tebboune, puisqu'il compte "aller jusqu'au bout" de son plan en dépit de l'opposition d'une partie de la classe politique, mais aussi de la défiance populaire, si l'on se base sur le peu d'engouement qui a marqué la présidentielle et le référendum sur la Constitution.