L'oxygène manque dans les hôpitaux qui enregistrent une affluence record, ces derniers jours, de patients en détresse respiratoire. "Le problème majeur dont souffrent les hôpitaux algériens actuellement est le manque d'oxygène et non les lits", a admis le ministre de la Santé, Abderrahmane Benbouzid, lors d'une rencontre d'évaluation qui s'est tenue jeudi avec les directeurs de la santé publique, appelant à "la coopération entre tous pour surpasser cette crise en rassurant le citoyen loin de tout stress et discours pessimistes". Pour Lyès Merabet, président du Syndicat national des praticiens de la santé publique, l'afflux accéléré des malades a mis les hôpitaux sous pression : "Un hôpital qui recevait entre 10 et 20 patients Covid, en une à deux semaines, est confronté actuellement à ce même nombre en une heure. La wilaya de Blida compte actuellement 800 hospitalisations Covid-19. Tous ont besoin de grandes quantités d'oxygène, alors que les citernes ont une capacité de stockage limité. Si l'approvisionnement n'est pas constant, il y a risque de rupture de stock d'oxygène." Ce praticien de la santé publique estime qu'on n'a pas tiré les leçons de la deuxième vague "lorsque l'hôpital de Biskra a connu un épisode de manque d'oxygène". "Il y a eu un relâchement. Il ne fallait pas attendre cette troisième pour réagir", dit-il. Les hôpitaux publics n'ont pas prévu des plans prospectifs, précise-t-il, pour acquérir des générateurs d'oxygène. Actuellement, détaille un infirmier qui a requis l'anonymat, la plupart des structures sanitaires sont alimentées par de simples bouteilles d'oxygène pour lesquelles, il faut mobiliser des équipes pour les transporter, et qui, au final, alimentent le malade qu'environ 7 heures. Une scène qui s'est déroulée à l'hôpital d'Aïn Taya, largement relayée sur les réseaux sociaux, illustre bien cette situation. On y voit des hommes en blouses blanches se ruant sur un camion, emportant en courant des bonbonnes d'oxygène. Pourtant, selon le ministre de l'Industrie pharmaceutique, Lotfi Benbahmed, le pays a presque quadruplé en 2021 sa production par rapport à l'année dernière, passant à plus à 400 millions de litres d'oxygène gazeux, sous-entendant que le manque d'oxygène dans les hôpitaux est avant tout une question de carence en installations, de gestion des stocks et de distribution. La solution, selon Lyès Merabet, est "d'envisager lors de la construction de nouveaux hôpitaux et cliniques des installations de production et de répartition dans les chambres d'oxygène médical en plus des citernes de réserve". Le Premier ministère a annoncé dans ce sens, avant-hier, l'acquisition de dix unités de productions d'oxygène à répartir sur les grands établissements hospitaliers avec pour but d'atténuer la pression qui prévaut actuellement. Mais les Algériens restent circonspects vis-à-vis des dernières mesures prises par les pouvoirs publics. Les initiatives citoyennes de collecte de dons se sont multipliées pour doter en urgence les hôpitaux en oxygène. La hausse exponentielle des contaminations a été, hélas aussi, l'occasion pour certains de lancer un fructueux business. La tension sur les concentrateurs d'oxygène a, dans ce cadre, entraîné une flambée de leur prix, atteignant jusqu'à 250 000 DA l'unité de 10 litres. Quant à leur location, les prix affichés sur les réseaux sociaux ne descendent pas au-dessous de 4 500 DA la journée. De même pour les oxymètres vendus à 11 000 DA, alors qu'ils étaient à moins de 6 000 DA, il y a quelques semaines.